Le drone MQ-9 Reaper Block 5 de l’armée de l’Air a franchi une étape vers sa pleine capacité opérationnelle

En 2020, l’armée de l’Air & de l’Espace [AAE] a reçu deux systèmes de drones MQ-9 Reaper portés au Block 5 [soit six appareils au total], lesquels ont directement envoyés sur la base aérienne projetée [BAP] de Niamey [Niger] dans le cadre de l’opération Barkhane.

Cette décision se justifiait par le fait qu’il n’était alors pas possible de faire évoluer ces drones dans l’espace aérien français, comme l’avait récemment expliqué Joël Barre, le Délégué général pour l’armement [DGA], lors d’une audition parlementaire. En effet, ses services ne furent pas en mesure de « garantir la sécurité des vols » de ces appareils, faute de d’avoir suffisamment d’informations leurs nouveaux logiciels.

« La difficulté que nous avons eue avec le Reaper Block 5 vient du fait qu’il s’agit d’équipements américains. L’affaire montre notre degré de dépendance dans ce genre de processus, face à une configuration de logiciel entièrement nouvelle et à un niveau de qualité dont nous ne savons pas s’il est suffisant, alors que nous sommes responsables du niveau de sécurité associée à la mise en œuvre des matériels », avait en effet affirmé le DGA.

Aussi, les vols d’expérimentation du MQ-9 Reaper Block 5 ne pouvaient être réalisés par le Centre d’expertise aérienne militaire [CEAM] de l’AAE que sur un théâtre extérieur, c’est à dire au Sahel. Et il fallut attendre mai dernier pour voir l’un d’eux réaliser une première mission opérationnelle.

Le dernier compte-rendu des opérations de l’État-major des armées pour la période allant du 13 au 19 août n’évoque pas de frappes aériennes réalisées par la force Barkhane. Or, il y en a eu au moins une.

En effet, le 17 août, un Reaper Block5 a largué une bombe à guidage laser GBU-12 dans « un cadre opérationnel ». Et, selon l’EMA, ce système a donc « ainsi franchi nouvelle étape vers sa pleine capacité opérationnelle ».

« Le Reaper Block 5 dispose désormais d’une nouvelle capacité opérationnelle grâce à sa qualification au tir de munitions GBU 12. Une première campagne d’expérimentation a été menée sur la BAP de Niamey de mars à mai 2021. Elle avait pour objectif de tester le nouveau système Block 5 dans un contexte opérationnel. Une seconde campagne s’est déroulée fin juillet afin d’éprouver la capacité d’emport et de tir de GBU12 sur ce nouveau standard », explique l’EMA.

Pour rappel, et par rapport aux deux systèmes de MQ-9 Reaper Block 1 que l’AAE met en oeuvre au Sahel depuis 2014, les drones portés au standard Block 5 sont dotés de capacités singulièrement accrues en matière de communication [liaisons mieux sécurisés, avec un débit plus important], d’une suite logicielle et de capteurs améliorés, d’un système d’atterrissage automatique. Pouvant emporter une charge utile plus lourde, la gamme de munitions qu’ils sont susceptibles de mettre en oeuvre est plus étendue, allant de la GBU-12 au missile air-sol Hellfire en passant par la GBU-49 à guidage laser et GPS.

Pour le moment, donc, les MQ-9 Reaper Block 5 font la même chose que leurs homologues du standard Block 1 étant donné que ceux-ci sont déjà qualifiés pour emporter des GBU-12… À la différence, souligne le lieutenant-colonel Mathieu, directeur de la campagne d’expérimentation, qu’ils permettent « d’obtenir une meilleure synergie entre les équipages et une coordination accrue entre les différents acteurs, notamment lors des passes de tirs ». En outre, poursuit-il, « l’ergonomie du système est simplifiée ce qui apporte une plus-value importante pour les opérations, comme actuellement dans la bande sahélo-saharienne ».

En outre, selon l’EMA, le Reaper Block 5 « augmente également de manière sensible la capacité de collecte de renseignements [ISR] en temps réel, ce qui participe à la consolidation d’un processus de ciblage déjà robuste et totalement respectueux du droit international humanitaire ».

Pour que la pleine capacité opérationnelle du Reaper Block 5 soit prononcée, il faut encore valider son aptitude à mettre en oeuvre des GBU-49 et des missiles Hellfire… Et qualifier sa charge de renseignement électro-magnétique [ROEM], pour laquelle les États-Unis posent quelques problèmes.

« Nous ne connaissons toujours pas la charge utile de capacité de renseignement électromagnétique. Nous discutons depuis longtemps avec les Américains pour l’obtenir, mais ils prennent leur temps pour nous la fournir, parce que c’est un équipement sensible », avait en effet affirmé M. Barre, en juin.

En attendant, l’apport des drones MALE [Moyenne Altitude Longue Endurance] Reaper appartenant au standard Block 1 est indéniable. En 2020, ceux engagés au Sahel ont assuré 58 % des frappes aériennes [contre 29% pour les Mirage 2000 et 13% pour les hélicoptères d’attaque, ndlr] et près de 55% du renseignement aérien. Depuis qu’ils sont entrés en service, ces appareils, dont un a été perdu, ont effectué plus de 43’000 heures de vol, dont 92% au profit de la force Barkhane.

Photo : armée de l’Air & de l’Espace / EMA

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