Aux côtés du SCAF et du Rafale, l’armée de l’Air & de l’Espace aura sans doute besoin d’un avion de combat léger

Désormais, la formation des pilotes de chasse et des navigateurs officiers systèmes d’armes [NOSA] repose essentiellement sur le turbopropulseur Pilatus PC-21, et non plus sur l’Alphajet. Cependant, ce dernier est loin d’avoir encore dit son dernier mot. Lors d’une audition à l’Assemblée nationale, en mai 2019, le chef d’état-major de l’armée de l’Air & de l’Espace [CEMAAE], le général Philippe Lavigne, avait confié que cet appareil resterait en service à l’horizon 2035, ne serait-ce que pour permettre à la Patrouille de France [PAF] de continuer à exister. Mais pas seulement.

En effet, le général Lavigne avait également indiqué qu’une réflexion allait « naturellement » être lancée pour trouver un successeur à l’Alphajet. Deux ans plus tôt, dans les colonnes du magazine DSI, le général André Lanata, alors CEMAAE, avait dit souhaiter voir la question du remplacement de l’Alphajet figurer dans les travaux relatifs à la Loi de programmation militaire [LPM] 2019-25, qui était en cours d’élaboration à l’époque. Et de préciser que des choix seraient faits « en fonction des retours d’expérience avec le PC-21 ».

En tout cas, si rien n’a été dit depuis sur ce sujet, le développement d’un avion de combat « léger » pour les besoins de l’armée de l’Air & de l’Espace a du sens. C’est en effet ce que suggère le colonel David David Pappalardo, actuellement affecté à la Direction générale des relations internationales et de la stratégie [DGRIS], après avoir servi au bureau « Plans, division Système de force » à l’EMAEE.

« Comme l’indique l’analyse stratégique parue au début de l’année 2021, l’environnement futur marquera la persistance de crises enkystées, auxquelles s’ajouteront les menaces déjà identifiées dans la Revue stratégique de 2017. En particulier, le retour de la compétition stratégique et militaire est désormais assumé par les grandes puissances alors que des puissances régionales profitent du relatif désengagement américain pour faire valoir leurs intérêts au prix d’un aventurisme militaire grandissant. Le déclenchement
d’une guerre majeure pourrait redevenir une hypothèse crédible », commence par souligner le colonel Pappalardo, dans VORTEX, la nouvelle revue semestrielle publiée par le Centre d’études stratégiques aérospatiales [CESA] de l’AAE.

Aussi, poursuit-il, dans un tel contexte, la France « devra disposer d’une aviation de combat capable de faire face à l’intégralité du spectre de la conflictualité », c’est à dire pouvant intervenir dans des environnements contestés ou permissifs.

Le New Generation Fighter [NGF], sur lequel repose le Système de combat aérien du futur [SCAF], avec ses effecteurs connectés, sera « taillé » pour les premiers. Et le Rafale, porté au dernier standard, en sera un partenaire « essentiel » jusqu’en 2060, écrit le colonel Pappalardo.

En revanche, pour les seconds, un avion de combat léger pourrait être intéressant, surtout dans une logique de « différenciation » comme elle est actuellement pratiquée au Sahel. En effet, en 2016, il a été décidé de remplacer les Mirage 2000 par des Rafale au Levant car, rappelle l’officier, « la forte présence russe complique le travail de la coalition ».

En effet, explique-t-il, le « Rafale dispose d’une autoprotection air-air indispensable face aux manœuvres d’intimidation des appareils russes, ainsi qu’un ensemble de solutions air-sol plus complet ». Dans le même temps, seuls des Mirage 2000 sont désormais engagés dans l’opération Barkhane, où l’environnement est plus permissif.

« L’avenir doit être préparé en conciliant supériorité technique et nécessité de retrouver une masse de combat suffisante pour offrir un rapport de force favorable et supporter l’attrition dans la durée », estime par ailleurs le colonel Pappalardo.

Et, selon lui, c’est donc « dans cet esprit que l’AAE devrait réfléchir à un avion de combat léger à l’horizon 2030-35 » ainsi qu’à une « nouvelle structure de force différenciée : New Generation Fighter, Rafale modernisés et effecteurs déportés seraient alors employés en priorité pour opérer au contact de l’ennemi dans les missions de haute intensité; un nouvel avion monoréacteur plus léger et moins onéreux pourrait être développé en même temps pour accomplir les missions moins exigeantes, sur un spectre plus large que celui de l’appui-feu ».

Mais au-delà de cette « différenciation », un tel appareil de combat léger pourrait être utilisé pour « la transition opérationnelle » des jeunes pilotes « après le retrait de service des PC-21″ et d' »avion Red Air représentatif de la menace future ». Ce que fait actuellement l’Alphajet.

Pour le colonel Pappalardo, un tel avion aurait donc la forme « d’un monoréacteur léger, ravitaillable en vol, disposant d’une interface homme-machine similaire au NGF pour faciliter le passage d’un vecteur à un autre » et il « pourrait être développé en coopération, le besoin de génération de force aérienne étant largement partagé en Europe ».

Justement, Airbus a déjà pris les devants, en dévoilant son projet AFJT [Airbus Flexible Jet Trainer], en octobre dernier. Imaginé pour répondre aux besoins de l’Ejército del aire, il s’agit d’un appareil d’entraînement, monoréacteur, pouvant de décliner en avion léger d’attaque et tenir le rôle « d’agresseur ». Et l’Espagne voudrait associer la France et l’Allemagne, deux partenaires potentiels en raison de leur implication dans le SCAF.

Photo : Airbus

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