Le navire espion russe Yantar repéré près de deux câbles de télécommunications au large de l’Irlande

Mis en oeuvre par la Direction principale de la recherche en eaux profondes [GUGI] de la marine russe, le navire « océanographique » Yantar a régulièrement été repéré, ces derniers temps, à proximité des câbles sous-marins de télécommunications, par lesquels transite l’essentiel des communications mondiales [97% du trafic] et des transactions financières. Ce qui ne peut que nourrir la spéculation sur la nature de ses activités [sabotage? espionnage?]… D’autant plus que ce bâtiment est en mesure de déployer un mini sous-marin de type AS-37 [Projet 16810], pouvant plonger jusqu’à 6’000 mètres de profondeur.

En règle générale, ce domaine n’est évoqué que du bout des lèvres, étant donné son caractère sensible. Mais c’est de moins en moins le cas depuis quelques mois. Ainsi, lors de sa dernière audition parlementaire, l’amiral Pierre Vandier, le chef d’état-major de la Marine nationale [CEMM], a abordé ce sujet pour mieux défendre la nécessité de faire un effort sur ce l’on appelle le « Seabed Warfare », c’est à dire la « guerre des abysses ».

« Nous nous sommes aperçus que des étrangers montraient un intérêt particulier à naviguer au large de nos côtes, juste à la verticale de câbles sous-marins. […] Une douzaine de gros câbles sont actuellement déployés sur les fonds sous-marins […] en Atlantique. […] Il y a là des enjeux en termes de renseignement et de surveillance de fonds sous-marins, car ces câbles peuvent être utilisés aussi à des fins de détection. Des travaux universitaires soulignent le fait que les technologies de fibres optique employées dans ces câbles leur confèrent la capacité de détecter des séismes mêmes très faibles et donc pourquoi pas de détecter le passage de sous-marins », a en effet expliqué l’amiral Vandier aux députés.

Visiblement, les câbles AEConnect-1 et Celtic Norse, qui relient respectivement l’Irlande aux États-Unis et à l’Écosse, font actuellement l’objet de toute l’attention du Yantar. Selon le renseignement en source ouverte, celui-ci aurait quitté, le 8 août, sa base Olenya Guba qui, située près de Mourmansk, est connue pour abriter le GUGI.

Après, faute d’avoir activé son Système d’identification automatique [AIS, pour Automatic Identification System], dont les données permettent de suivre le trafic maritime, à condition qu’il n’y ait de « brouillage », la trace du Yantar s’est perdue, jusqu’à ce qu’on l’ait retrouvé au large du comté de Donegal [Irlande], où sa présence a été confirmée par les autorités irlandaises.

D’après le quotidien « The Times« , le Yantar a « passé les premières heures » du 18 août à « naviguer en zigzag » au large des comtés de Mayo et de Donegal, « suggérant qu’il cherchait quelque chose à l’aide d’un sonar ». Puis, poursuit le journal, il s’est « déplacé vers un point situé à l’ouest du porte de pêche de Killybegs, avant d’aller plus loin dans l’Atlantique ». Aussi, son comportement « a été décrit comme hautement suspect par des sources militaires ».

Les forces irlandaises ne sont pas intervenues pour la bonne raison, a expliqué leur état-major, que le Yantar n’est entré à aucun moment dans les eaux territoriales de l’Irlande, ses activités ayant eu lieu dans la zone économique exclusive [ZEE] de l’île.

Selon le Times, ce serait la seconde fois en quelques semaine qu’un navire a eu des activités suspectes près d’un câble de télécommunications sous-marin. Ainsi, le mois dernier une patrouille irlandaise a repéré un tel bateau qui, immatriculé au Cap-Vert, n’émettait aucun signal via l’AIS.

« Ce type d’activité s’est généralisé depuis quelques années. Cela souligne l’importance de disposer d’un marine et d’un corps aérien dotés de ressources suffisantes pour surveiller de manière adéquate nos zones de responsabilité maritime », a commenté Cathal Berry, un ancien officier du renseignement irlandais, dans les colonnes du quotidien britannique. Et d’ajouter : « Nous sommes le maillon faible de l’Europe en matière de défense. Nous n’avons aucune capacité de sonar. Nous n’avons pas de radar militaire donc nous ne pouvons même pas surveiller notre ciel. Aucune nation qui se respecte ne permettrait que cela se produise. La Russie a remarqué cette faiblesse par elle-même et en profite maintenant pleinement ».

 

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