Tensions avec la Russie : L’Otan pourrait déployer des groupements tactiques multinationaux en Roumanie et en Bulgarie

Soupçonnée de se préparer à envahir l’Ukraine, la Russie a proposé aux Occidentaux, la semaine passée, de discuter de mesures censées garantir sa sécurité. Parmi celles-ci, Moscou demande l’arrêt de l’élargissement de l’Otan ainsi qu’un droit de regard sur tout renforcement militaire dans les pays qui n’était pas membre de l’Alliance avant 1997 [c’est à dire en Europe de l’Est].

Les États-Unis, par la voix de Jen Psaki, la porte-parole de la Maison Blanche, ont rapidement écarté de telles demandes, insistant sur le fait que « que tous les pays ont le droit de décider de leur propre avenir et de leur politique étrangère sans être soumis à une influence extérieure ».

Une position également défendue par Christine Lambrecht, la nouvelle ministre allemande de la Défense. « Nous devons résoudre cette situation tendue dans laquelle nous sommes actuellement, à la fois diplomatiquement et avec une dissuasion crédible. Nous devons nous parler, ce qui signifie discuter des propositions que la Russie a avancées. Cela est juste et important. […] Mais il n’est pas possible que la Russie impose ses vues aux partenaires de l’Otan », a-t-elle déclaré, le 19 décembre, alors qu’elle rendait visite aux troupes de la Bundeswehr déployée à Rukla, en Lituanie, dans le cadre de la Présence avancée réhaussée [eFP] de l’Alliance.

Pour rappel, mis en oeuvre en 2017, celle-ci repose sur la présence de quatre groupements tactiques multinationaux dans les trois pays baltes [Estonie, Lituanie, Lettonie] et en Pologne. La France y participe via la mission Lynx, avec un sous-groupement tactique interarmes [S/GTIA] fort de 300 militaires et, notamment, de deux pelotons de chars Leclerc et d’une section VBCI [Véhicule blindé de combat d’infanterie].

Cela étant, dans le même temps, l’Otan a également renforcé sa posture dans la région de la mer Noire, dans le cadre d’une « présence avancée adaptée ».

« L’élément terrestre de cette présence s’articule autour d’un quartier général de brigade multinationale situé à Craiova, en Roumanie. Il offre des possibilités de formation aux contingents nationaux de l’ensemble de l’Alliance. En mer, l’Otan a déployé des navires supplémentaires et effectue davantage d’exercices navals. Dans les airs, les Alliés ont intensifié leurs entraînements, ce qui a contribué à une meilleure connaissance de la situation et à une plus grande disponibilité opérationnelle », explique l’organisation.

Mais il se pourrait que ce dispositif évolue sur le même modèle que celui mis en place pour les pays baltes et la Pologne, si jamais la Russie décidait de passer à l’action contre l’Ukraine. C’est en effet ce qu’a indiqué l’hebdomaire allemand Der Spiegel, en rapportant des propos tenus par le général américain Todd Wolters, le commandant suprême des forces alliées en Europe [SACEUR]. Celui-ci aurait fait une telle proposition lors d’une vidéo-conférence avec des « chefs militaires de pays partenaires ».

En clair, la Roumanie et la Bulgarie seraient ainsi susceptibles d’accueillir chacune un groupement tactique de l’Otan. À condition, du moins, que les Alliés soient d’accord… Ce qui n’est pas encore acquis. Ainsi, souligne Der Spiegel, un tel renforcement sur le flanc oriental sud de l’Alliance pourrait « entraîner la première controverse sérieuse de politique étrangère » au sein de la nouvelle coalition gouvernementale.

Pour le moment, l’Otan n’a pas voulu faire de commentaire sur la proposition faite par le SACEUR. Sa porte-parole, Oana Longescu, a seulement répété que l’organisation reste « vigilante » et qu’elle prendrait « toutes les mesures nécessaires » pour protéger ses membres de toute menace.

Cela étant, lors d’un déplacement en Bulgarie, le 17 décembre, le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg, a évoqué, à demi-mots, l’éventualité d’un renforcement dans le sud-est de l’Europe.

« Ce que nous voyons maintenant en Ukraine et aux alentours, c’est un renforcement militaire russe important, progressif et continu avec des unités blindées, de l’artillerie, des chars de combat, des systèmes de guerre électronique, des drones et des dizaines de milliers de soldats prêts au combat. […] La raison de ce renforcement militaire n’est pas claire. Mais ce que nous savons, c’est que la Russie a déjà utilisé la force militaire contre l’Ukraine. Alors bien sûr, nous pouvons espérer et nous devons espérer le meilleur, mais nous devons nous préparer au pire », a commencé par dire M. Stoltenberg.

Et d’ajouter : « Nous évaluerons donc constamment la nécessité d’ajuster davantage notre posture, notre présence, également dans le sud-est » de l’Europe « car nous devons être sûrs de pouvoir toujours protéger et défendre les Alliés contre toute menace ».

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]