L’Otan évoque une activité « inhabituellement élevée » des forces aériennes russes

À la fin de l’année dernière, l’Otan fit état d’une augmentation de l’activité aérienne militaire russe aux frontières de l’Alliance, laquelle s’était traduite par 350 décollages sur alerte [sur les 400 effectués] au cours des douze derniers mois.

« Les avions de combat de l’Otan sont en alerte 24 heures sur 24, prêts à décoller en cas de vols suspects ou inopinés à proximité de l’espace aérien de nos Alliés. La police aérienne est un moyen important par lequel l’Otan assure la sécurité de ses membres », avait alors souligné Oana Lungescu, la porte-parole de l’organisation.

Ces décollages sur alerte concernent plutôt les pays riverains de la mer Baltique, en raison notamment de leur proximité avec l’enclave russe de Kaliningrad, et ceux de l’Atlantique Nord, où l’activité de l’aviation russe a relancé la question de savoir si l’Irlande – membre de l’Union européenne mais pas de l’Otan – devait ou non se doter d’avions de combat pour assurer la protection de son espace aérien.

Généralement, les bombardiers stratégiques [Tu-95 « Bear » et Tu-160 « Blackjack] et les avions de patrouille maritime russes [Tu-142] évoluent avec leur transpondeur éteint et sans avoir déposé préalablement de plan de vol, ce qui est de nature à perturber le trafic aérien civil.

Cela étant, à Moscou, l’activité aérienne des pays membres de l’Otan aux frontières de la Russie fut également pointée par Sergueï Choïgou, le ministre russe de la Défense. « Ces derniers temps, les États membres de l’Alliance de l’Atlantique Nord ont intensifié leurs activités d’espionnage. L’intensité des vols de leurs avions de reconnaissance à proximité des frontières russes s’est accrue de plus de 30%. En août 2019, il y a eu 87 vols de reconnaissance, cette année, il y en a eu quelque 120 », avait-il dit.

Cette tendance n’est pas près de s’inverser. Ainsi, via un communiqué, l’Otan a évoqué une activité aérienne russe « inhabituellement élevée » le 29 mars. Activité qui a conduit, en l’espace de six heures, à dix décollages sur alerte pour intercepter six formations russes évoluant aux abords de l’espace aérien de l’Alliance.

Ce sont des F-16 norvégiens qui ont « ouvert le bal », après la détection de deux bombardiers Tu-95 « Bear « volant près des côtes de la Norvège. La formation russe a continué son vol en direction de la mer du Nord, ce qui a contraint la Royal Air Force [RAF] à faire décoller des Eurofighter Typhoon de la base de Lossiemouth [Écosse]. La composante Air de la Défense belge en a fait autant, avec deux F-16.

À noter que la RAF et la Défense belge n’ont pas parlé de Tu-95 « Bear » mais de Tu-142, la version « patrouille maritime » du bombardier stratégique russe. D’où la confusion dans le communiqué de l’Otan.

Plus tard, deux autres bombardiers russes, des Tu-160 « Blackjack » ont été interceptés par une paire de F-16 norvégiens au-dessus des eaux internationales. Dans la région de la Baltique, deux Eurofighter italiens, basés en Lituanie dans le cadre de la mission Baltic Air Policing, ont accompagné un avion de de lutte anti-sous marine Il-38, escorté par des chasseurs russes.

En mer Noire, l’Otan affirme que trois autres appareils russes, dont le type n’a pas été précisé, ont été escortés par des avions turcs [F-16, roumains [F-16 ou MiG-21] et bulgares [MiG-29] « jusqu’à ce qu’ils aient quitté la zone. » A priori, il s’agirait de trois évènements distincts.

« Les hommes et les femmes des deux centres multinationaux d’opérations aériennes de l’Otan situés à Uedem, en Allemagne, et à Torrejón, en Espagne, ont rapidement réagi face à des aéronefs non identifiés évoluant près des frontières de l’Alliance en lançant des chasseurs de Norvège, du Royaume-Uni, du Danemark, de Belgique, d’Italie, de Roumanie, de Bulgarie et de Turquie pour voir ce qu’il en était et protéger l’espace aérien de l’Alliance », a commenté le général Andrew Hansen, le chef d’état-major adjoint « Opérations » du Commandement aérien allié de Ramstein.

« L’interception de plusieurs groupes d’aéronefs russes montre la disponibilité opérationnelle des forces de l’OTAN, capables de protéger l’espace aérien des Alliés 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 et 365 jours par an », s’est-il ensuite félicité.

L’Otan n’a pas explicitement dit si les avions russes interceptés volaient avec leur transpondeur éteint. En revanche, son communiqué précise qu’ils n’ont à aucun moment pénétré dans l’espace aérien de l’Alliace et que les interceptions « ont été effectuées de manière sûre et selon les procédures normales. »

Dans le même temps, le Commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord [North American Aerospace Defense Command, ou NORAD], qui surveille l’espace aérien des États-Unis ainsi que celui du Canada, a fait savoir que deux avions de patrouille maritime russe Tu-142 avaient été identifiés dans l’espace aérien international, au large de l’Alaska.

L’an passé, a récemment indiqué le général Glen VanHerck, son commandant, le « NORAD a répondu à plus de vols militaires russes au large des côtes de l’Alaska que nous n’en avons vu depuis la fin de la Guerre froide. »

Quoi qu’il en soit, cette activité aérienne coïncide avec des manoeuvres militaires russes dans l’Arctique. Ces dernières ont culminé la semaine passée, avec trois sous-marins ayant simultanément brisé la glace en faisant surface dans les environs de l’archipel François-Joseph. Une première dans l’histoire de la marine russe.

Le 30 mars, ces manoeuvres sont entrées dans une nouvelle phase, avec des exercices aériens impliquant des avions MiG-31 [dont certains modèles peuvent emporter une arme hypersonique].

« Il s’agit d’un entraînement au combat intensif habituel, mais il s’agit aussi d’un signal adressé à nos amis étrangers – les Américains », a expliqué Viktor Kravtchenko, un ex-amiral de la marine russe, à l’agence Interfax. « De toute évidence, l’objectif était de montrer: n’essayez pas de maîtriser les mers du Nord. Nous sommes ici depuis longtemps », a-t-il ajouté.

En mars, l’US Air Force a conduit plusieurs missions dans le grand nord, avec des bombardiers B-1B Lancer, déployés en Norvège et B-2 Spirit, envoyés aux Açores [Portugal]. Les premiers ont assurés 9 missions tandis que les seconds ont effectué quatre sorties au-dessus du cercle polaire arctique.

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