Un programme américain de missile hypersonique franchit une étape décisive

En retard par rapport à la Russie et la Chine dans la course aux armes hypersoniques alors qu’ils en avaient donné le départ avec leur programme « Conventional Prompt Global Strike », lancé au début des années 2000, les États-Unis ont plusieurs fers au feu pour tenter de combler l’écart entre leurs principaux concurrents stratégiques désignés.

Ainsi, le Pentagone mène de front plusieurs programmes, avec des fortunes diverses. Si le « Common Hypersonic Glide Body » [C-HGB] qui, commun à l’US Army et l’US Navy, consiste à mettre au point un planeur hypersonique, suit son court après un premier essai réussi en mars 2020 [un nouveau test doit être effectué d’ici la fin de cette année, ndlr], ce n’est pas le cas de l’Air Launched Rapid Response Weapon [ARRW ou ARROW, encore appelé AGM-183A].

Développée par Lockheed-Martin dans le cadre d’un contrat de 480 millions de dollars, cette arme hypersonique destinée à l’US Air Force a déjà subi deux échecs lors de ses derniers essais. En juillet, un AGM-183A s’est ainsi abîmé en mer, son propulseur ne s’étant pas allumé à l’issue de la séquence de largage réalisée depuis un bombardier B-52H Stratofortress.

Un troisième programme, en apparence plus complexe, alterne également les succès et les déconvenues. Conduit sous l’égide de la DARPA, l’agence de recherche du Pentagone, le projet « Hypersonic Air-breathing Weapon Concept » [HAWC] vise à mettre au point un missile hypersonique propulsé par un statoréacteur à combustion supersonique [ou scramjet, fourni par Northrop Grumman, ndlr].

Pour ce programme, deux équipes industrielles ont été sélectionnées. La première associe Lockheed-Martin à Aerojet Rocketdyne quand la seconde est constituée par Raytheon et Northrop Grumman, dans l’expertise dans le domaine des Scramjet vient d’Orbital ATK, que le groupe a racheté en 2017.

Pour ce projet, la DARPA ne partait pas de zéro dans la mesure où elle a pu s’appuyer sur les travaux réalisés lors de précédents programmes, comme le lanceur orbital X-30, le X-43 Scramjet de la NASA [qui a pu voler à la vitesse de Mach 9,6 en 2004] ou encore le Boeing X-51 Waverider qui, en 2013, avait parcouru près de 430 km pour voler à Mach 5,1.

Cependant, le développement de ce missile hypersonique a pris du retard, en raison de « problèmes techniques » non précisés au regard de la confidentialité [relative] du programme HAWC. Et un premier essai en vol, qui aurait dû avoir lieu à la fin 2020, a été reporté.

Finalement, ce contretemps aura été profitable… En effet, le 27 septembre, la DARPA a fait part de la réussite du premier vol de la variante du missile HAWC mise au point par le tandem Raytheon/Northrop Grumman, dans le cadre d’un essai réalisé avec le concours de l’US Air Force et de l’US Navy.

Dans le détail, le test prévoyait plusieurs séquences : intégration du missile sur un bombardier [dont le type n’a pas été précisé mais il est probable qu’un B-52H ait été sollicité, ndlr], lancement, séparation de l’avion, allumage du propulseur, poussée, séparation du propulseur, allumage du scramjet et vol de croisière. « Tous les objectifs principaux ont été atteints », s’est félicité la DARPA.

Cet essai « réussi du HAWC est l’aboutissement d’années de partenariat fructueux entre le gouvernement et l’industrie, où une seule équipe motivée a atteint un objectif extrêmement ambitieux grâce à une collaboration intense », a fait valoir Andrew Knoedler, le responsable de ce programme au sein de la DARPA. « Ce vol historique n’aurait pas été possible sans le dévouement du personnel d’essais en vol de l’industrie, de l’US Air Force et de la Navy qui a persévéré pendant la pandémie pour que la magie opère », a-t-il insisté.

Cela étant, il reste encore du pain sur la planche pour que le HAWC devienne opérationnel. Mais comme l’a souligné Colin Whelan, l’un des dirigeants de Raytheon Missiles & Defense, ce vol « historique » ouvre la « la voie à un système hypersonique longue portée abordable à court terme pour renforcer la sécurité » des États-Unis.

Photo : DARPA

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