La Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest veut se doter d’une force d’intervention

En 2002, l’Union africaine [UA] devait mettre sur pied une « Force africaine en attente » [FAA] afin d’avoir une les moyens d’intervenir en cas de crise dans l’un de ses pays membres. Cinq brigades d’environ 6’000 hommes étaient alors censées se tenir en alerte. Seulement, cette initiative ne s’est toujours pas concrétisée… malgré les nombreux défis sécuritaires auxquels l’Afrique doit faire face.

Cependant, ces dernières années, des forces multinationales africaines ont vu le jour pour répondre à des crises régionales, souvent avec des résultats mitigés. Ainsi, l’UA a mis sur pied l’AMISOM pour tenter de stabiliser la Somalie, confrontée aux milices shebab, affiliés à al-Qaïda, avec le concours des pays d’Afrique de l’Est [Burundi, Éthiopie, Kenya, Ouganda, etc] et sous un mandat de l’ONU. De même qu’elle fut à la manoeuvre pour déployer une mission de maintien de la paix en Centrafrique [la MISCA] qui a depuis cédé à celle conduite par les Nations unies [la MINUSCA, ndlr].

Le même schéma avait été suivi avec la Mission internationale de soutien au Mali [MISMA], lancée par la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest [Cédéao] afin d’aider à Bamako à repousser les groupes jihadistes qui venaient de s’emparer du nord du pays. Mais elle ne fut autorisée à se déployer qu’en décembre 2012… Et, le 11 janvier suivant, la France lançait l’opération Serval, à la demande des autorités maliennes, afin d’arrêter la progression de colonnes terroristes vers le sud. Par la suite, cette MISMA fut remplacée par une mission des Nations unies [MINUSMA].

Quoi qu’il en soit, la mise sur pied d’une force africaine multinationale n’est pas simple, notamment à cause d’un manque de financements, de lacunes capacitaires dans des domaines clés, du défaut d’interopérabilité et de considérations politiques.

Ainsi en est-il de la Force conjointe du G5 Sahel [FC-G5S], dont la création par le Tchad, le Mali, le Burkina Faso, la Mauritanie et le Niger avait été vivement encouragée [et soutenue] par la France pour combattre les groupes armés terroristes [GAT]. L’instabilité politique à Bamako s’est traduite par la mise en retrait du Mali de cette organisation… et, partant, par la fin du soutien logistique que lui apportait la MINUSMA.

Pour autant, les organisations jihadistes cherchent toujours à étendre leur influence vers le golfe de Guinée. Et des pays qui n’était alors pas concerné par les attaques terroristes le sont désormais. Tel est le cas du Togo… mais aussi aussi celui du Bénin. D’où la décison prise par la Cédéao, lors d’un sommet organisé à Abuja, le 4 décembre.

« Les dirigeants de la Cédéao ont décidé de recalibrer notre architecture sécuritaire », a en effet déclaré Omar Touray, le président de la commission de l’organisation. « Il s’agit de prendre en main [notre] propre sécurité et non plus de s’en remettre à des acteurs extérieurs », a-t-il ajouté.

Aussi, a poursuivi M. Touray, ils sont « résolus à établir une force régionale qui interviendra en cas de besoin, qu’il s’agisse de sécurité, de terrorisme ou de rétablir l’ordre constitutionnel dans des États membres », alors que, justement, trois pays membres ont été suspendus de la Cédéao après avoir connu des coups d’États [Mali, Burkina Faso et Guinée].

À noter que cette annonce vient après la promesse faite en février 2020 par l’Union africaine de déployer une force de 3000 hommes au Sahel, en relation avec… la Cédéao et le G5 Sahel.

Quoi qu’il en soit, la Cédéao est visiblement déterminée à mettre en place cette force multinationale. « Des responsables militaires de la région se réuniront dans la deuxième moitié de janvier pour discuter des modalités d’établissement de la force régionale », a en effet déclaré M. Touray. Quant à son financement, il a été décidé « de ne pas s’en remettre uniquement aux contributions volontaires qui ont déjà montré leurs limites », a-t-il dit, sans livrer plus de détails.

Reste à voir si cette iniative verra effectivement le jour. Probablement que la France apportera sa pierre à l’édifice. En effet, la prochaine stratégie française en Afrique visera à « se concentrer sur la coopération et l’appui, principalement en termes d’équipement, de formation, de renseignement et de partenariat opérationnel lorsque les pays le souhaitent », a détaillé le président Macron, lors de la présentation de la Revue nationale stratégique [RNS], le 9 novembre dernier.

Cela étant, plusieurs membres de la Cédéao sont aux prises avec leurs propres problèmes sécuritaires, à l’image du Nigeria, dont les forces armées – qui passent pour les mieux armées de la région – affrontent les groupes jihadistes Boko Haram et État islamique en Afrique de l’Ouest [ISWAP] dans la région du Lac Tchad. Même chose pour le Sénégal, avec les tensions récurrentes dans la Casamance.

PHoto : Forces armées de Côte d’Ivoire

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