Un nouvel – et curieux – incident naval a été signalé au large des Émirats arabes unis

Le 3 août, et alors que le nouveau président iranien, Ebrahim Raïssi, prenait officiellement ses fonctions, l’Union européenne et l’Otan ont condamné l’attaque meurtrière qui, commise quelques jours plus tôt avec un drone kamikaze contre le pétrolier M/T Mercer Street, a été attribuée à Téhéran par Israël, le Royaume-Uni, les Etats-Unis et la Roumanie.

« Nous condamnons cette attaque. Nous prenons note des évaluations faites par les États-Unis, le Royaume-Uni et Israël et nous appelons à éviter toute action préjudiciable pour la paix et la stabilité dans la région », a ainsi déclaré Nabila Massrali, la porte-parole de Josep Borrell, le Haut représentant de l’Union pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité. « Les circonstances de cette attaque doivent être clarifiées » et « cette action est contraire à la liberté de navigation et est inacceptable », a-t-elle ajouté.

« La liberté de navigation est vitale pour tous les alliés de l’Otan et elle doit être préservée conformément au droit international » et les « Alliés restent préoccupés par les actions déstabilisatrices de l’Iran dans la région, et ils appellent Téhéran à respecter ses obligations internationales », a réagi l’Otan.

L’attaque contre M/T Mercer Street, un pétrolier exploité par l’armateur Zodiac Maritime, propriété de l’homme d’affaires israélien Eyal Ofer, a fait deux tués, dont un agent de sécurité britannique et un marin roumain. Selon l’US Navy, au moins un drone kamikaze aurait explosé au contact de sa superstructure. Les États-Unis ont promis d’y apporter une « réponse collective » tandis que Iran a démenti toute responsabilité dans cette affaire. « La République islamique d’Iran n’hésitera pas à protéger sa sécurité et ses intérêts nationaux », a averti, le 2 août, Saïd Khatibzadeh, le porte-parole de la diplomatie iranienne.

On en était là quand, le 3 août, un nouvel incident a été signalé dans le même secteur par l’UKMTO, un organisme de la Royal Navy chargé de la sécurité maritime. Ainsi, celui-ci a indiqué qu’un navire, dont il n’a pas précisé l’identité, venait probablement de faire l’objet d’un « détournement » alors qu’il naviguait à la limite du sultanat d’Oman et des Émirats arabes unis, soit non loin du détroit d’Ormuz.

Un avion de patrouille maritime C-295 des forces omanaises a ensuite été repéré – grâce aux donnés AIS [ Aeronautical Information Service] – non loin de la zone de l’incident présumé.

Puis, la presse britannique a identifié le navire en question comme étant le pétrolier Asphalt Princess. Et d’avancer que 8 à 9 individus armés étaient montés à son bord. Le quotidien The Times, citant des sources militaires, a indiqué que l’hypothèse d’une action de l’armée iranienne ou de ses mandataires était privilégiée.

Une telle piste pouvait être d’autant plus crédible que plusieurs navires furent arraisonnés dans le secteur par les forces iraniennes, généralement en réaction à des différends avec d’autres pays, comme ce fut le cas pour le Stena Impero en 2019 ou, plus récemment, pour le pétrolier sud-coréen Hankuk-Chemi.

Plus tard, la revue maritime Lloyd’s List a indiqué que les hommes armés montés à bord de l’Asphalt Princess avaient ordonné à son équipage de mettre le cap vers l’Iran. Seulement, l’affaire s’est ensuite dégonflée… Ce 4 août, l’UKMTO a en effet annoncé que l’incident était clos, le navire étant désormais en sécurité. L’intervention annoncée de « moyens » de l’US Navy vers la position du pétrolier expliquant peut-être cet épilogue.

Auparavant, le ministère iranien des Affaires étrangères avait rappelé la « disposition de l’Iran à apporter toute aide en cas d’accidents maritimes » dans la région, après avoir estimé que la « publication d’informations sur des incidents successifs liés à des bateaux dans le Golfe persique et en mer d’Oman [était] totalement suspecte ». Et de mettre en garde contre la « création d’une situation faussée à des fins politiques ».

Quoi qu’il en soit, cet incident peut sembler curieux à plus d’un titre. L’Asphalt Princess, immatriculé au Panama, venait de quitter les Émirats arabes unis pour se rendre au port de Sohar [situé dans le nord du Sultanat d’Oman] avec une cargaison de bitume à bord. Quant à son armateur, il s’agit de Glory International FZ LLC, une société implantée aux Émirats arabes unis.

Par ailleurs, alors que l’incident de l’Asphalt Princess venait d’être signalé par l’UKMTO, six navires commerciaux croisant dans le secteur ont fait savoir qu’ils avaient une « capacité de manoeuvre restreinte ». Pour l’analyste Ranjith Raja, cité par l’Associated Press, « cela se produit très rarement. Tous les navires ne peuvent pas perdre leurs moteurs ou leur capacité à barrer en même temps ».

Pour le moment, Téhéran n’est pas tenu pour responsable de ce qui a pu arriver à l’Asphalt Princess. « Nous avons observé un comportement belliqueux très préoccupant de la part de l’Iran, y compris dans le domaine maritime. […] En ce qui concerne cet incident, il est toutefois trop tôt pour avancer une explication », a déclaré Ned Price, le porte-parole de la diplomatie américaine.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]