Le français Nexter « examine » des solutions pour éventuellement fournir 1770 chars à l’Inde

Le 28 décembre, la porte-parole du Service fédéral russe de coopération militaro-technique [FSVTS], Valerya Reshetnikova, a indiqué que Moscou avait proposé à New Delhi de développer un nouveau char à partir du T-14 Armata, dont vingt exemplaires devaient être livrés d’ici la fin de cette année aux forces russes.

Cette proposition a, a priori, était faite en réponse à une demande d’information lancée par le ministère indien de la Défense pour se procurer 1770 nouveaux chars, afin de remplacer les T-72M1 Ajeya actuellement en service au sein de l’Indian Army, laquelle met également en oeuvre 1025 T-90S ainsi que 122 « Arjun », de conception locale. Et cela, dans le cadre du programme FRCV [pour Future Ready Combat Vehicle], relancé en juin dernier.

Cela étant, le concepteur du T-14 Armata, Uralvagonzavod, n’est évidemment pas le seul à espérer décrocher ce marché potentiel. En effet, onze autres industriels ont été contactés par les autorités indiennes. Dont le français Nexter, pour le char Leclerc… qui n’est plus en production depuis les années 2000.

Pour autant, le Leclerc va encore évoluer dans les années à venir, 200 exemplaires de l’armée de Terre devant être portés au standard XLR par Nexter d’ici 2028. Dans le détail, cette vise à lui permettre de s’intégrer à un groupement tactique interarmes [GTIA] SCORPION en le dotant du Système d’information du combat Scorpion [SIC-S] et de la radio CONTACT. Il est aussi question d’améliorer sa protection contre les nouvelles menaces, avec des brouilleurs et un tourelleau téléopéré ainsi que de traiter les obsolescences, notamment au niveau de ses calculateurs et de sa conduite de tir.

Seulement, en ces temps où l’on ne parle quasiment plus que d’engagement de « haute intensité », disposer de seulement 200 chars en dotation peut sembler léger… En relancer la production serait possible, comme l’avait assuré une source du ministère des Armées en 2016, alors qu’il était rapporté que l’Arabie Saoudite envisageait de commander « plusieurs centaines » de Leclerc.

D’où la question posée par écrit au ministère des Armées par le député Nicolas Dupont-Aignan. Ainsi, évoquant le projet FRCV indien, le parlementaire avait estimé que si Nexter remportait ce marché, alors il serait envisageable de « remettre en fonction des lignes d’assemblage » du char Leclerc en France et en Inde, ce qui rendrait le « prix d’acquisition de ce char particulièrement compétitif, tant pour les armées indiennes et françaises qu’à l’export ».

Et cela d’autant plus, avait-il ajouté, que les « besoins à court et moyen matière de la France sont d’au moins 400 chars de combat venant s’ajouter aux besoins indiens, le tout en mutualisant avec l’Inde le coût de développement des versions spécialisées dans le commandement, le génie, l’artillerie mobile et la défense anti-aérienne dont l’armée de Terre française a besoin et qui lui fait cruellement défaut ». Aussi, M. Dupont-Aignan a demandé s’il était question « d’engager une réflexion avec l’Inde afin de lancer une production commune du char de combat AMX Leclerc et de ses dérivés » ou de l’Euro Main Battle Tank, proposé par KNDS, la co-entreprise formée par Nexter et l’allemand Krauss Maffei Wegmann.

Théoriquement, l’idée du député peut sembler séduisante. Mais en pratique, c’est une toute autre histoire, comme l’a souligné le ministère des Armées dans sa réponse. S’il reconnaît que les « perspectives stratégiques » avec l’Inde sont « prometteuses », il a également souligné que les procédures indiennes en matière d’armement sont « souvent longues et complexes ». Au point de prendre plusieurs années…

En outre, le projet d’acquérir 1770 « chars du futur » n’en est qu’au stade de la demande d’informations.. Et il sera réalisé sous la procédure « Partenaire stratégique », c’est à dire que, comme l’a expliqué le ministère des Armées, elle « implique un titulaire indien pour le contrat, en principe privé, et un transfert de technologies, ce qui amènera in fine à produire les systèmes localement, en Inde ».

Cela étant, New Delhi espère pouvoir commencer à remplacer les T-72 de l’Indian Army à partir de 2030. Et comme nécessité faisant souvent loi, il est possible que ce projet aboutisse assez rapidement… En tout cas, a indiqué le ministère des Armées, « avec son partenaire Krauss Maffei Wegmann au sein du groupe KNDS, Nexter analyse les solutions possibles afin de répondre aux exigences indiennes et prépare la meilleure réponse que KNDS pourra apporter à cette demande ».

Et d’ajouter : « Dès lors qu’un soutien politique apparaîtra nécessaire, le ministère des Armées, dans le cadre de notre partenariat avec l’Inde, soutiendra la proposition industrielle dans ses démarches et s’assurera des synergies éventuelles pouvant exister entre le besoin des armées indiennes et nos besoins nationaux ».

Par ailleurs, si l’on s’en tient au calendrier du programme FRCV, le char de combat franco-allemand du futur [MGCS – Main Ground Combat System] serait hors-jeu… étant donné qu’il doit se concrétiser à l’horizon 2035 et qu’il implique un troisième acteur, à savoir Rheinmetall. Qui plus est, faute d’accord entre les industriels concernés, ce projet est actuellement enlisé.

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