La France va muscler sa participation en Afghanistan
Selon le quotidien The Times paru ce week-end, le président de la République, Nicolas Sarkozy, devrait discuter du renforcement des troupes françaises en Afghanistan avec le Premier ministre britannique, Gordon Brown, lors de sa visite d’Etat en Grande-Bretagne mercredi prochain.
Or, si l’on en croit le ministre de la Défense, Hervé Morin, la décision d’envoyer des troupes supplémentaires n’est pas encore prise et qu’aucune annonce allant dans ce sens ne sera faite lors du prochain prochain sommet de l’Otan qui doit se tenir prochainement en Roumanie. « On voit très bien que le contrôle militaire ne suffit pas, qu’il faut un plan global pour l’Afghanistan, et c’est de ça dont le président de la République va discuter à Bucarest », a-t-il déclaré, mardi, à l’antenne de LCI. « C’est à partir des réponses qui seront apportées à cette démarche globale que le président de la République décidera, ou non, de mettre des forces complémentaires. »
Pour autant, l’idée de renforcer le contingent français en Afghanistan et de s’impliquer davantage dans les combats contre les talibans et leurs alliés est dans l’air depuis plusieurs semaines. Il reste à en voir les modalités. Le ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, a confirmé, à l’antenne d’Europe 1, l’envoi de soldats supplémentaires mais sans en préciser le nombre. « Le chiffre sera précisé par le président de la République, mais il a dit très clairement que nous augmenterions le nombre de nos soldats », a-t-il déclaré, avant d’ajouter que « la France a toujours dit qu’elle reforçait ses troupes mais qu’il faut pour cela une réflexion véritablement stratégique, c’est à dire parler avec tous ceux qui sont là-bas, parler de notre manière d’aborder, d’aider le peuple afghan. »
Le 22 décembre dernier, Nicolas Sarkozy avait par ailleurs déclaré, lors de sa visite surprise aux militaires français déployés en Afghanistan, « qu’il se joue ici une guerre, une guerre contre le terrorisme, contre le fanatisme, que nous ne pouvons, que nous ne devons pas perdre. » Or, la situation dans l’Est et le Sud du pays est délicate pour les forces de l’Otan qui y sont engagées et les pays contributeurs, Canada en tête, réclament des renforts de la part des autres membres de l’Otan, afin de mieux partager le « fardeau ».
Si les pays de l’Alliance atlantique, qui ont des troupes au contact des talibans, pressent la France de s’engager davantage en Afghanistan, il n’en reste pas moins que leur participation dans d’autres opérations reste anecdotique, pour ne pas dire inexistante alors que l’armée française y a déployés des effectifs conséquents, comme par exemple au Liban, avec la Finul, au Tchad, avec l’Eufor ou encore au Kosovo avec la KFOR.
Quoi qu’il en soit, la France compte actuellement 1.500 hommes en Afghanistan, essentiellement déployés à Kaboul et à Kandahar pour la mise en oeuvre des 3 Rafale et des 3 Mirage 2000 qui y sont basés. Près de 220 militaires sont intégrés dans des unités afghanes en qualité d’instructeurs (OMLT).
D’après le Times, qui cite un ministre ayant gardé l’anonymat, le ministère de la Défense étudierait le scénario d’un renfort d’un peu plus de 1.000 soldats – soit l’équivalent d’un bataillon – dans l’Est du pays. Il est aussi question d’un déploiement dans le Sud mais cette option ne serait pas pertinente et elle obéirait à des motivations politiques à l’égard des partenaires de la France au sein de l’Otan.
Le choix de l’Est serait le plus cohérent sur le plan militaire. Les renforts français – venant probablement du 8e RPIMa de Castres – seraient alors placés sous commandement américain mais ils pourraient travailler en liaison avec les quatre équipes d’OMLT qui opérent dans les régions de Kapisa, du Logar et du Wardak. D’un point de vue logistique, les troupes françaises pourraient aussi bénéficier, avec Kaboul, d’une base arrière qui approvisionne déjà les équipes d’OMLT.
L’Est et le Sud de l’Afghanistan sont le théâtre de combats violents contre les talibans et les activistes d’Al Qaïda qui profitent du soutien des zones tribales pakistanaises. Quand la décision sera prise d’y envoyer des troupes françaises, ces dernières devraient être opérationnelles avant l’offensive d’été traditionnelle des islamistes.