La frégate multimissions Normandie a accompagné un sous-marin russe dans le golfe de Gascogne

Encore très récemment, le ministère des Armées était très discret quand il s’agissait d’évoquer les « interactions » entre les forces françaises et russes, notamment pour ce qui concernait les opérations navales. Du moins, quand il lui arrivait de les évoquer, il n’en donnait pas les détails. Ainsi, lors d’une audition parlementaire, en 2017, Jean-Yves Le Drian, alors ministre de la Défense, avait concédé que des sous-marins russes s’approchaient de nouveau « des côtes bretonnes », ce que « l’on n’avait plus vu depuis longtemps ». Mais il se refusa à en dire plus…

Mais depuis le début de l’offensive russe en Ukraine [et même un peu avant], le ton a changé. Ainsi, en février, l’État-major des armées [EMA] avait communiqué sur les moyens déployés par la Marine nationale et, dans une moindre mesure, par l’armée de l’Air & de l’Espace, pour tenir à l’oeil plusieurs bâtiments russes repérés au large des approches maritimes françaises, dont le navire-espion « Vasiliy Tatishchev ».

Plus tard, l’EMA diffusa des photographies d’avions militaires russes [dont celles d’un bombardier stratégique Tu-22 « Backfire », capable d’emporter le missile antinavire Kh-22, ndlr] prises à proximité du porte-avions Charles de Gaulle, quand celui-ci était déployé en Méditerranée orientale. Jamais cela n’était arrivé auparavant.

En juillet, à la faveur d’une audition parlementaire, le chef d’état-major de la Marine nationale [CEMM], l’amiral Pierre Vandier, révéla que les Russes illuminaient régulièrement les navires français avec leurs radars de conduite de tir. « Il faut avoir à l’esprit que, pour un navire de combat, la différence entre basse et haute intensité ne tient qu’aux ordres reçus », avait-il rappelé.

Côté russe, cela dénotait un changement de posture… Car, dans un rapport sur les enjeux de défense en Méditerranée, publié avant le début de la guerre en Ukraine, les ex-députés Jean-Jacques Ferrara et Philippe Michel-Kleisbauer avaient souligné le « respect que les Russes [avaient] pour notre marine et, d’une manière générale, pour la France ».

Quoi qu’il en soit, le ministère des Armées n’hésite visiblement plus à rendre publique les « rencontres » entre la Marine nationale et son homologue russe, du moins quand celles-ci ont lieu près des approches maritimes françaises. Probablement que ce genre de communication s’adresse autant à l’opinion publique qu’à Moscou…

Reste que, dans la soirée du 1er octobre, la préfecture maritime et le commandement en chef Atlantique [PREMAR CECLANT] a fait savoir que la frégate multimissions Normandie venait d’accompagner le sous-marin russe « Novorossiysk » et le remorqueur « Sergey Balk » dans le golfe de Gascogne. Et de préciser que l’hélicoptère NH-90 NFH du navire français avait été sollicité.

Sur les photographies diffusées via Twitter, on voit effectivement un sous-marin de type Kilo naviguer en surface. Ce qui n’est pas surprenant étant donné que, sa propulsion étant diesel-électrique, son autonomie en plongée est limitée. Admis au service en 2014, le « Novorossiysk » appartient à la flotte russe de la mer Noire.

Quant au remorqueur « Sergey Balk » [projet 23470], il a été affecté en 2020 à la flotte russe de la mer Noire. Fin août, il avait été repéré au côté du sous-marin « Krasnodar », au large de l’Espagne. Puis il poursuivit sa route vers la Baltique. Et il semble que cela soit encore sa destination.

En effet, selon les données du trafic maritime, récupérées grâce au système AIS [qui n’est cependant pas d’une fiabilité absolue], sa dernière position connue [et communiquée le 3 octobre, à 1h39 UTC] se trouve en mer du Nord… Probablement fait-il route vers la Baltique.

Évidemment, on peut considérer que le CECLANT en a trop dit ou pas assez. Ainsi, on ignore dans quelles circonstances la FREMM Normandie a « rencontré » le sous-marin « Novorossiysk », si ce n’est que la surveillance de celui-ci [ainsi que celle du « Sergey Balk »] a été assurée « en collaboration étroite avec nos partenaires européens ». Quoi qu’il en soit, il semblerait que la Russie est en train de renforcer ses capacités sous-marines dans la région de la Baltique, où les gazoducs NordStream1 et NordStream2 ont récemment été sabotés.

Photo : Marine nationale

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]