L’Allemagne se verrait bien prendre la main sur un bouclier antimissile à vocation européenne

En mars, en réaction à l’invasion de l’Ukraine par la Russie et après avoir annoncé la création prochaine d’un fonds de 100 milliards d’euros afin de « réparer » les capacités de ses forces armées [Bundeswehr], le gouvernement allemand avait confirmé son intention de doter l’Allemagne de son propre bouclier anti-missile.

« C’est l’une des questions dont nous discutons, et pour une bonne raison. […] Nous devons être conscients que nous avons un voisin qui est disposé à recourir à la violence pour faire valoir ses intérêts », avait en effet déclaré Olaf Scholz, le chancelier allemand, alors qu’il était interrogé sur cette éventuelle défense antimissile lors d’un entretien télévisé.

Plus tard, le Jerusalem Post affirma que Berlin avait reçu l’autorisation d’acquérir le système Arrow-3 qui, développé par Isreael Aerospace Industries [IAI] et Boeing, constitue la troisième couche de défense antimissile israélienne, les deux premières étant composées de l’Iron Dome [pour les projectiles de courte portée] et du « David’s Sling » [Fronde de David] pour les missiles de portée intermédiaire.

Depuis, et même si, en juin, l’Allemagne fait partie du projet européen EU HYDEF [European Hypersonic Defence Interceptor] dont la coordination a été confiée par le Commission européenne au groupe espagnol SENER Aeroespacial, dans le but de mettre au point un « démonstrateur d’intercepteur européen endoatmosphérique pour contrer les menaces post 2035 » [et donc les armes hypersoniques], l’idée d’installer un bouclier antimissile censé protéger l’ensemble du territoire allemand n’a plus été évoquée publiquement.

Du moins était-ce vrai jusqu’au 29 août. Lors d’un discours prononcé à l’Université Charles de Prague, M. Scholz n’a pas seulement livré sa vision de l’avenir de l’Union européenne [36 membres, contre 27 actuellement, fin du droit de veto en matière de politique étrangère, etc] ou dit souhaiter que l’Allemagne ait une « responsabilité particulière » dans l’aide militaire apportée à l’Ukraine. Il a également évoqué la « défense contre les menaces aériennes et spatiales »… et annoncé un effort significatif de Berlin dans ce domaine.

« En Europe, nous avons beaucoup de retard à rattraper en matière de défense contre les menaces aériennes et spatiales. C’est pourquoi, en Allemagne, nous allons investir massivement dans notre défense aérienne dans les années à venir », a en effet déclaré le chancelier Scholz. « Toutes ces capacité seront utilisables dans le cadre de l’Otan », qui « demeure le garant de notre sécurité », a-t-il dit.

Cela étant, a poursuivi M. Scholz, « dans le même temps, l’Allemagne concevra dès le départ cette future défense aérienne de manière à ce que nos voisins européens puissent également y participer s’ils le souhaitent », citant la Pologne, les Pays-Bas, la République tchèque, la Slovaquie et « nos partenaires scandinaves ».

« Un système de défense aérienne bâtit conjointement en Europe serait non seulement moins cher et plus efficace que si chacun de nous construisait sa propre défense aérienne. […] Ce serait un gain de sécurité pour toute l’Europe et un excellent exemple de ce que nous voulons dire lorsque nous parlons de renforcer le pilier européen de l’OTAN », a conclu le chef du gouvernement allemand.

L’Allemagne et les Pays-Bas font déjà cause commune en matière de défense aérienne, la Flugabwehrraketengruppe 61 de la Luftwaffe [force aérienne allemande] étant passée sous l’autorité du commandement néerlandais assurant la défense aérienne en avril 2018. D’ailleurs, dans le cadre de l’Otan, les deux pays ont déployés des batteries Patriot en Slovaquie.

Reste à voir quelle forme aura cette défense aérienne [et antimissile] allemande… Pour son premier niveau, elle pourrait s’appuyer sur le système IRIS-T SLM, conçu par Diehl Defence. L’interception de missiles balistiques lors de leur phase exo-atmosphérique reviendrait donc à l’Arrow-3, si Berlin confirme son intention de s’en procurer. Enfin, s’agissant de la couche « intermédiaire », le programme Taktisches Luftverteidigungssystem [TLVS], qui devait reposer sur le système MEADS [Multinational Extended Air Defense System], a été mis de côté, la modernisation des batteries Patriot de la Bundeswehr ayant finalement été privilégiée.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]