Peu avant la fin de l’ère Merkel, Berlin a autorisé des ventes d’armes à l’Égypte pour plus de 4 milliards d’euros

Ces dernières années, des industriels français de l’armement ont connu des difficultés pour honorer des commandes passées par des pays des Moyen-Orient car leurs produits contenaient des composants allemands. C’est ce qui est par exemple arrivé à Arquus, l’Allemagne ayant bloqué, malgré les accords Debré-Schmidt de 1971 et 1972, la livraison de véhicules blindés destinés à l’Arabie Saoudite, alors sous le coup d’un embargo sur les équipemements militaires qu’elle avait décrété après l’affaire Kashoggi [du nom de ce journaliste assassiné en Turquie, ndlr].

Cet embargo a depuis été prolongé d’un an supplémentaire – et même renforcé – en décembre 2020. Et il devrait l’être de nouveau prochainement… Du moins logiquement, étant donné la politique très restrictive qu’entend mettre en oeuvre la coalition « tricolore » du chancelier [social-démocrate] Olaf Scholz en matière de ventes d’équipements militaires.

En effet, l’accord de gouvernement conclu par le SPD [parti social-démocrates], les Verts et les libéraux du FDP, parle de « règles plus contraignantes » et de « convenir » avec les autres pays de l’Union européenne [UE] d’un « règlement européen correspondant en matière d’exportation d’armements ».

En clair, il s’agit pour Berlin de poser la question du respect des droits de l’Homme avant d’accorder tout licence d’exportation d’équipements militaires. C’est d’ailleurs sous cet angle que certaines organisations non gouvernementales critiquent les contrats d’armements obtenus par la France auprès de l’Égypte. Mais elles se font nettement plus discrètes quand… l’Allemagne en fait autant.

Ainsi, alors que la chancelière Angela Merkel s’apprêtait à passer la main, le gouvernement allemand a autorisé près de cinq milliards d’euros de ventes d’équipements militaires… en particulier à l’Égypte, dont de 3 frégates [vraisembablement de type Meko 200] et de 16 systèmes de défense aérienne produits par Diehl Defence. Selon la presse d’outre-Rhin, l’ex-ministre de l’Économie, Peter Altmaier, en a informé le Bundestag [chambre basse du Parlement] seulement un jour avant qu’Olaf Scholz ne devienne le nouveau chancelier.

Au total, le montant des licences d’exportation accordées par Berlin en 2021 s’élève à plus de 9 milliards d’euros. Un niveau qui n’avait jamais été atteint par l’industrie allemande de l’armement. Et l’Égypte en représente près de la moitié. D’où la polémique…

Ainsi, il est reproché au gouvervement de Mme Merkel d’avoir pris des décisions importantes en matière de ventes d’armes alors qu’il était censé gérer les affaires courantes après les élections fédérales de septembre dernier. En outre, M. Scholz n’échappe pas aux critiques car, en tant que ministre des Finances dans la précédente coalition, il a forcément pris part aux délibérations du Conseil fédéral de sécurité, chargé justement d’accorder – ou non – de telles licences d’exportation.

En tout cas, un tel épisode ne devrait – théoriquement – plus se reproduire durant au moins les quatre prochaines années, le ministère de l’Économie [et de la Protection du climat], chargé du contrôle des exportations d’armes, étant désormais tenu par l’écologiste Robert Habeck, qui est également vice-chancelier.

Photo : Frégate de type Meko 200 – Luis Díaz-Bedia Astor – , CC BY-SA 3.0

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