Pour ses navires de type Zumwalt, l’US Navy privilégie les missiles hypersoniques au canon électromagnétique

Lancé en 2005, le projet visant à développer un canon électromagnétique pour les besoins de l’US Navy promettait de révolutionner l’artillerie navale en raison des avantages qu’une telle était susceptible de procurer.

En effet, un canon électromagnétique [ou Electromagnetic Railgun – EMRG] permet de tirer un projectile pouvant atteindre une vitesse hypersonique [supérieure à Mach 5] sur une cible située à 200 km de distance. En outre, à bord d’un navire, il évite le stockage d’explosifs.

Et, enfin, la mise en oeuvre d’un EMRG est relativement peu coûteuse, notamment si on la compare à celle de l’Advanced Gun System [AGS], le système d’artillerie de 155 mm qui équipe actuellement les « destroyers » de la classe Zumwalt, dont seulement trois exemplaires ont été construits à ce jour [sur les 32 initialement prévus]. En effet, ce type de canon ne peut utiliser que des obus de type « Long Range Land Attack Projectile » [LRLAP] qui, fournis par Lockheed-Martin, coûtent entre 800’000 et 1 million de dollars pièce.

Pour rappel, le principe d’un canon électromagnétique consiste à faire circuler un courant électrique intense associé à un champ magnétique entre deux rails conducteurs. Grâce à la force de Laplace, un projectile – également conducteur – placé dans un tel dispositif subit alors une force accélération avant d’être ejecté à une vitesse très élevée.

Cependant, la mise au point d’une telle arme suppose de relever plusieurs défis, à commencer par celui de l’usure prématurée des matériaux, soumis à de fortes contraintes physiques à chaque tir. En outre, il faut être en mesure de délivrer une importante quantité d’énergie dans un laps de temps très court.

Aussi, avec leur « système d’alimentation intégré » [IPS] pouvant générer plus de 75 mégawatts de puissance électrique, les trois navires de type Zumwalt étaient jusqu’alors pressentis pour être armés d’un tel canon électromagnétique, dont le développement a côuté, à ce jour, plus de 500 millions de dollars à l’US Navy, laquelle comptait l’utiliser avec des obus guidés de type « HvP » [High-velocity Projectile].

Cela étant, la marine américaine n’est pas encore parvenu à obtenir un canon électromagnétique pleinement opérationnel… alors que son homologue chinoise aurait accompli des progrès substantiels dans ce domaine. Du moins, c’est ce que suggérent des photographies du navire d’assaut amphibie Haiyang Shan, à bord duquel une telle arme fut remarquée, en 2018.

En outre, en Europe, le projet PILUM [Projectiles for Increased Long-range effects Using ElectroMagnetic railgun] a été confié l’Institut franco-allemand de recherches de Saint-Louis [ISL] par l’Agence européenne de défense [AED] afin de mettre au point un canon électro-magnétique. Les français Naval Group et Nexter y sont associés, en tant qu’intégrateurs systèmes.

« Le railgun et les armes à énergie dirigée sont l’avenir de la supériorité maritime », avait estimé le Dr Thomas Beutner, responsable du département « Naval Air Warfare and Weapons » de l’Office of Naval Research [ONR]. Et pourtant, l’US Navy a l’intention de suspendre le développement de son canon électromagnétique. Du moins officiellement [il n’est en effet pas exclu qu’il fasse partie des « black programs » du Pentagone, ndlr].

Ainsi, selon les médias américains, dont le blog « The War Zone« , l’US Navy n’a demandé aucun budget pour financer la poursuite des travaux relatifs aux armes électromagnétiques pour le prochain exercice fiscal.

Cependant, les données concernant ce programme seront conservées pour une éventuelle utilisation ultérieure [pour son programme de futurs « destroyers » DDG(X), pour lequel elle vient de mettre en place une équipe dédiée]… voire pour d’autres applications plus immédiates dans le mesure où l’on peut supposer que des progrès ont été réalisés dans les domaines de l’aérothermodynamique, des matériaux et, bien évidemment du stockage et de la conversion d’énergie.

Pour le magazine Popular Mechanics, cette décision de suspendre le développement d’un canon électromagnétique s’explique par le fait qu’un tel projet est « en décalage avec la réorientation de l’US navy vers un conflit entre grandes puissances », la portée d’une telle arme étant insuffisante pour mettre un navire à l’abri de la menace du missile balistique chinois DF-21D [dont, au passage, on n’a aucune preuve de son efficacité, ndlr].

Aussi, poursuit-il, le canon électromagnétique « semble avoir été victime de la nouvelle tendance : les armes hypersoniques », comme le Common Hypersonic Glide Body [C-HGB], un planeur hypersonique développé conjointement par l’US Navy et l’US Army et dont la vitesse est annoncé à environ Mach 10 pour une portée de plus de 2300 km.

Aussi, il est désormais question de doter les trois navires appartenant à la classe Zumwalt d’une douzaine de C-HGB en lieu et place de leurs deux canons de type AGS et de leurs obus hors de prix. Ces destroyers « furtifs » [leur signature radar est équivalent à celle d’un petit bateau de pêche, ndlr] renoueraient ainsi avec leurs missions initiale, à savoir le combat littoral et la frappe contre terre.

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