Bamako accuse un groupe jihadiste affilié à al-Qaïda d’avoir commis un massacre dans le centre du Mali

Alors que l’État islamique au grand Sahara [EIGS] multiplie les attaques et les exactions contre les civils dans la région dite des trois frontières, la Katiba Macina, une autre formation jihadiste associée au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans [GSIM ou JNIM, affilié à al-Qaïda] est accusé par les autorités maliennes d’avoir tué au moins 132 personnes dans les environs de la localité de Diallassagou [cercle de Bankass, région de Mopti] entre les 18 et 19 juin. Le chef de la junte au pouvoir, le colonel Assimi Goïta, a décrété un deuil national de trois jours.

Selon les témoignages recueillis par l’AFP et RFI, les assaillants, à moto, ont surgi dans plusieurs villages des environs, dont ceux de Diamweli, de Dessagou et de Ségué, où ils ont été repoussés par des chasseurs traditionnels Dozos. Mais, ayant incendié un marché, des boutiques et des habitations sur leur passage, ils ont emporté du bétail et, surtout, emmené des hommes. Plus d’une centaine en tout.

D’après un responsable politique local, Nouhoum Togo, le secteur avait été le théâtre d’une opération anti-terroriste menée deux semaines plus tôt par les Forces armées maliennes [FAMa]. Selon lui, les jihadistes seraient revenus sur les lieux pour se venger sur la population. « Ils sont arrivés et ont dit aux gens :  »vous n’êtes pas des musulmans » en langue peul. Alors ils ont emmené les hommes, une centaine de personnes sont parties avec eux. À deux kilomètres de là, ils ont abattu les gens systématiquement », a-t-il témoigné auprès de l’AFP. « Aujourd’hui encore, on a continué à ramasser les corps dans les communes environnantes de Diallassagou », a-t-il ajouté.

« On a perdu des proches, des grands frères, des tontons, du matériel [a été] détruit, des animaux emportés, des habits, tout. […] Il ne reste rien de Diallassagou. Diallassagou, la commune la plus riche du cercle de Bankass », a rapporté un élu cité par l’AFP.

D’après RFI, un accord de paix intercommunautaire avait été conclu en février 2021 à Diallassagou, comme cela fut d’ailleurs aussi le cas à Niono, dans la région de Ségou, entre la katina Macina et les chasseurs Dozos, ceux-ci ayant accepté le port du voile obligatoire pour les femmes et la perception de la zakat [impôt islamique] en échange de leur liberté de circuler. Or, l’opération menée par les FAMa, accompagnées par les paramilitaires russes de Wagner, il y a dizaine de jours, aurait visé plus particulièrement la communauté Peule, qui entretient des relations conflictuelles avec les Dogons, qui l’accusent d’être de mèche avec la Katiba Macina, dirigée par le précidateur [peul] Amadou Kouffa.

Ainsi, en mars 2019, l’attaque du village peul d’Ogossagou, située dans le cercle de Bankass, fit plus de 150 tués parmi les habitants. La responsabilité de ce massacre avait été attribuée à la milice dogon Dan Na Ambassagou.

Quoi qu’il en soit, explique RFI, qui s’appuie sur les affirmations de responsables locaux, la Katiba Macina a accusé les habitants des environs de Diallassagou d’avoir rompu l’accord de février 2021 et, surtout, d’avoir aidé les FAMa lors de l’opération que celles-ci ont récemment menée dans le secteur.

Cela étant, en octobre 2021, la junte malienne avait mandaté le Haut Conseil Islamique [HCI] du pays pour mener des négociations avec le GSIM, dirigé par Iyad Ag Ghaly, et… la Katiba Macina, avec l’objectif de trouver un « compromis, entre Maliens, pour que la guerre cesse », avait expliqué Moufa Haidara, chargé de ces discussisons au sein du HCI.

« Cela fait des années que le peuple malien appelle à des discussions avec ces groupes […] En Afghanistan, les Américains ont bien fini par discuter avec les talibans », avait par ailleurs justifié Choguel Kokalla Maïga, le Premier ministre malien.

Photo : Amadou Kouffa, le chef de la Katiba Macina

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