Une ingénieure métallurgiste admet avoir falsifié des tests de résistance de l’acier destiné à des sous-marins de l’US Navy

En juin 2020, alors responsable du contrôle de la qualité d’une fonderie établie à Tacoma [État de Washington] Elaine Thomas, s’apprêtait à prendre sa retraite quand elle fut accusée d’avoir falsifié les résultats de tests effectués sur l’acier destiné à la construction des sous-marinis de l’US Navy pendant plus de trente ans.

Ayant acquis cette fonderie en 2008, le groupe australien Bradken découvra pas moins de 200 tests de qualité falsifiés par Elaine Thomas, qui fut par la suite licenciée. Cependant, il ne prévint pas tout de suite l’US Navy… Il attendra dix-huit mois pour le faire.

« Après que la direction de Bradken a découvert les données falsifiées, elle a induit l’US Navy en erreur sur l’étendue et la nature de la fraude. […] Elle a mis en danger les marins et les opérations de la marine », estima alors le procureur fédéral Brian T. Moran, dans un communiqué publié à l’époque des faits. « Les fournisseurs du gouvernement ne doivent pas tolérer la fraude dans leurs rangs et doivent pleinement coopérer avec les autorités quand ils en découvrent », avait-il insisté.

Pour autant, étant donné que, par la suite, elle coopéra avec l’US Navy de « manière exceptionnelle », la société Bradken trouva un accord de « poursuites différés » avec les autorités américaines, en vertu duquel elle prit l’engagement de revoir ses procédures de contrôle et de payer une amende de « seulement » 10,8 millions de dollars. Ce qui peut sembler peu au regard des conséquences que ces tests falsifiés auraient pu avoir sur la sécurité des sous-marins nucléaires.

Cependant, si son ex-employeur s’en sortit bien dans cette affaire, Elaine Thomas n’en était pas encore au bout de ses peines dans la mesure où elle devait répondre de ses actes devant la justice. Plus d’un an après, l’ingénieure métallurgiste, par ailleurs reconnue par ses pairs, a finalement plaidé coupable de « fraude majeure » devant un tribunal de l’État de Washington, le 9 novembre. Et donc admis avoir dissimulé que l’acier produit par la fonderie de Tacoma ne correpondait pas toujours aux normes exigées par l’US Navy.

Dans un communiqué, le département américain de la Justice explique qu’Elaine Thomas est accusée d’avoir « mis en place et utilisé un système avec l’intention d’escroquer l’US Navy », en falsifiant les résultats de plus de 240 composants en acier, « ce qui représente un pourcentage substatiel des pièces moulées que Bradken a produites pour la Marine », laquelle a été contrainte de prendre « des mesures importantes pour assurer la sécurité des sous-marins concernés », ce qui entraînera une « augmentation des coûts de maintenance ». Elle risque une peine de dix ans de prison et une amende d’un million de dollars. Elle sera fixée sur son sort en février prochain.

Les motivations de l’ex-directrice de qualité de la fonderie de Tacoma ne sont pas claires… Si ce n’est qu’elle a estimé que certaines normes imposées par l’US Navy pour l’acier de ses sous-marins étaient « stupides », comme celle imposant que des tests menés à une température de -73°C.

Or, ces normes n’ont pas été élaborées au doigt mouillé : elles ont été édictées dans le cadre du programme SUBSAFE, lancé après la perte de USS Thresher, qui fut le premier sous-marin nucléaire à disparaître en mer avec 129 marins à bord, lors d’un essai de plongée, le 10 avril 1963. L’explication alors avancée était que le bâtiment avait été victime d’une voie d’eau ayant provoqué un court-circuit et l’arrêt de son réacteur nucléaire.

Quoi qu’il en soit, cette affaire de tests de qualité falsifiés n’est pas un cas isolé… En 2017, un ancien employé du chantier naval Huntington Ingalls avait accusé celui-ci d’avoir fixé les tuiles anéchoïques sur les coques des sous-marins avec une colle qui n’avait pas obtenu préalablement les « qualifications et les certifications appropriées ».

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