Le budget des Armées amputé de 346 millions d’euros… pour le moment

Allemagne, Belgique, Espagne, Estonie, Italie, Pologne… En réaction à l’invasion de l’Est de l’Ukraine par la Russie, ces pays [et d’autres] ont en commun d’avoir tous annoncé des hausses significatives de leurs dépenses militaires pour les porter – parfois -au-delà des 2% de leur PIB au plus vite. « Nécessité fait loi », dit-on…

Avec un budget de la Défense annoncé à 40,9 milliards d’euros en 2022, la France se tient pour le moment à l’écart de ce mouvement, campagne présidentielle oblige…

Parmi les principaux candidats, ayant ressorti le programme qui était le sien il y a cinq ans, Emmanuel Macron entend porter les dépenses militaires à 50 milliards d’euros d’ici 2025. Un objectif peu ou prou partagé par Marine Le Pen, dont le programme parle de doter les armées d’une enveloppe de 55 milliards d’euros à l’horizon 2027.

Plus ambitieux, Éric Zemmour propose d’augmenter le budget de la Défense jusqu’à 70 milliards d’euros en 2030, afin de financer un effort particulier pour la Marine nationale [20 frégates, 8 sous-marins nucléaires d’attaque et 2 porte-avions] et l’aviation de combat [avec un format à 300 avions de chasse].

La candidate des Républicains, Valérie Pécresse, va encore plus loin en estimant qu’un investissement d’un montant supérieur à 100 milliards d’euros sera nécessaire pour une « défense souveraine », reposant « à la fois sur une vision de long-terme et sur un effort capacitaire à court-terme permettant de réarmer et de rééquiper nos forces armées ». Enfin, Jean-Luc Mélenchon n’avance aucun chiffre, si ce n’est que la Loi de programmation militaire qu’il proposera ne sera « pas déterminée a priori par un simple objectif financier [2 % du produit intérieur brut] » mais qu’elle « sera fondée sur une analyse fine des besoins et un projet clairement articulé ».

En attendant le verdict des urnes, le ministère des Armées sera mis à contribution pour financer une partie du « plan résilience », que le Premier ministre, Jean Castex, a dévoilé le 12 mars.

Celui-ci, d’un montant de 5,95 milliards d’euros, vise à amortir le choc économique provoqué par l’invasion de l’Ukraine, via notamment une remise sur les caburants de l’ordre de 15 à 18 centimes par litre [pour trois milliards] et des aides « ciblées » aux entreprises et aux activités [agriculture, pêche, transports, BTP] mises en difficulté en raison de la hausse du coût de l’énergie, pour 1,5 milliard d’euros. Enfin, une enveloppe de 400 millions d’euros servira à l’accueil des réfugiés ukrainiens [dont 100’000 sont attendus].

Étant donné que les travaux du Parlement sont suspendus en raison des élections à venir, le gouvernement a pris un « décret d’avance », lequel permet l’ouverture de crédits en cas d’urgence [dans la limite de 1% de ceux ouverts en loi de finances initiale, ndlr], à la condition qu’ils soient gagées par des recettes supplémentaires [dans le meilleur des cas] ou des annulations de crédit.

Tous les ministères étant mis à contribution, celui des Armées devra se passer de 346 millions d’euros. Ce qui peut sembler suprenant au regard du contexte international et des annonces faites par de nombreux pays européens au sujet de leurs dépenses militaires. De quoi y voir un mauvais signal…

Cela étant, pour le porte-parole du ministère des Armées, Hervé Grandjean, il n’a pas matière à polémiquer. « Ces crédits seront rendus lors de la prochaine loi de finances rectificative, prévue en juillet prochain » et cette « annulation n’impacte pas les investissements prévus […] puisque nous n’aurions pas pu dépenser cet argent avant novembre 2022 », a-t-il expliqué. « Nous le récupérerons en juillet 2022 », a-t-il insisté.

« En résumé, cet ajustement budgétaire est : en raison de l’urgence de la situation liée à la guerre en Ukraine, temporaire et sans impact sur nos opérations et nos investissements », a conclu M. Grandjean.

Cependant, nul ne connaît la couleur de la future majorité qui siégera à l’Assemblée nationale à partir de juillet prochain… Et ce sera un autre gouvernement qui sera aux manettes. Que décidera-t-il?

Par ailleurs, il ne faudrait pas non plus que le prix des carburants se maintiennent à des prix aussi élevés pendant trop longtemps. Ce cas de figure est prévu par l’article 5 de la LPM 2019-25. « En cas de hausse du prix constaté des carburants opérationnels, la mission ‘Défense’ bénéficiera de mesures financières de gestion et, si la hausse est durable, des crédits supplémentaires seront ouverts en construction budgétaire, pour couvrir les volumes nécessaires à la préparation et à l’activité opérationnelle des forces », précise-t-il.

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