La France aurait proposé de fournir quatre sous-marins à l’Australie

Il y a exactement un an, l’Australie, par la voie de son Premier ministre, qui était alors Scott Morrison, fit part de son intention de se procurer des sous-marins nucléaires d’attaque [SNA] dans le cadre de son alliance avec les États-Unis et le Royaume-Uni [AUKUS]. Ce qui allait provoquer une grave crise diplomatique avec Paris étant donné que cette décision impliquait l’annulation d’un contrat portant sur la livraison de douze sous-marins Shortfin Barracuda [à propulsion classique] par Naval Group à la Royal Australian Navy [RAN].

Seulement, et alors que les tensions s’accumulent dans la région Indo-Pacifique, l’Australie, qui n’a pas d’industrie nucléaire, ne devrait pas disposer de SNA d’ici 2040… Et les six sous-marins de la classe Collins que la RAN met actuellement mis en oeuvre seront arrivés au bout de leur potentiel bien avant cette échéance. D’où le risque d’une rupture capacitaire majeure dans les années à venir.

Cela étant, la donne politique a depuis changé à Canberra, à l’issue des élections législatives de mai dernier. Pour le moment, le nouveau Premier ministre, Anthony Albanese, n’a pas remis en cause le projet de son prédécesseur. D’ailleurs, un accord a récemment été conclu avec le Royaume-Uni afin de permettre aux sous-mariniens australiens de se former et de s’entraîner à bord des SNA de la Royal Navy [classe Astute].

En outre, le choix du modèle de sous-marin nucléaire qui équipera la RAN devrait être annoncé par Richard Marles, le ministre australien de la Défense, durant le premier trimestre 2023. Et cela alors que l’industrie navale américaine peine à livrer les SNA commandés par l’US Navy… Et que, au Royaume-Uni, la construction des Astute prendra fin après la livraison du septième exemplaire attendu par la Royal Navy, la priorité de Londres devant ensuite aller vers le programme de sous-marins nucléaires lanceurs d’engins [SNLE] « Dreadnought ».

Quoi qu’il en soit, le premier souci de M. Marles est d’éviter une rupture capacitaire à la RAN. Ce qui pourrait passer par la modernisation des six sous-marins Collins dans le cadre du programme LOTE [Life-of-Type Extension], lequel avait été annoncé par Peter Dutton, son prédécesseur. Et il serait question de les modifier pour qu’ils puissent emporter des missiles de croisière Tomahawk.

Cependant, et devant l’incertitude concernant les SNA devant être acquis via l’alliance AUKUS, Canberra pourrait examiner d’autres options, comme le choix d’un nouveau modèle de sous-marin à propulsion classique.

Le suédois Saab, qui a conçu les Collins, regarde le dossier de près, comme l’a confirmé son Pdg, Micael Johansson, en juillet. Selon lui, il s’agirait de combler l’écart entre la fin de vie des Collins et l’arrivée potentielle des SNA. La Corée du Sud, qui a renforcé ses liens militaires avec l’Australie, se tient en embuscade, assurant que son industrie serait en mesure de construire des sous-marins d’attaque à propulsion classique de type Dosan Ahn Chang-ho [ou KSS-III] pour la RAN en sept ans.

Et les Français ne seraient pas en reste. Depuis qu’il est Premier ministre, M. Albanese s’attache à renouer les liens avec la France. L’une de ses premières décisions aura ainsi été d’indemniser Naval Group, à hauteur de 555 millions d’euros, pour l’annulation du contrat des sous-marin décidée par son prédécesseur. Et le réchauffement des relations franco-australienne s’est concrétisé en juillet, après sa rencontre avec le président Macron. À cette occasion, il a en effet été décidé de remettre les compteurs à zéro et de repartir sur de nouvelles bases.

Selon le quotidien « Le Figaro », M. Macron en aurait même profité pour proposer de fournir quatre sous-marins à l’Australie. Ceux-ci seraient construits à Cherbourg [et non à Adelaïde, comme cela devait être le cas pour les douze Shortfin Barracuda].

« L’Australie a un besoin et il est normal que la France essaie de saisir cette opportunité. Nous avons des compétences, des savoir-faire de haute qualité. Ce n’est pas pour rien qu’on avait signé ce contrat avec l’Australie », a commenté la députée Anne Ginetet, élue de la onzième circonscription des Français établis hors de France [Asie, Océanie et Europe orientale] et secrétaire de la commission de la Défense nationale, dans les colonnes du Figaro.

Cette proposition faite par M. Macron à M. Albanese a été évoquée pour la première fois par l’Australian Financial Review, c’est à dire le plus important quotidien économique d’Australie, en août dernier. Cependant, celui-ci mis en doute sa sincérité.

En effet, citant l’une de ses sources, le journal a écrit que M. Macron fait cette offre sur le ton de celui « n’a rien à perdre » à la proposer. Et d’ajouter : « M. Albanese a dit ‘merci’ tout en restant évasif. Les dirigeants de Naval Group ne l’ont pas prise au sérieux ».

Qu’en est-il vraiment, sachant que, par ailleurs, Naval Group est déjà occupé à construire les SNA de la classe Suffren à Cherbourg, tout en préparant le programme de SNLE de 3e génération?

En tout cas, lors de la réception, à Brest, de Richard Marles, début septembre, le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, a parlé de recréer une « intimité opérationnelle » avec l’Australie. « Il est clair que la base industrielle [de défense] française est à la disposition du gouvernement australien, parce que nous avons des produits dont nous pensons qu’ils peuvent intéresser vos armées et nous avons l’humilité de considérer que vous avez des produits qui peuvent intéresser notre armée », a-t-il même dit à cette occasion.

En attendant, on devrait probablement en savoir plus en novembre, si M. Macron confirme le voyage officiel qu’il a prévu de faire en Australie.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]