Mme Parly sur le SCAF : « Nous avons quasiment tout réglé… mais il manque le contrat principal »

Le 14 décembre, la ministre des Armées, Florence Parly, a été invitée par la commission de la Défense, à l’Assemblée nationale, pour donner le détail des priorités de la présidence française de l’Union européenne [UE] en matière de défense. Il y en aura donc six.

La première vise à « fixer un cap avec l’adoption par l’ensemble des Etats membres de l’UE de la Boussole stratégique », qui, selon Mme Parly, sera le « premier Livre blanc de la défense pour l’Union européenne ».

La seconde priorité sera de « promouvoir les opérations conjointes », qu’elles soient « conventionnelles ou hybrides », afin de rendre l’UE « plus réactive ». Là, il s’agira de renforcer les synergies entre les opérations existantes, de travailleur au « développement d’une capacité de déploiement rapide » et de mettre l’accent sur les « menaces hybrides », via l’élaboration d’une « boîtes à outils » pour se défendre contre ces dernières, en particuliers celles ayant trait aux manipulations de l’information.

Ensuite, et dans le même registre, Mme Parly a parlé de « défendre avec fermeté nos intérêts dans les espaces communs contestés, qu’il s’agisse des mers, du cyberespace, ou de l’espace exo-atmosphérique », ce qui passera par le développement de la « présence maritime coordonnée », actuellement expérimentée dans le golfe de Guinée, l’adoption d’une politique en matière de cyberdéfense au niveau européen ainsi que par l’élaboration d’une stratégie spatiale européenne de défense.

Une autre priorité évoquée par la ministre consistera à « approfondir nos partenariats, tout en nous assurant de leur équilibre ». Et ce citer notamment le lien transatlantique [et donc les rapports avec l’Otan].

Enfin, l’innovation en matière de défense [« clé de la supériorité sur le terrain » et « clé de la puissance industrielle », a insisté Mme Parly] fera l’objet d’une attention particulière, « notamment par la création, au sein de l’Agence européenne de défense, d’un Innovation Defense Hub ». De même que la promotion des coopérations industrielles au niveau européen. « Il s’agit de nous doter de nouvelles capacités communes pour nous donner les moyens d’agir et de réduire nos dépendances. Celles-ci sont particulièrement marquées dans certains domaines », a expliqué la ministre.

Justement, en la matière, certaines coopérations ne vont pas aussi vite qu’espéré… Tel est le cas du Système de combat aérien du futur [SCAF], programme mené par la France, en coopération avec l’Allemagne et l’Espagne.

Pour rappel, il s’agit de développer un « système de systèmes » reposant sur nouveau chasseur-bombardier [le NGF, pour New Generation Fighter], celui-ci devant interagir avec des drones, des effecteurs connectés et d’autres appareils au sein d’un « cloud de combat ».

Le 30 août dernier, on pouvait penser que, après des mois de difficultés, dues à des discussions compliquées entre Dassault Aviation [maître d’oeuvre, ndlr], Airbus Allemagne et Airbus Espagne au sujet des responsabilités industrielles et de la propriété intellectuelle, ainsi qu’aux doutes du Bundestag [chambre basse du Parlement allemand], ce programme allait pouvoir aller de l’avant avec la signature par les trois États concernés de l’arrangement d’application n°3 [IA3], lequel ouvrait la voie à la mise au point d’un démonstrateur.

En effet, en sa qualité de maître d’ouvrage, la Direction générale de l’armement [DGA] pouvait alors notifier, au nom de la France, de l’Allemagne et de l’Espagne, les contrats aux maîtres d’oeuvre désignés pour les cinq principaux piliers du SCAF, à savoir l’avion, le moteur, le cloud de combat, les effecteurs et les capteurs.

En octobre, le Délégué général pour l’armement, Joël Barre, avait dit espérer que cette phase serait terminée d’ici la fin du mois de novembre. Ce qui a été le cas pour quatre des cinq piliers, comme l’a suggéré Mme Parly devant les députés…

« Nous avons quasiment tout réglé. Il nous manque un contrat… C’est le contrat finalement principal , qui prend un peu de temps parce qu’il est complexe. Il concerne ce que l’on appelle au sein du programme SCAF le pilier dédié à l’avion de combat », a déclaré la ministre…

Donc, en résumé, tout est réglé… sauf le principal! « Il y a encore des sujets qui sont à régler. Pourquoi les choses sont difficiles? Parce que nous sommes exigeants sur un principe essentiel qui est celui d’avoir un leader par grand domaine et que ce leader ait des responsabilités bien identifiés », a ensuite expliqué Mme Parly.

Et cela est nécessaire car « nous savons que d’autres programmes, dans le passé, n’ont pas pu s’appuyer sur ces principes de responsabilisation des industriels et que cela a conduit à des dépassements de budget, de calendrier » ainsi qu’à « des difficultés à livrer toutes les fonctionnalités opérationnelles qui étaient requises », a fait valoir la ministre. Et d’ajouter : « Donc je pense personnellement qu’il est très important que nous ne fléchissions pas sur ces principes fondamentaux qui seront essentiels pour l’efficacité et le bon déroulement d’un programme qui est un majeur pour nos forces et pour nos industriels ».

Le Pdg de Dassault Aviation, Éric Trappier, ne dit pas autre chose. le NGF « pourra être européen » seulement si les « règles édictées au départ sont suivies », avec un « vrai maître d’oeuvre, un vrai maître d’ouvrage » et donc un « pays leader », a-t-il affirmé à l’antenne de BFM Business, la semaine passée. Reste à convaincre Airbus, dont les exigences, si elles étaient acceptés, seraient susceptible de priver le constructeur français des leviers nécessaires à l’exercice de la maîtrise d’oeuvre du projet.

Cela étant, le temps presse. « Le démonstrateur devra voler à l’horizon 2027. Cela peut paraître loin mais ça va venir quand même assez vite compte tenu du nombre de travaux à réaliser », a souligné Mme Parly. Aussi espère-t-elle que les discussions concernant le pilier « avion de combat » aboutissent sans trop tarder. « Je pense que [le contrat] pourra être notifié dans le cours du 1er semestre 2022 », a-t-elle prédit.

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