Bilan du sommet de l’Otan de Strasbourg-Kehl

Outre les violences dont Strasbourg a été le théâtre, voici ce qu’il faut retenir du sommet de l’Otan.

Europe et défense

Le président américain, Barack Obama, a appelé les Européens à faire davantage d’efforts sur le plan militaire. « Nous ne cherchons pas à être le patron de l’Europe, nous cherchons à être des partenaires avec l’Europe. Nous voulons des alliés forts. Nous voudrions voir l’Europe avec des capacités militaires renforcées » a-t-il déclaré, le 3 avril, en compagnie du président français, Nicolas Sarkozy, lors d’une conférence de presse.

« Plus ils (les Européens) seront capables en matière de défense, plus nous pourrons agir de concert face aux défis auxquels nous devons faire face ensemble » a-t-il ajouté. Par ailleurs, Obama a estimé que l’Europe est davantage menacée par le terrorisme que les Etats-Unis, en raison de sa proximité géographique avec l’Afghanistan et le Pakistan. « Il est probablement plus vraisemblable qu’Al-Qaïda lance une grave attaque terroriste en Europe qu’aux Etats-Unis » a-t-il affirmé.

Retour de la France au sein du commandement militaire intégré

Après l’avoir quitté en 1966, ce sommet a été l’occasion de marquer le retour de la France dans le commandement militaire intégré de l’Alliance atlantique. « Nous sommes de la famille, nous sommes dans la famille, nous sommes des alliés, nous sommes des amis » a ainsi déclaré le président Sarkozy. « Nous voulons être des amis et des alliés debout » a-t-il toutefois nuancé.

« Nous sommes des partenaires, nous sommes libres, nous sommes indépendants mais nous ne sommes plus considérés comme hostiles » avait affirmé, le 3 avril, le ministre de la Défense, Hervé Morin, sur les ondes de RFI.

Nouveau secrétaire général de l’Otan

Les 28 pays membres (la Croatie et l’Albanie ont rejoint officiellement l’Alliance) se sont mis d’accord sur le nom du successeur de l’actuel secrétaire général de l’Otan, le Néerlandais Jaap de Hoop Scheffer. Après des tractations avec la Turquie qui était réticente, ce sera finalement le Danois Anders Fogh Rasmussen qui occupera cette fonction à compter du 1er août prochain. En échange, Ankara a obtenu des postes supplémentaires au sein de l’Otan, tels que celui de secrétaire général adjoint.

Cependant, et comme la Turquie reprochait à Rasmussen ses positions lors de la publication des caricatures de Mahomet en 2006 par des journaux danois, c’est la première fois qu’un membre de l’Alliance menace d’opposer son veto à la nomination d’un secrétaire général pour des raisons religieuses. « Cela n’augure rien de bon d’un point de vue européen, car la liberté d’expression est une valeur tellement fondamentale, au moment où la Turquie aspire à devenir membre de l’Union européenne » a commenté le Finlandais Olli Rhen, le commissaire européen à l’Elargissement.

Afghanistan, 5.000 hommes de plus

« Nous n’avons pas le droit de perdre en Afghanistan » a martelé le président Sarkozy, car « là-bas de joue une partie de la liberté du monde ». Aussi, quand une loi autorisant le viol des femmes de confession chiite par leur conjoint est en passe d’être adoptée par Kaboul, le message est quelque peu brouillé. C’est pour cela que l’Otan a demandé une « nouvelle délibération » du Parlement afghan, « conforme à la Constitution afghane. »

« Nous ne sommes pas décidés à transiger » a affirmé le président Sarkozy. « Le respect des femmes (…) est un principe important » a ajouté Barack Obama.

Par ailleurs, la France a affirmé son « soutien complet à la stratégie américaine en Afghanistan ». La tonalité est la même de l’autre côté du Rhin. « Nous avons besoin d’objectifs et nous devons vérifier dans les délais précis ce que nous avons atteints » a déclaré la chancelière allemande, Angela Merkel, au sujet de la proposition du président américain de poser des jalons pour mesurer les progrès accomplis en Afghanistan.

Quant aux renforts demandés par l’administration américaine, les pays européens de l’Otan ont consenti à fournir 5.000 hommes supplémentaires. La France enverra bien 150 militaires de la Gendarmerie nationale dans le cadre d’une contribution civile censée former les futurs gendarmes afghans. La Grande-Bretagne renforcera son contingent, qui est déjà le plus important des pays européens, de 900 hommes. L’Allemagne et l’Espagne ont annoncé chacune des renforts de 600 soldats.

Au total, 5.000 hommes supplémentaires seront engagés en Afghanistan, dont 3.000 pour assurer la sécurité du prochain scrutin présidentiel qui doit se tenir le 20 août prochain. Les Etats-Unis avaient déjà annoncé l’envoi de 17.000 soldats supplémentaires, ainsi que 4.000 instructeurs. Pour le Pentagone, cela reste insuffisant : il en réclame 10.000 de plus.

Russie

Ce n’est pas peu dire que les relations entre l’Otan et la Russie ont été tendues au cours de ces derniers mois. Suspendu lors de l’affaire géorgienne d’août 2008, le Conseil Otan-Russie va reprendre ses réunions dans les semaines à venir. Les Etats membres de l’Alliance ont estimé que « l’Otan et la Russie ont des intérêts communs en matière de sécurité », que ce soit « la stabilisation de l’Afghanistan », « la lutte contre le terrorisme, la drogue et la piraterie » ou encore « le désarmement et la non-prolifération ».

Nouveau concept stratégique

Les Etats membres se sont mis d’accord sur la nécessité d’élaborer un nouveau concept stratégique de l’Otan, pour remplacer celui en vigueur depuis 1999. Il devrait être présenté à Lisbonne, lors du prochain sommet de l’Alliance atlantique. La clause d’assistance entre les membres restera toutefois « la pierre angulaire de l’Alliance ». Il s’agira également de renforcer les capacités de l’Otan pour la gestion des crises et des conflits susceptibles de peser sur ses intérêts.

Photo : (c) DICOD

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