Le Tchad accuse les forces armées centrafricaines d’avoir attaqué l’un de ses postes frontaliers

À la peine face à des groupes rebelles armés qui, récemment réunis au sein de la « Coalition des patriotes pour le changement » [CPC], se partagent les deux tiers du pays, les Forces armées centrafricaines [FACa] auraient attaqué un poste frontière situé en territoire tchadien, le 30 mai. C’est, en tout cas, la très grave accusation lancée par N’Djamena à leur endroit.

« Les forces armées centrafricaines ont attaqué, ce dimanche 30 mai, à 5 heures du matin, le poste avance de Sourou, en territoire tchadien, non loin de la localité de MBéré, et à proximité de la frontière centrafricaine. […] Les assaillants, lourdement armés, ont tué un soldat tchadien, en ont blessé cinq, et cinq autres ont été enlevés pour être ensuite exécutés du côté centrafricain », a en effet affirmé Chérif Mahamat Zene, ministre des Affaires étrangères dans le gouvernement de transition tchadien.

« Le directeur général de la Gendarmerie centrafricaine a saisi l’ambassade du Tchad à Bangui pour que les autorités tchadiennes récupèrent auprès du chef de village de Mbang les dépouilles des cinq soldats faits prisonniers et exécutés par l’armée centrafricaine », poursuit Chérif Mahamat Zene.

Au moment des faits, et d’après une source sécuritaire tchadienne citée par l’AFP, les soldats centrafricains poursuivaient des combattants de l’Union pour la Paix en Centrafrique [UPC], un groupe rebelle appartenant à la CPC. Pourquoi s’en sont-ils pris à ce poste avancé tchadien? Mystère…

Quoi qu’il en soit, pour N’Djamena, ce « crime de guerre d’une gravité extrême et cette attaque meurtrière préméditée, planifiée et opérée à l’intérieur du Tchad, dont seul le gouvernement centrafricain connaît les raisons, ne sauraient rester impunis. » Reste à voir ce que fera le général Mahamat Déby, qui a pris la tête d’un « Conseil national de transition » après la mort du président Idriss Déby.

Cela étant, par le passé, le Tchad a régulièrement été accusé d’ingérence dans les affaires centrafricaines. Et il n’a pas forcément bonne presse à Bangui. En 2014, le président Déby avait décidé de retirer le contingent qu’il avait mis à la disposition de la Mission internationale de soutien à la Centrafrique [MISCA] après plusieurs incidents, le gouvernement tchadien étant accusé à l’époque de soutenir l’ex-coalition rebelle de la Séléka.

Encore récemment, et alors que la CPC venait de voir le jour peu avant de nouvelles élections en Centrafrique, le Tchad dut s’employer à démentir la présence de ses soldats parmi les rebelles.

« Le Tchad ne doit pas servir de bouc émissaire aux acteurs politiques centrafricains incapables de trouver la solution pour une sortie de crise dans leur pays. Depuis le retrait des contingents tchadiens de la MISCA en 2014, aucun soldat tchadien n’a franchi la frontière entre le Tchad et la RCA [République centrafricaine, ndlr] », avait réagi N’Djamena, en janvier dernier.

Par ailleurs, le même jour de l’attaque du poste avancé tchadien par les FACa, trois « paramilitaires » russes [de la société militaire privée Wagner?] ainsi que deux policiers centrafricains ont été tués sur la route entre Bébérati et Bouar, à plus de 400 km de Bangui. En effet, leur convoi a été visé par un engin explosif improvisé [EEI], ce qui est un mode opératoire nouveau en Centrafrique. Le secteur où cet incident s’est produit est celui où le groupe 3R [à dominante peule, ndlr], également membre d la CPC, est particulièrement actif.

Pour rappel, la Russie a considérablement renforcé son influence en Centrafrique depuis 2018, notamment via un important contingent « d’instructeurs » chargés de former les soldats centrafricains. Et 600 autres, « non armés », pourraient arriver dans les jours à venir, selon une notification adressée par Bangui au Conseil de sécurité des Nations unies.

Dans le même temps, et pour asseoir son influence, Moscou n’hésite pas à mener une campagne de désinformation à l’égard de la France, ancienne puissance coloniale. Ce qu’a dénoncé le président Macron, dans les colonnes du Journal du Dimanche, le 30 mai.

« Leur système de désinformation est très bien fait. Il alimente le recours aux mercenaires russes en Afrique. Le meilleur exemple en est donné par la République centrafricaine, où ce discours anti-Français a permis de légitimer une présence de mercenaires prédateurs russes au sommet de l’État avec un président Touadéra qui est aujourd’hui l’otage du groupe Wagner », a affirmé le président français. Et d’ajouter : « Ce groupe russe s’empare des mines, et par là même du système politique. C’est cela, la réalité. »

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