Déployé à Kaliningrad, le missile hypersonique russe Kinjal a la plupart des capitales européennes à sa portée

Au lendemain de son entretien avec son homologue russe, Vladimir Poutine, le président Macron a assuré avoir obtenu de Moscou qu’il n’y aurait « pas de dégradation et d’escalade » dans la crise ukrainienne, qui, par ailleurs, sert de levier à la Russie pour obtenir des garanties sur sa sécurité auprès des États-Unis et de l’Otan.

Sauf que, le même jour [soit le 8 février], une vidéo montrant l’arrivée dans l’enclave de Kaliningrad d’un chasseur MiG-31K, porteur du missile hypersonique Kh-47M2 Kinjal, a été diffusée sur les réseaux sociaux. Ce qui est inhabituel, cet appareil étant notamment en oeuvre par deux unités de l’aviation navale russe, l’une étant basée à Monchegorsk [Flotte du Nord], l’autre à Yelizovo [Flotte du Pacifique].

Le nombre de MiG-31 désormais présents sur la base aérienne de Chkalovsk [laquelle abrite des chasseurs Su-27 « Flanker » et des bombardiers tactiques Su-24 « Fencer » de la Flotte de la Baltique, ndlr] n’est pas connu. Cela étant, des informations non confirmées évoquent le déploiement de deux à quatre appareils.

Pour rappel, le Kh-47M2 Kinjal est un missile aérobalistique dérivé du système Iskander. Il fait partie des six « armes stratégiques » que le président Poutine avait dévoilées en mars 2018. D’une portée estimée à 2000 km, cet engin peut être doté d’une ogive à fragmentation de 500 kg ou d’une ogive nucléaire. Il est capable de voler à la vitesse de Mach 10, ce qui ne laisse que très peu de temps aux défenses aériennes pour réagir.

Pour l’aviation navale russe, le couple MiG-31K/Kinjal lui redonne une capacité de frappe anti-navire à longue distance. Capacité qu’elle avait perdue avec le transfert des bombardiers Tu-22M3 aux forces aérospatiales [VKS]. Aussi, on peut imaginer que ce déploiement à Kaliningrad est susceptible de viser les navires envoyés par l’Otan dans la région de la Baltique. Cela étant, l’utilisation d’une telle arme, produite en quantité limitée, ne serait pertinente que contre un objectif de grande valeur. Comme un groupe aéronaval, par exemple.

D’ailleurs, deux MiG-31K avaient été envoyés à base aérienne de Hmeimim, en Syrie, alors que le porte-avions britannique HMS Queel Elizabeth venait d’arriver en Méditerranée orientale, en juin 2021. Probablement qu’il y avait une part de « communication » dans ce déploiement… Comme ça peut l’être aussi dans le cas de Kaliningrad, l’objectif de Moscou étant d’envoyer un signal à l’Otan.

D’autant plus que, de par ses performances, le Kinjal a la quasi-totalité des capitales européennes [à l’exception de Madrid, Lisbonne, Dublin et Reikjavik] à sa portée s’il est lancé depuis Kaliningrad, qui abrite également des missiles balistiques Iskander [d’une portée de 50-500 km, ndlr]. Capitales qu’il peut atteindre dans les 7 à 10 minutes.

L’objectif de Moscou avec ce déploiement ostensible de MiG-31K sur le territoire de Kaliningrad [coincé entre la Pologne et la Lituanie, ndlr] viserait donc à dissuader l’Otan d’intervenir contre une éventuelle action militaire russe en Ukraine. En outre, les importantes forces russes actuellement présentes en Biélorussie [à des fins d’exercice] pourraient s’emparer de l’étroit passage de Suwalki, qui relie les trois pays baltes au reste de l’Union européenne [et de l’Otan].

À noter que, le 29 janvier dernier, un MiG-31K du 929e Centre d’essais en vol de Chkalova a manqué son décollage alors qu’il se trouvait sur la base aérienne de Soltsy [oblast de Novgorod], c’est à dire à coup d’ailes des trois pays baltes.

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