Optronique : Le groupe Photonis va être repris par la société d’investissement HLD

Numéro un mondial des analyseurs par spectromètrie de masse et spécialiste des systèmes de vision nocturne, l’entreprise française Photonis intéressait particulièrement l’américain Teledyne après que son propriétaire, le fonds d’investissement Ardian, fit connaître son intention de s’en séparer.

Seulement, au regard des technologies mises au point par Photonis, ainsi que ses activités dans la dissuasion nucléaire, la perspective de son rachat par un groupe américain ne manqua pas de susciter une levée de boucliers.

Dans un premier temps, et alors que Teledyne avait mis 500 millions de dollars pour s’emparer de la pépite française, le gouvernement posa ses conditions, avec l’entrée au capital de Photonis de Bpifrance, assortie d’un droit de veto pouvant être utilisé dans cas de décision allant à l’encontre des intérêts de la France, la mise en place d’un « comité de sécurité interne », composé de représentants du ministère des Armées, et l’interdiction de transmettre aux États-Unis toute information relative aux matériels livrés aux forces françaises.

Par la suite, étant donné ces conditions, Teledyne manoeuvra pour faire baisser le prix de Photonis. Ce qu’il obtint, avec un rabais de 15%, consenti par le fonds Ardian.

Mais, en décembre, coup de théâtre : la ministre des Armées, Florence Parly, siffla la fin de la partie. « L’offre de rachat de Photonis par l’industriel Teledyne n’a pas fait l’objet d’un agrément au titre de la réglementation relative aux investissements étrangers en France », annonça-t-elle, pour qui cette décision traduisit la « volonté de protection des intérêts stratégiques de la France. »

« L’État travaille avec des acteurs industriels et financiers français à une solution de reprise nationale permettant de préserver la souveraineté de Photonis, entreprise essentielle aux opérations militaires françaises », avait également précisé la ministre.

Cette solution a donc été trouvée. En effet, après avoir mis la main sur le groupe Rafaut et Microwave Vision Group [MVG], la société d’investissement HLD, basée à Paris, fait savoir, le 15 février, qu’elle était « entrée en négociations exclusives avec Ardian, en vue de réaliser l’acquisition de Photonis, leader de la fabrication de tubes intensificateurs de lumière destinés aux jumelles de vision nocturne et de fabrication de systèmes de détection scientifique. »

Le montant de la transaction s’éleverait à envron 370 millions d’euros… Soit 55 millions de moins par rapport à la dernière offre de Teledyne.

« Je ne dirais pas que c’est une bonne affaire, les Américains avaient une approche avec des synergies, comme Teledyne est un groupe industriel, alors que nous, on est rentré en exclusivité pour reprendre Photonis dans son intégrité, sans l’associer à un groupe », a relativisé Cédric Chateau, le président du comité d’investissement de HLD, à l’antenne de BFM Business, ce 16 février.

L’objectif de HLD Europe est de doubler le chiffre d’affaires de Photonis dans les cinq à dix qui viennent.

« On a un ADN entrepreneurial qui est intrinsèque à notre groupe d’investissement. On est un groupe d’investissement à capitaux permanents, on n’a pas d’horizon de temps. On laisse au management le temps de mettre en place le plan d’affaires sur la durée et lorsqu’on est une société technologique comme Photonis, c’est nécessaire d’avoir du temps devant soi », a expliqué M. Chateau.

A priori, pour atteindre cet objectif, l’accent sera mis sur la recherche et le développement [R&D] afin d’accroître l’activité de Photonis dans le secteur de la défense, mais également sur les marchés civils, grâce à une politique d’acquisitions ciblées.

Photonis « a des perspectives de développement dans ce marché [les systèmes vision nocturne, ndlr] mais aussi en développant une nouvelle gamme de produits, soit en intensifiant les efforts de recherche, soit en effectuant des acquisitions ciblées, en particulier en Europe », a ainsi expliqué Jean-Hubert Vial, associé chez HLD, à l’AFP. Aussi, a-t-il continué, il s’agira de « bien cibler les axes de développement en recherche », que ce soit dans la défense, la santé, le contrôle industriel ou l’énergie.

L’une des pistes envisagées serait de rapprocher Photonis avec Lynred [ex-Sofradir], la co-entreprise de Thales et de Safran dans le domaine de l’optronique.

« On a formulé cette offre sur Photonis sans échange particulier avec Thales et Safran. Mais dans le futur, il y a des rapprochements possibles notamment pour rapprocher la technologie infrarouge avec celle de Photonis qui est dans l’amplification d’image pour améliorer la vision nocturne », a confirmé M. Chateau.

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