La Turquie serait sur le point de lancer une nouvelle opération militaire dans le nord de la Syrie

En octobre 2019, et après les opérations « Bouclier de l’Euphrate » [2016] et « Rameau d’Olivier » [2018], la Turque lança une troisième offensive dans le nord de la Syrie, avec le concours des groupes rebelles syriens acquis à sa cause, contre les milices kurdes syriennes [YPG], accusées par Ankara d’être alliées avec le Parti des travailleurs du Kurdistan [PKK], considéré comme étant une organisation terroriste.

Appelée « Source de Paix », cette opération militaire turque, rendue possible par retrait des troupes américaines des localités de Tal Abyad et de Ras al-Aïn, visait à établir un zone « tampon » à la frontière, afin de  » permettre le retour des réfugiés syriens dans leur pays », avait soutenu le Recep Tayyip Erdogan, le président turc.

Plus précisément, l’objectif consistait à prendre le contrôle de tous les territoires tenu par les Forces démocratiques syriennes [FDS, dont les YPG font partie, ndlr] sur une profondeur de 30 km. Cette opération fut suspendue au bout d’une dizaine de jours, grâce à une trêbve négociée par Mike Pence, alors vice-président des États-Unis. Trêve qui sera plus tard prolongée dans le cadre d’un accord conclu avec la Russie, présente militairement sur le terrain et proche alliée de la Syrie.

Ainsi, il fut convenu que la Turquie garderait le contrôle d’une bande 120 km de long dans le nord de la Syrie précisément enre les villes de Tal Abyad et de Ras al-Aïn, que les milices kurdes syriennes abandonneraient les positions qu’elles avaient établies à proximité de cette zone ainsi définie, et que des patrouilles y seraient menées conjointement par les forces turques et syriennes.

Puis, en mars 2020, la Turquie lança l’opération « Bouclier de printemps », cette fois dans la province d’Idleb, en réponse à des frappes aériennes contre ses troupes, attribuées aux forces syriennes. Celle-ci prit fin après un nouvel accord avec la Russie, les deux parties ayant pris l’engagement de mener des patrouilles communes le long de la stratégique autoroute M4, qui traverse cette région, encore dominée par les groupes rebelles, notamment jihadistes, et dont le nord est sous contrôle turc.

D’ailleurs, c’est dans cette dernière, précisément à Soulouk, que,le 22 octobre, une frappe effectuée par un drone MQ-9 Reaper américain a éliminé un certain Abdul Hamid al-Matar, un haut dirigeant d’al-Qaïda en Syrie…

Quoi qu’il en soit, et alors que la popularité du président Erdogan n’est actuellement pas au mieux, la Turquie serait sur le point de conduire sa sixième opération militaire dans le nord de la Syrie.

Le 11 octobre, Ankara en effet accusé ces dernières d’être responsables de plusieurs attaques menées contre ses troupes déployées en Syrie [en particulier dans le canton d’Afrine] et à sa frontière. Et M. Erdogan s’était dit à « prendre les mesures nécessaires » pour éliminer toute menace contre ses forces de sécurité.

« Les récentes attaques et le harcèlement visant nos forces de police ont atteint leur limite », avait en effet lancé le président turc. « Nous sommes déterminés à éliminer nous-mêmes les menaces en provenance de Syrie », avait-il insisté.

Deux jours plus tard, le chef de la diplomatie turque, Mevlüt Cavusoglu, a pointé la responsabilité de la Russie et des États-Unis dans ces attaques, les seconds étant notamment accusés d’avoir « failli à leurs promesses » en formant et en équipant les milices kurdes syriennes, en première ligne face à l’État islamique [EI ou Daesh]. « Puisqu’ils ne tiennent pas leurs promesses, nous ferons le nécessaire pour [garantir] notre sécurité », a-t-il assuré.

C’est donc dans ce contexte que, selon l’agence Bloomberg, qui s’appuie sur des confidences faites anonymement par deux responsables turcs, qu’Ankara venait de déployer plus de 200 véhicules et des centaines de soldats supplémentaires en vue d’une nouvelle offensive contre les YPG. Ce qui a été en partie confirmé par l’agence officielle syrienne SANA, qui a évoqué l’existence d’un convoi de 31 véhicules militaires chargés d’armes et de munitions destinées « aux réseaux terroristes ».

L’objectif serait de s’emparer de zones situées au sud de la ville de Kobané, afin de les relier à celles qui sont déjà sous contrôle turc à l’ouest et à l’est de l’Euphrate. En clair, il s’agirait ainsi pour la Turquie de s’assurer une continuité territoriale [longue de 910 km, ndlr] entre les zones qu’elle occupe dans le nord de la Syrie, avec l’appui des groupes rebelles qui lui sont affiliés.

En outre, le 26 octobre, les forces turques ont été autorisées à poursuivre leurs opérations en Syrie [ainsi qu’en Irak] pour deux années de plus. Et cela, contre tout organisation considérée comme « terroriste ». Le texte, adopté par le Parlement, explique que les « risques et menaces posés à la sécurité nationale par les conflits en cours dans les régions proches des frontières méridionales de la Turquie ne font qu’augmenter » et que, par conséquent, Ankara « prendra toutes les mesures nécessaires, dont la conduite d’opérations transfrontalières ».

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