Le ministère des Armées veut développer une filière de semi-conducteurs à base de Nitrure de Gallium

Ces dernières années, l’opportunité de recréer ou non une filière de munitions de petit calibre afin de sécuriser l’approvisionnement des forces françaises a régulièrement fait l’objet de débats, notamment au Parlement, la question des matériaux critiques, pourtant essentiels à la fabrication d’équipements de pointe, a été plus rarement évoquée. Et pourtant, elle est essentielle.

Ainsi, par exemple, le Samarium et le Néodyme, qui font partie de ce que l’on appelle les « terres rares », servent à produire les aimants de missile ainsi que les moteurs électriques. Dans la même catégorie, le Lutécium et le Lanthane sont utilisés pour la fabrication des radars, sonars et autres capteurs. De même que l’Yttrium, que l’on trouve aussi dans les satellites et le fuselage des avions de combat.

Les réacteurs, comme le M88 du Rafale, sont conçus avec Tantale [pour les aubes de turbine] ou encore avec du Tungstène [pour les volets chauds]. Et un autre matériau critique, beaucoup utilisé pour la production d’équipements optroniques et de télécommunications ainsi que pour celle de systèmes de guerre électronique et de radars est le Nitrure de Gallium [GaN].

Il s’agit, explique l’Agence de l’Innovation de Défense [AID] d’un « matériau particulièrement adapté à la fabrication de circuits intégrés hautes performances fonctionnant jusqu’à 100 GHz pour des applications en télécommunications, spatiales ou militaires. Ces composants permettent notamment d’améliorer le niveau de puissance, le rendement et donc la compacité des systèmes radars, d’antennes actives ou des systèmes de guerre électronique. »

Et, associé à du carbure de silicium [SiC] à haute conductivité thermique, il permet une tenue en tension de 5 à 10 fois supérieure aux semi-conducteurs traditionnels et de « réaliser des composants qui allient tension de claquage, mobilité électronique et courant élevés. »

D’où l’intérêt d’en sécuriser l’approvisionnement… avec le projet NIGAMIL [pour « NItrure de Gallium pour applications MILlimétriques »]. Lancé en 2015 par la Direction générale de l’armement, son objectif est en effet de développer la première technologie européenne à base de Nitrure de Gallium sur substrat carbure.

C’est dans le cadre de ce dernier qu’a été développée la technologie GH15, laquelle donne désormais la possibilité d’intégrer sur une même puce un dispositif électrique permettant de former des signaux faibles en provenance d’une antenne [encore appelé amplificateur faible bruit – LNA] et un amplificateur haute puissance [HPA], le tout étant couplé à un élément d’un antenne active [comme celle d’un radar AESA].

Désormais, le projet a été confié par la DGA à la société United Monolithic Semiconductors [UMS], qui, ayant son siège social à Villebon sur Yvette [91], dispose de sites de production en France et en Allemagne.

La technologie GH15 est « désormais qualifiée et ouverte en fonderie pour les clients d’UMS qui pourront l’utiliser sur des produits industriels », a en effet annoncé l’AID, le 15 avril. Cela étant, d’autres études vont être conduites afin d’accroître le rendement et diminuer les dimensions des puces pour en « faciliter l’intégration, assurer la disponibilité des technologies de puissance GaN et garantir ainsi la souveraineté technologique européenne dans ce domaine », précise-t-elle.

En effet, les principales limitations du Nitrure de Gallium sont le rendement en puissance ajoutée [PAE], qui définit l’efficacité énergetique des amplificateurs [un dispositif de taille réduite transmettant une puissance électique élevée ayant tendance à chauffer, ndlr] ainsi que la fiabilité des composants à grille ultra-courte sub-150nm. Pour les lever, l’AID a signé un accord avec le CNRS, lequel conduit le projet de recherche structurant GREAT [hiGh fREquency GAn elecTronics], avec le concours de l’Institut d’Electronique de Microélectronique et de Nanotechnologies [IEMN], l’Institut Lavoisier de Versailles [ILV], l’Institut de recherche de Limoges XLIM et le Centre de Nanosciences et de Nanotechnologies [C2N].

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