Selon M. Lecornu, les systèmes Crotale cédés à l’Ukraine seront remplacés par des batteries « Mamba »

Dans un entretien accordé au quotidien « Le Parisien », le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a annoncé que 2000 militaires ukrainiens seraient accueullis en France, par plusieurs unités des forces armées, dans le cadre d’un plan de formation « validé par le président de la République ». Cependant, il n’a pas précisé si cette initiative a été prise ou non dans le cadre de la mission d’assistance militaire que l’Union européenne [UE] entend prochainement lancer.

« Il y a déjà eu des formations d’artillerie faites en France pour les CAESAr [Camions équipés d’un système d’artillerie, ndlr], mais là nous changeons d’échelle », a insisté M. Lecornu, estimant que la guerre « va durer » et que, en conséquence, il est nécessaire de « former une nouvelle génération de soldats, pour tenir dans la durée ».

« Nous faisons cela en respectant les règles de droit, sans jamais être dans la cobelligérance car nous ne sommes pas en guerre. Nous aidons un pays qui est en guerre », a poursuivi le ministre.

Sur ce point, et pour rappel, la notion de « cobelligérance » n’est pas consacrée en droit des conflits armés. Et comme le rappelle une note de l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire [IRSEM], le « le fait de financer, équiper, par le biais de fourniture d’armements par exemple, renseigner ou entraîner d’autres forces armées que les siennes […] n’est pas de nature à permettre de considérer qu’un État puisse recevoir la qualification de ‘partie à un conflit armé’ international, et donc de ‘cobelligérant’ au sens du droit des conflits armés ».

Quoi qu’il en soit, et selon les détails donnés par M. Lecornu, ce plan propose une instruction généraliste du combattant ainsi que des formations spécialisées en fonction des besoins exprimés par Kiev [logistique, par exemple]. En outre, il est aussi question de former les soldats ukrainiens aux équipements qui leur seront fournis par la France.

À ce propos, le ministre a confirmé que la livraison à l’Ukraine de lance-roquettes unitaires [LRU], dont seulement 13 exemplaires sont en dotation au sein de l’armée de Terre [dont 8 seraient opérationnels, ndlr] est à l’étude. Et que, comme l’a laissé entendre M. Macron lors de son passage sur France2, le 12 octobre, que des systèmes de défense aérienne de courte portée CROTALE NG prendraient le même chemin.

Là, M. Lecornu a fait une annonce surprenante. Les systèmes CROTALE, « robustes », seront « particulièrement utiles dans la lutte anti-drones et contre les bombardements aériens » alors que les « grandes villes ukrainiennes subissent des frappes de missiles mais aussi de drones ».

Quant à savoir le nombre de missiles VT1 qu’il est prévu de livrer à l’Ukraine, le ministre a dit qu’il sera « significatif », sans plus de précision. « Nous en possédons douze [des systèmes CROTALE] mais c’est un dispositif qui a vocation à être progressivement s’éteindre et à être remplacé par des Mamba, donc cela ne créera pas un manque pour l’armée française. Le but est de boucler cette opération dans les deux mois », a-t-il dit.

À vrai dire, le propos de M. Lecornu mériterait d’être précisé. D’abord, la Loi de programmation militaire [LPM] 2019-25 ne prévoit pas le remplacement des douze systèmes CROTALE NG mis en oeuvre par les escadrons de défense sol-air [EDSA] de l’armée de l’Air & de l’Espace [AAE].

Par ailleurs, depuis 2007, celle-ci dispose de seulement huit systèmes Sol-Air Moyenne Portée / Terrestre [SAMP/T] « Mamba », dont le domaine d’emploi n’est pas le même que celui des CROTALE NG, qui ont vocation, avec leur huit missiles à poste et leur radar Mirador IV Doppler, à contrer la menace d’aéronefs volant à basse, voire à très basse altitude.

Quant au « Mamba », ses missiles Aster 30 [bientôt portés au standard Block 1NT] permettent d’intercepter à 360° tout avion et missile au-delà de 120 km de distance, à une altitude de 20 km. Il est notamment utilisé pour créer une bulle de protection autour d’une force terrestre et protéger des sites de haute valeur.

D’après ce qu’a dit M. Lecornu, faut-il en déduire que les 12 systèmes CROTALE seront remplacés par autant de SAMP/T « Mamba » à la faveur de la prochaine LPM, en cours de gestation? Dans ces conditions, quid des capacités dites SHORAD [défense aérienne de courte portée] de l’AAE?

Photo : DGA Essais de Missiles

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