Le secrétaire général de l’Otan fait part de ses « sérieuses préoccupations » au sujet de la Turquie

Jusqu’à présent, le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg, a toujours cherché à ménager la Turquie, en minimisant les désaccords que son comportement suscite au sein de l’Alliance et ne manquant jamais une occasion de saluer ses contributions aux missions de l’Alliance, comme « en Afghanistan, en Irak et au Kosovo. »

Cela a été le cas en juin 2020, après que la frégate française Courbet a été illuminé par le radar de tir d’un navire turc alors que, prenant part à l’opération Sea Guardian, en Méditerranée, elle cherchait à contrôler un cargo suspecté de violer l’embargo sur les armes en Libye. Ou encore en décembre 2019, lors de l’intervention turque contre les milices kurdes syriennes, alors fer de lance du combat contre l’État islamique [EI ou Daesh].

« La Turquie est un allié indispensable », notamment sur le flanc sud. « Les bases en Turquie ont été importantes dans notre campagne contre Daesh. La Turquie est également l’allié de l’Otan qui le plus souffert [du terrorisme]. Et elle accueille des millions de réfugiés. Dans le même temps, il n’y a aucune raison de cacher qu’il existe également des différences et des désaccords. Mais je pense que l’Otan est le cadre pour permettre aux Alliés de soulever ces désaccords », avait déclaré M. Stoltenberg.

Justement, la liste des désaccords n’a cessé de s’allonger au cours de ces derniers mois, avec l’achat de systèmes russes de défense aérienne S-400 [incompatibles avec les équipements de l’Otan], les activités turques en Méditerranée orientale, à l’origine de tensions avec la Grèce, le dossier libyen ou encore la question migratoire avec l’Union européenne…

Aussi, le secrétaire général de l’Otan a-t-il finit par faire part de ses « sérieuses préoccupations » au sujet du comportement de la Turquie.

« J’ai de sérieuses préoccupations en ce qui concerne les divergences de vues [entre alliés] en Méditerranée orientale, la décision de la Turquie d’acheter le système de défense antimissiles russe S400 et les violations des droits démocratiques en Turquie », a en effet déclaré M. Stoltenberg, lors d’une visio-conférence avec les membres de la sous-commission Sécurité et Défense du Parlement européen, ce 15 mars.

« L’Otan compte 30 alliés différents, avec des géographies différentes, des coalitions au pouvoir différentes » et l’organisation est « une plateforme de discussions » dont le « rôle est de réduire les tensions. Mais cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas lieu à ne pas être préoccupé », a-t-il encore insisté.

En décembre, pour sa dernière participation à une réunion des ministres des Affaires étrangères de l’Otan, l’ex-chef de la diplomatie américaine, Mike Pompeo, s’en était vivement pris à son homologue turc, Mevlut Cavusoglu, dénonçant les « manquements » de la Turquie aux règles de l’Alliance et sa « politique du fait accompli » dans plusieurs crises régionales. Et d’aller jusqu’à accuser Ankara d’affaiblir la « cohésion » entre les Alliés, avec notamment son achat de systèmes S-400. Par la suite, Washington avait sanctionné l’industrie de défense turque, en interdisant l’octroi de licences d’exportation.

Reste à voir la position qu’affichera Antony Blinken, le successeur de M. Pompeo à la tête du département d’État. On le saura les 23 et 24 mars prochain, à l’occasion d’une nouvelle réunion des ministres des Affaires étrangères des pays membres de l’Otan. L’an passé, la diplomatie française avait appelé à « une grande explication franche » avec Ankara. Il se pourrait que son voeu soit exaucé.

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