Le dernier voyage du Clemenceau

Le porte-avions Clémenceau a quitté la rade de Brest, ce 3 février au matin, pour rejoindre le port britannique de Hartlepool où il sera démantelé par la société Able UK.

La coque Q790 – telle est la nouvelle désignation du bâtiment – a été pris en charge par le remorqueur Anglian Earl pour un voyage qui devrait durer quatre jours selon les prévisions météorologiques.

Le départ de l’ancien fleuron de la Marine nationale aurait pu ne pas avoir lieu si le tribunal administratif de Rennes n’avait pas rejeté, la veille, un recours en référé dépose par l’association écologiste AE2D (Agir pour un environnement et le développement durable).

Après plus de 36 ans de service actif, le Clémenceau a été désarmé le 17 juillet 1997. Initialement, le navire aurait du être démantelé par le chantier espagnol Gijonese, en 2003. Seulement, au lieu de faire route faire l’Espagne comme il avait été convenu, celui qui n’est plus que la coque Q790 prend la direction de la Turquie. Finalement, le bâtiment revient à son port d’attache de Toulon, après que la Marine nationale a résilié le contrat conclu avec la société ibérique.

En décembre 2005, le Clemenceau commence son périple vers l’Inde, malgré les protestations d’associations écologistes. Quelques jours plus tard, le 6 janvier, la Cour suprême indienne émet un avis défavorable concernant le désamiantage et le démantèlement du navire par le chantier d’Alang. Pour corser le tout, l’Egypte lui interdit de passer par le canal de Suez.

Après des démêlés politico-judiciaires, alimentés par l’activisme d’associations écologistes, le président de la République de l’époque, Jacques Chirac, ordonne le retour en France de l’ancien porte-avions le 15 février. Le Clemenceau rejoint donc la rade de Brest, après avoir effectué deux fois le tour de l’Afrique.

En juillet 2008, la société britannique Able UK remporte l’appel d’offres lancé quelques mois plus tôt pour le désamiantage et le démantèlement du navire. Si les grands hommes sont souvent maltraités par des nations ingrates, il en va de même pour les grands navires.

Premier porte-avions de conception totalement française – hormis le Cuirassier Le Bearn, transformé pour accueillir des aéronefs dans l’entre-deux guerres – le Clémenceau aura porté les couleurs de la France sur toutes les mers du globe, que ce soit dans le Pacifique, dans le Golfe Persique au moment de la guerre Iran/Irak et de l’opération Tempête du Désert en 1991, dans l’Atlantique, où il a accompli sa dernière mission, ou encore en Méditerranée. D’ailleurs, c’est de son pont d’envol que les Super Etendard ont décollé pour mené un raid sur Baalbek en représaille de l’attentat du Drakkar d’octobre 1983 où 58 militaires français avaient perdu la vie.

En 36 ans de carrière, le Clémenceau aura donc ainsi parcouru l’équivalent de 48 tours du monde. Les 40.000 marins qui ont servi à son bord auraient-ils sans doute préférés voir ce navire être sabordé plutôt que d’être vendu au poids à des ferrailleurs…

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]