Le français Naval Group dévoile le démonstrateur d’un drone sous-marin autonome océanique

Cité par le capitaine de frégate François-Olivier Corman dans son passionnant livre intitulé « Innovation et stratégie navale« , l’amiral Raoul Castex affirmait que « de nombreux inventeurs cherchent à nous écouler les produits de leur imagination sans se soucier de l’emploi qu’on en peut faire. C’est à nous d’en tirer parti comme nous pourrons. Nous parlons ici non seulement des armes mais de tous les mécanismes qui gravitent autour d’elles ».

Qu’en sera-t-il du démonstrateur de drone sous-marin océanique [DDO] que vient de dévoiler Naval Group, à l’occasion de ses 5ème « Innovation Days », le 7 octobre?

Développé sur fonds propres depuis cinq ans, avec le concours de Thales pour les capteurs et de l’entreprise Delfox, spécialiste de l’intelligence artificielle, cet engin de 10 mètres de long pour un déplacement d’une dizaine de tonnes, devra être en mesure de plonger jusqu’à 150 mètres de profondeur et naviguer à la vitesse de 15 noeuds. Son caractère « océanique » suppose qu’il disposera d’une autonomie de plusieurs semaines, grâce à un système de propulsion reposant sur une pile à combustible fonctionnant avec de l’hydrogène.

Mis à l’eau en novembre 2020, un prototype de ce DDO a effectué une première campagne d’essais au large de Toulon en février 2021. Une seconde doit être menée d’ici la fin de cette année. « On vise au printemps 2022 de faire une mission de renseignement en autonomie complète », a indiqué Cyril Lévy, directeur des programmes de drones chez Naval Group, cité par l’AFP.

L’intérêt de ce sous-marin de poche est qu’il sera entièrement autonome, c’est à dire que, grâce à des algorithmes d’intelligence artificielle, il pourra reconfigurer par lui-même sa mission et sa trajectoire en fonction de l’évolution de la situation tactique.

« La menace sous la mer s’impose comme un enjeu majeur pour les marines dans un futur proche. Le Démonstrateur de Drone sous-marin Océanique est un projet fédérateur de développements
technologiques dont l’un des principaux défis est l’autonomie décisionnelle contrôlée qui sera au cœur des capacités dronisées. Il permet de concevoir, qualifier et valider les briques technologiques », explique Naval Group.

Grâce à ses capteurs embarqués [sonar, radar er caméra], ce drone sous-marin pourra mener des patrouilles jusqu’à une centaine de nautiques d’un navire-mère ou d’un port afin de détecter et identifier d’éventuelles menaces grâce à une base de données intégrée. On peut donc imaginer qu’il soit utilisé, par exemple, comme « éclaireur » d’un groupe aéronaval – ce qui permettrait d’alléger la charge des sous-marins nucléaires d’attaque [SNA] – ou pour sécuriser la sortie des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins de la base de l’Île-Longue.

« On l’a conçu comme un système de renseignement », a souligné M. Lévy. Cependant, il pourrait être aussi « armable », ce qui soulèvera des questions éthiques au regard de « l’autonomie décisionnelle » que lui donnera l’intelligence artificielle embarquée. Dans ce cas, la décision de mettre en oeuvre son armement éventuel devrait revenir à un marin.

Pour le moment, la Marine nationale, qui se veut être une « marine de pointe », comme le souligne son plan stratégique Mercator, n’est pas directement impliquée dans ce projet porté par Naval Group. Cependant, l’industriel espère ouvrir des discussions avec le ministère des Armées afin que son drone sous-marin puisse entrer en service sous le pavillon français à l’horizon 2025. Mais encore faut-il que les tests à venir soient concluants.

Photos : Naval Group

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