Mozambique : Située près d’un important site gazier, la ville de Palma est tombée sous le joug de l’État islamique

En octobre 2017, le groupe jihadiste Ahlu Sunnah wal Jamaa [les « adeptes de la tradition du prophète »], encore appelé « al-Shabab » [sans rapport avec l’organisation somalienne du même nom, ndlr] lança une insurrection armée dans la province de Cabo Delgado, où la découverte d’immenses réserves de gaz naturel devaient permettre au Mozambique de devenir l’un des premiers producteurs mondiaux.

Malgré l’enjeu que représentait cette région, les autorités mozambicaines tardèrent à réagir, quand elles ne se réfugièrent pas dans le déni. Puis, elles finirent par solliciter le concours de sociétés militaires privées [SMP], notamment russes et sud-africaines. Dans le même temps, le groupe al-Shabab fit allégeance à l’État islamique et prit le nom d' »État islamique d’Afrique centrale » [ISCAP].

Seulement, la situation continua à se dégrader. En août 2020, les jihadistes s’emparèrent du port de Mocimboa da Praia, stratégique pour assurer la logistique des installations du site gazier d’Afungi, dont le groupe français Total est l’un des principaux investisseurs. Puis, un mois plus tard, ils débarquèrent sur les îles de Metundo et de Vamizi, se donnant ainsi la possibilité de menacer le trafic maritime au large de Cabo Delgado.

Les mois suivants, plusieurs attaques menées dans les environs d’Afungi décidèrent Total à suspendre ses activité dans la région. Puis il y eut une accalmie, mise au crédit de l’action des forces armées mozambicaines [Forças Armadas de Defesa de Moçambique]. Toutefois, en février, la situation restait préoccupante, comme le souligna, en février, Bernard Émié, le patron de la Direction générale de la sécurité extérieure [DGSE], lors d’un Comité exécutif sur le contre-terrorisme.

Effectivement, l’accalmie aura été de courte durée. Alors que Total venait d’annoncer la reprise de ses activités sur le site d’Afungi, Palma, ville de 75.000 habitants située à seulement dix kilomètres, a été attaquée par l’ISCAP en trois endroits différents.

Le sort de Palma peut faire penser à celui de Kolwezi, submergée par des rebelles katangais en 1978. En effet, de nombreux expatriés – au moins 180 – ont été pris au piège. Des opérations d’évacuation – par mer et voie terrestre – ont été tentées le 26 mars. Mais d’après la presse locale, au moins un convoi est tombé dans une embuscade qui a fait au moins sept tués.

Il est difficile d’avoir des informations sur la situation de la ville, étant donné que les relais téléphoniques ont été coupés [ce qu’a confirmé l’opérateur Vodacom]. On ne dispose donc que de témoignages de personnes ayant pu fuir les combats. Selon Pinnacle News, « des dizaines de civils ont été décapités ou abattus et au moins 21 soldats ont été tués. »

Quoi qu’il en soit, le 27 mars, Palma a fini par tomber sous le contrôle des jihadistes. « Les forces gouvernementales se sont retirées de Palma, donc la ville est de fait saisie », a confié une source sécuritaire citée par l’AFP. « Palma est tenue par les assaillants », a confirmé une autre.

Le fait que cette attaque ait été lancée alors que Total venait d’annoncer la reprise de ses activités est vraisembablement une coïncidence… Et l’accalmie qui avait été constatée plus tôt était probablement due à des difficultés liées à la saison des pluies qu’à l’action des forces mozambicaines dans la région.

En attendant, Total a de nouveau annoncé la suspension de ses activités à Anfugi. Et il reste à voir ce qu’envisage de faire Maputo pour reprendre le contrôle de la ville… Concernée par la situation en raison de la présence d’expatriés sud-africains dans la région, l’Afrique du Sud pourrait tenter une intervention…

C’est ce que croit savoir le journal « Daily Maverik« , édité à Johannesburg. « L’Afrique du Sud envisageait samedi d’envoyer des forces spéciales dans la ville côtière de Palma, afin d’évacuer plusieurs Sud-Africains qui seraient toujours pris au piège ou retenus en otage par les insurgés islamistes », a-t-il en effet écrit, le 27 mars.

Pour rappel, les forces spéciales américaines ont récemment lancé une mission visant à former et à entraîner leurs homologues mozambicaines. Quant à la France, concernée par l’implication de Total à Cabo Delgado et présente dans la région [avec Mayotte], elle envisage d’en faire autant. C’est en effet ce qu’avait affirmé Florence Parly, la ministre des Armées, lors d’une audition parlementaire, en janvier. « Nous sommes en train de voir comment nous pouvons appuyer, par de l’entraînement et de la formation, les forces armées » du Mozambique, avait-elle dit.

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