Les opérations au Sahel ne sont « pas la quintessence de ce que l’armée de Terre doit être capable de faire »

En juin 2021, le président Macron a annoncé une réorganisation du dispositif militaire français au Sahel, l’accent devant alors être mis sur la formation et l’accompagnement des forces armées locales ainsi que sur les capacités que celles-ci ne disposent pas, en particulier dans les domaines de l’appui aérien et du renseignement.

« L’état final recherché, c’est de réduire nos emprises, de réduire la logique opération extérieure, de garder un pilier de lutte contre le terrorisme avec des forces spéciales et un pilier de coopération avec nos partenaires, nous avons déjà des structures existantes que nous allons compléter », avait expliqué M. Macron.

Depuis cette annonce, la force Barkhane a rétrocédé aux Forces armées maliennes [FAMa] les emprises de Kidal, de Tessalit et de Tombouctou [où, par ailleurs, des « formateurs militaires » russes n’auront pas tardé à s’y installer]. L’une des conséquences de cette réorganisation, qui pourrait aller encore plus loin au regard des tensions actuelles entre Paris et Bamako, sera la baisse des effectifs engagés au Sahel, ceux-ci devant passer de 5000 à 2500/3000 d’ici 2023. Du moins selon les plans initiaux.

Pour le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT], le général Pierre Schill, un tel mouvement lui permettra d’avoir les coudées franches pour d’autres missions, notamment sur le flanc oriental de l’Otan, où les tensions avec la Russie demeurent vives. D’ailleurs, lors de ses voeux aux Armées, le 19 janvier, M. Macron a fait savoir que la France était disponible pour prendre part une mission de type eFP [présence avancée réhaussée] en Roumanie, avec le statut de nation-cadre.

Ce que la ministre des Armées, Florence Parly, a confirmé sur les ondes de France Inter, le 29 janvier. « La France est prête, si l’Otan le décidait, à déployer des éléments militaires en Roumanie, pays frontalier de l’Ukraine » pour contribuer à la « réassurance » de ce pays, a-t-elle dit, alors qu’elle revenait justement d’un déplacement à Bucarest. Évoquant le déploiement éventuel de « plusieurs centaines » de militaires, elle a fait valoir que « nous sommes prêts à défendre les pays qui se trouvent au plus près de cette zone de tension ».

Et le désengagement partiel du Mali vient à point nommé. « La réduction des capacités au Sahel donne la possibilité de réengager des forces éventuellement sur d’autres théâtres », a en effet affirmé le général Schill, lors d’une rencontre avec l’Association des journalistes de défense [AJD], selon des propos rapportés par l’AFP. Et elle permettra aussi, a-t-il noté, de « retrouver un rythme opérationnel plus normal ».

« Notre armée de Terre est très engagée. On a environ 140 jours par an hors du domicile en moyenne. J’estime que c’est un peu trop élevé, un niveau à 120 jours serait bon », a développé le CEMAT. D’autant plus que, a-t-il continué, s’il « est clair » que Barkhane a « été l’opération symbolique de notre armée de Terre au cours des dernières années », elle n’est cependant « pas la quintessence de ce que l’armée de Terre doit être capable de faire ».

Et pour le général Schill, il importe désormais que ses troupes soient « capables d’être éventuellement opposées à un adversaire qui serait à parité », dans un conflit dit de « haute intensité ». En clair, il faut qu’elles reviennent aux fondamentaux, comme le montrent les exercices menés tant sur le territoire national que, par exemple, dans les pays baltes où, récemment, le sous-groupement tactique interarmes [S/GTIA] Lynx a engagé ses chars Leclerc en Lettonie, pour une campagne de tir ayant alterné les phases offensives et défensives.

Photo : EMA

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