Les États-Unis prêts à fournir les catapultes EMALS du futur porte-avions français pour 1,2 milliard d’euros

Le 8 décembre 2020, lors d’une visite au site de Framatome au Creusot, le président Macron confirma que le porte-avions de nouvelle génération [PA NG] serait doté d’une propulsion nucléaire reposant sur deux chaufferies K22 développant une puissance de 220 à 230 mégawatts.

Au-delà des considérations industrielles, comme la nécessité de maintenir les compétences pour la conception des futurs réacteurs devant équiper les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins de 3e générations [SNLE 3G], cette décision repose avant tout sur des impératifs opérationnels. Nettement plus imposant que l’actuel Charles de Gaulle avec son déplacement de 75’000 tonnes, le PA NG aura besoin de 50% d’énergie en plus pour naviguer à la vitesse de 27 noeuds… et mettre en oeuvre des catapultes électromagnétiques [EMALS – ElectroMagnetic Aircraft Launching System].

Mise au point par General Atomics pour la nouvelle classe de porte-avions « Gerald Ford » de la l’US Navy, la catapulte électromagnétique repose sur le principe de l’induction magnétique. En clair, des courants électriques générent un champ magnétique de part et d’autre d’un rail de catapultage, ce qui permet de mettre en mouvement un chariot mobile sur lequel est fixé l’aéronef. L’alimentation de ce moteur à induction linéaire est ajustée à la masse de l’appareil devant être lancé.

Par rapport à celles fonctionnant avec de la vapeur, les EMALS offrent plusieurs avantages. Ainsi, les contraintes physiques sur la cellule des aéronefs sont moindres, le rendement énergétique est optimisé, la maintenance et plus facile et les nuisances sonores sont atténuées. D’où leur choix pour le PA NG.

Aussi, quelques jours après que la Marine nationale et l’US Navy ont signé un « plan stratégique d’interopérabilité » pour les vingt prochaines années, la Defense Security Cooperation Agency [DSCA], l’agence chargée des exportations d’équipements militaires américains dans le cadre de la procédure dit des Foreign Military Sales [FMS], vient de rendre un avis pour recommander au Congrés d’accepter la vente potentielle à la France de deux catapultes EMALS ainsi qu’un dispositif AAG [Advanced Arresting Gear], dont le fonctionnement repose sur un moteur électrique à induction couplé à des turbines hydrauliques afin de mettre en oeuvre les brins d’arrêt que les aéronefs doivent accrocher pour apponter.

Selon l’avis de la DSCA, le montant de cette vente potentielle est estimée à 1,321 milliard de dollars [soit 1,17 milliard d’euros au taux de change actuel]. Cette somme comprend également le soutien technique ainsi que d’autres services. Selon l’US Navy, les catapultes EMALS et le dispositif AAG représentent environ 25% des coûts du porte-avions USS Gerald Ford [qui sont de 13,5 milliards de dollars, ndlr].

Cela étant, le montant indiqué par le DSCA n’est qu’une estimation. L’agence américaine a l’habitude de « saler » la note dans les avis qu’elle rend. Aussi, est-il probable les catapultes EMALS et le dispositif AAG soient vendus à un tarif moins élevé.

La « vente proposée soutiendra la politique étrangère et la sécurité nationale des États-Unis en contribuant à améliorer la sécurité d’un allié de l’Otan, qui constitue une force importante pour la stabilité politique et le progrès économique en Europe », fait valoir la DSCA. Et celle-ci de souligner qu’elle favorisera « l’interopérabilité » entre l’US Navy et la Marine nationale.

Par ailleurs, poursuit la DSCA, cette vente « nécessitera » l’envoi en France « d’environ 40 représentants du gouvernement améicain et des entrepreneurs pendant dix semaines par an au cours des années 2033-2038 pour soutenir l’installation du système [EMALS/AAG] à bord » du PA NG, sa mise en service, sa certification, les tests de compatibilité des aéronefs, la certification du poste de pilotage et les essais en mer ».

D’après le rapport du sénateur Dominique de Legge au sujet du projet de loi de finances 2022, des essais concernant cette technologie sont prévus en 2023-24 par la Marine nationale, avec des catapultages de Rafale depuis l’USS Gerald Ford. « Cette solution permet une plus grande interopérabilité entre alliés – notamment avec les États-Unis, mais pourrait également poser un problème d’autonomie stratégique en raison de sa conception américaine », a estimé le parlementaire, qui estime le coût du PA NG à 4,5 milliards d’euros sur dix ans. Ce qui « constitue un indéniable facteur de risque, puisqu’il représentera plus de 1 % du budget annuel des armées sur la fin de la Loi de programmation militaire », a-t-il écrit.

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