Les Tigres tamouls rendent les armes

L’armée sri-lankaise a fini par réduire la dernière position de 3,5 kilomètres carrés au nord-est de l’île que tenaient les Tigres tamouls du LTTE (Liberation Tigers of Tamil Eealam), un mouvement séparatiste classé parmi les organisations terroristes, qui n’a cessé de perdre du terrain depuis la fin de l’année 2008. « Je suis fier d’annoncer que mon gouvernement, grâce à l’engagement total des forces armées, a finalement battu militairement le LTTE » a déclaré, le 17 mai, Mahinda Rajapakse, le président du Sri-Lanka.

Pour faire la décision, les militaires sri-lankais n’ont pas fait dans la nuance puisqu’ils n’ont pas hésité à bombarder à l’arme lourde les dernières poches de résistance du LTTE, malgré la présence de 20.000 à 50.000 civils dans la zone des combats.

Cette défaite militaire des Tigres Tamouls met ainsi fin à près de 26 ans de guerre civile. C’est en juillet 1983 que commence les affrontements entre le LTTE et l’armée sri-lankaise. A l’époque, ce mouvement créé en 1976 pour revendiquer la création d’un Etat indépendant, prend ouvertement les armes suite à des exactions cinghalaises à l’égard de la population tamoule, en réaction à un attentat contre une unité gouvernementale.

Malgré un désavantage évident en terme de moyens et de démographie (le pays compte actuellement 74% de cinghalais pour 12,5% de tamouls), le LTTE aura mené la vie dure aux forces de sécurité gouvernementales. Mais le but que le mouvement s’était fixé, à savoir la création d’un Etat Tamoul, n’avait guère de chance d’aboutir : il était impossible au LTTE et aux 3 millions de Tamouls d’imposer leurs vues à Colombo et aux 17 millions de Cinghalais.

D’autant plus que les responsables du mouvement ont commis des erreurs, comme celle par exemple de se retourner contre l’Indian Peace-Keeping Force déployée par New-Delhi dans l’île dans les années 1980, alors que les guérilleros tamouls avaient été accueillis dans des camps d’entraînement dans l’Etat indien du Tamil Nadu. Le LTTE est également accusé par la justice indienne d’avoir assassiné le Premier ministre Rajiv Gandhi, en 1992.

Cela étant, les Tigres auront constitué une force insurrectionnelle très organisée et en quelque sorte novatrice, ce qui explique en partie leur longévité. Ainsi, ils ont eu recours à l’attentat suicide. La première attaque de ce type a eu lieu en 1987, avec un camion piégé lancé contre un camp militaire de la péninsule de Jaffna. Il est difficile d’évaluer le nombre d’attentats commis par les kamikazes du LTTE, regroupés au sein de la la brigade des Tigres noirs (Black Tigers) mais il est toutefois admis que c’est le mouvement tamoul qui en perpétré le plus parmi toutes les organisations terroristes.

Par ailleurs, le LTTE n’a pas hésité à mettre en première ligne des enfants soldats, âgés entre 13 et 17 ans. Bien que dénoncée, les Tigres tamouls n’ont jamais renoncé à cette pratique. Selon l’UNICEF, ils auraient même enrôlés 5.794 enfants depuis 2001.

Autre particularité du LTTE : il a pu compter sur une marine et une aviation, ce qui n’est pas commun pour les mouvements insurrectionnels. En effet, les « Tigres des mers », du colonel Soosaï, ont constitué la marine de guerre des forces séparatistes tamoules. Dotés de plusieurs centaines d’embarcations rapides armées de mitrailleuses et de lance-roquettes, ainsi que de submersibles apparemment jamais utillisés, ils ont mené plusieurs batailles navales qui se sont souvent terminées à l’avantage de l’armée sri-lankaise. Quant aux moyens aériens, regroupés sous la bannière de la « Tamil Eelam Air Force », ils ont été mis en évidence en mars 2007, lors d’un raid mené contre une base militaire de Colombo. Son existence a pris fin le 20 février dernier, au cours d’une opération suicide manquée impliquant ses deux derniers appareils encore en état de voler.

Maintenant que la guerre civile, qui a fait 70.000 victimes, semble terminée, il reste maintenant à gagner la paix, ce qui est un pari difficile pour les autorités de Colombo. Et pour cela, encore faut-il être bien certain que le LTTE ne renaîtra pas de ses cendres.

Pour l’instant, les rescapés de la guérilla tamoule portent le fer sur le terrain médiatique, en accusant l’armée sri-lankaise de « traîtrise » et de « crime contre l’humanité », puis en soutenant que leur chef, Velupillaï Prabhakaran, est toujours en vie, contrairement à ce qu’affirme Colombo.

« Je suis très heureux de confirmer que nous avons tué Prabhakaran, cet impitoyable dirigeant terroriste » a déclaré, vidéo à l’appui, le général Srath Fonseka, le chef de l’armée de Terre sri-lankaise. « Notre dirigeant bien aimé continuera de conduire la quête de dignité et de liberté pour le peuple tamoul » a rétorqué Selvarasa Pathmanathan, le chef des relations internationales du LTTE, sur le site Internet de l’organisation.

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