Un bombardier russe Tu-22 « Backfire » tenu à l’oeil par les Rafale du porte-avions Charles de Gaulle

Selon un rapport parlementaire publié la semaine passée, la présence militaire russe pose désormais un « défi » aux forces françaises, dans la mesure où celle-ci se traduit par la mise en place, en Syrie notamment, de capacités de déni et d’interdiction d’accès [A2/AD] et le déploiement – ponctuel – de bombardiers susceptibles d’emporter des missiles anti-navires.

Si, par le passé, les « interactions » entre les forces françaises et russes font rarement l’objet d’une communication particulière [si ce n’est dans le cadre d’auditions parlementaires… et encore, du bout des lèvres], ce n’est plus le cas actuellement. Du moins, depuis que les tensions diplomatiques et militaires avec la Russie vont crescendo.

En effet, l’État-major des armées [EMA] a récemment communiqué au sujet de la surveillance de plusieurs navires russes naviguant au large des approches maritimes françaises. Et de diffuser, via les réseaux sociaux, le contenu des échanges par radio ainsi que des images. Par exemple, début février, il a évoqué le suivi du « Vasiliy Tatishchev », un bâtiment russe dédié à la collecte de renseignement d’origine électromagnétique, tout en précisant les moyens engagés pour cela.

En cette période où les tensions sont vives avec la Russie, chaque communication de l’EMA est aussi un message adressé aux forces russes.

Ainsi, ces deux derniers jours, et alors que le groupe aéronaval formé autour du porte-avions Charles de Gaulle [GAN ou TF473] est actuellement déployé en Méditerranée orientale au titre de l’opération Chammal, l’EMA a tenu à faire savoir que les avions militaires russes évoluant à proximité de la formation française sont étroitement surveillés, depuis leur décollage de la base aérienne de Hmeimim [Syrie].

Le 19 février, l’EMA a publié quatre photographies, dont deux en noir et blanc [et d’une qualité dégradée]. Sur celles-ci, on distingue deux Su-30/35 escortant un bombardier stratégique russe Tu-22M « Backfire », capable d’emporter le missile antinavire Kh-22. Il s’agit de l’un des deux appareils de ce type récemment arrivés à Hmeimim, pour participer à des manoeuvres navales, aux côtés d’un MiG-31K, porteur de l’arme hypersonique Kinjal.

« Au cours des derniers jours, interactions du ‘French CSG’ [Carrier Strike Group – groupe aéronaval en français] déployé en MEDOR [Méditerranée orientale] pour Chammal, avec des aéronefs russes, qui ont été détectés dès leur décollage de Lattaquié puis suivis en permanence par les unités du ‘French CSG' », a précisé l’EMA.

En clair, il s’est agi de rappeler aux forces aériennes russes que les moyens du GAN lui permettent de surveiller tous leurs mouvements. Pour cela, le Charles de Gaulle est doté du système ARTEMIS, qui repose notamment sur le radar SMART-S, ainsi que des radars DRBV-26D [veille air lointaine en bande D, avec portée de 500 km] et Arabel. En outre, ces moyens sont complétés par deux avions de guet aérien E-2C Hawkeye, un appareil capable de suivre plus de 2000 pistes évoluant dans un rayon de 250 nautiques.

Quant aux deux autres photographies, l’une est une vue aérienne du porte-avions Charles de Gaulle, l’autre montre le « destroyer » américain USS Ross [DDG 71], lequel est intégré au GAN. Probablement que l’objectif a été de faire passer un message d’unité aux forces russes, c’est à dire que Français et Américains sont sur la même ligne [du moins, telle est l’interprétation que l’on peut en faire]. Si l’idée était d’illustrer les moyens complémentaires de défense aérienne dont le GAN dispose, une image de la frégate de défense aérienne [FDA] Forbin ou de la frégate multimissions à capacités de défense aérienne reforcées [FREMM-DA] aurait pu faire l’affaire…

Le lendemain, l’EMA a publié une vidéo montrant cette fois au moins un Rafale Marine en train de suivre deux Su-30/35 et un avion de patrouille maritime et de lutte anti-sous-marine Il-38

« Le 18/02, des Rafale, en mission de protection » du groupe aéronaval déployé dans l’opération Chammal, ont escorté deux Su-30/35 et un Il-38 russes qui évoluaient à proximité des untés françaises et alliée. Interaction professionnelle », a sobrement commenté l’État-major français.

L’an passé, les renseignements en source ouverte avaient permis de déterminer qu’une frégate russe appartenant à la classe Amiral Grigorovich avait réussi à s’intercaler entre le porte-avions Charles de Gaulle et la FDA [FDA] Chevalier Paul. Ce qui n’avait pas suscité de commentaire particulier de la part de l’EMA, à l’époque.

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