Le chef d’état-major des forces serbes envoyé à la frontière du Kosovo, où de vives tensions persistent

Après avoir exprimé son souhait de rejoindre l’Otan, Pristina a posé sa candidature à une adhésion à l’Union européenne [UE], le 15 décembre. Étant donné que l’indépendance du Kosovo n’est pas reconnue par tous les pays membres de ces deux organisations, ces deux procédures n’ont aucune chance d’aboutir… En revanche, elles ne font qu’agiter un chiffon rouge devant le gouvernement serbe.

D’autant plus que les tensions entre Pristina et Belgrade peinent déjà à s’estomper. Ces derniers mois, le dossier des « plaques d’immatriculation » que voulaient imposer les autorités kosovares à la minorité serbe a bien failli dégénérer en crise très sérieuse.

« Ce dont nous avons été témoins dans le nord du Kosovo pourrait être qualifié d’épisode d’ecchymose, mais aurait pu se transformer en une véritable hémorragie », avait ainsi commenté Zahir Tanin, le Représentant spécial du Secrétaire général pour le Kosovo, devant le Conseil de sécurité, après de vives tensions surevenues en septembre 2021.

Cela étant, un accord a fini par être trouvé entre les deux parties, grâce à une médiation de l’UE. Mais alors que l’on pensait cette question réglée, les tensions sont reparties de plus belle au début du mois de décembre. Les causes demeurent incertaines… A priori, il y en aurait au moins deux, dont l’arrestation d’un ex-policier serbe soupçonné d’avoir été impliqué dans la contestation contre le remplacement des plaques minéralogiques délivrées par la Serbie et le boycott des élections locales par plusieurs partis politiques de la minorité serbe.

Ainsi, des barricades ont été érigées dans le nord du Kosovo, de même que des barrages sur une route menant à des points points de passage situés à la frontière avec la Serbie. Des coups de feu ont été entendus… et une patrouille d’EULEX, la Mission ‘état de droit’ de l’UE au Kosovo, a été visée par une grenade assourdissante. Et, l’annonce du report des élections locales n’a pas calmé les tensions.

Le 10 décembre, et conformément à la résolution 1244 adoptée en 1999 par la Conseil de sécurité des Nations unies, le président serbe, Aleksandar Vučić, a demandé l’autorisation d’envoyer un milliers de soldats dans le nord du Kosovo à la KFOR, la force de l’Otan. Celle-ci a fait savoir, la semaine passée, qu’elle instruisait toujours cette requête…

Dans le même temps, la cheffe du gouvernement serbe, Ana Brnabic, a évoqué l’éventualité d’un nouveau conflit armé.

« Nous devons faire de notre mieux, tous ensemble, pour essayer de préserver la paix. Nous sommes vraiment au bord du conflit armé à cause des mesures unilatérales de Pristina », a en effet déclaré Mme Brnabic, lors d’une conférence avec des ONG serbes.

Ces dernières heures, plusieurs médias serbes ont affirmé que des « combats », avec des échanges de tirs, avaient opposés les manifestants aux forces de sécurité kosovares. Ce que ci a été démenti plus tard par Pristina… Cependant, la KFOR a dit enquêter sur un « incident de tir indirect », survenu le 25 décembre, à proximité de l’une de ses patrouilles et impliquant « un nombre inconnu de personnes armées ». « Il n’y a pas eu de blessés ni de dégâts matériels, et nous travaillons pour établir tous les faits », a-t-elle déclaré.

Quoi qu’il en soit, c’est donc dans ce contexte que le chef d’état-major des forces serbes, le général Milan Mojsilovic, a été envoyé, par le président Vučić, à Raska, localité située à environ dix kilomètres du Kosovo.

« Les tâches que l’armée serbe a obtenues […] sont précises, claires et seront entièrement mises en œuvre », a déclaré le général Mojsilovic. « La situation là-bas est compliquée et complexe, et elle requiert dans la période à venir la présence de l’armée serbe le long de la ligne administrative », a-t-il expliqué, sans plus de détails.

Étant donné la présence de la KFOR sur le terrain, la situation ne devrait théoriquement pas aller au-delà du point de non retour. Cependant, avec la guerre en Ukraine, l’Otan a d’autres fers au feu… Et un autre foyer d’instabilité dans les Balkans pourrait se déclarer en Bosnie-Herzégovine, où les braises de la division ne demandent qu’à repartir. Ce qui ne déplairait sans doute pas à la Russie, alliée de la Serbie.

C’est ce que redoutent d’ailleurs les responsables européens. « Nous avons renforcé notre capacité à réagir rapidement en cas de crise […] Nous continuerons à dissuader ceux qui se sentiraient encouragés à entreprendre des actions de déstabilisation », avait ainsi fait valoir Josep Borrell, le chef de la diplomatie européenne, après l’envoi de renforts à Eufor Althea, la mission militaire de l’UE en Bosnie-Herzégovine.

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