M. Macron maintient le dispositif de Barkhane à 5.100 militaires et appelle à « décapiter » les groupes liés à al-Qaïda

En janvier 2020, à l’issue du sommet de Pau, ayant réuni la France et les pays du G5 Sahel [Mali, Mauritanie, Tchad, Niger et Burkina Faso], il fut décidé de renforcer la force française Barkhane à hauteur de 600 soldats supplémentaires et de concentrer les opérations dans la région le Liptako-Gourma, où l’État islamique au grand Sahara [EIGS] venait de revendiquer une série d’attaques particulièrment meurtrières contre les forces armées locales.

Un an plus tard, l’EIGS, par ailleurs aux prises avec le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans [GSIM ou JNIM], lié à al-Qaïda, a subi de lourdes pertes. « Si celui-ci conserve une capacité de nuisance et de régénération, il semble davantage à la portée des forces partenaires sahéliennes. Ses capacités actuelles ne lui permettent plus d’envisager la prise de postes avancés comme en 2019. S’il cherche toujours à se développer, c’est plus lentement, en reconstituant ses réseaux de racket et en visant les cadres de l’État ou les chefs locaux pour prendre l’ascendant sur les populations », avait ainsi résumé le général Marc Conruyt, le commandant de la force Barkhane, lors d’une audition parlementaire, en décembre.

Pour autant, l’EIGS a pu préserver sa « capacité de commandement et de contrôle », a ainsi relevé, dans son dernier rapport, l’Équipe d’appui analytique et de surveillance des sanctions adoptées par les Nations unies contre les organisation jihadiste. Et d’estimer que le groupe semblait « suffisamment résilient pour reconstituer sa base de combattants tout en maintenant une forte présence dans la propagande de l’échelon central de l’État islamique. » Qui plus est, son chef Adnane Abou Walid al-Sahraoui, court toujours.

Ce qui n’est plus le cas de plusieurs cadres d’al-Qaïda au Maghreb islamique [AQMI], associé au GSIM. En juin, son chef, Abdelmalek Droukdel, a été élimliné lors d’une opération des forces spéciales françaises.

Après ces succès tactiques et alors que le groupement européen de forces spéciales Takuba poursuivait sa montée en puissance, il fut avancé, en novembre dernier, que le format de la force Barkhane allait être probablement réduit à la faveur de la prochaine relève. L’hypothèse était d’autant plus crédible que le président Macron avait parlé, à plusieurs reprises, d’un éventuel « ajustement ».

Finalement, il n’en sera rien. Du moins, pas dans l’immédiat. Lors du sommet de N’Djamena, au cours du quel il a été fait un point sur la situation au Sahel, M. Macron a en effet affirmé que la France ne comptait pas réduire l’effectif de la force Barkhane, qui restera donc à 5.100 militaires.

« Des évolutions sans doute significatives seront apportées à notre dispositif militaire au Sahel en temps voulu mais elles n’interviendront pas dans l’immédiat », a dit le président français, expliquant qu’il « serait paradoxal d’affaiblir notre dispositif au moment où nous disposons d’un alignement politique et militaire favorable à la réalisation de nos objectifs. »

Et, désormais, l’accent sera mis sur les groupes armés terroristes liés à al-Qaïda, à commencer, donc, par le GSIM, dont la katiba Macina. Il faut une « action renforcée » pour « essayer d’aller décapiter ces organisations », dont « la plus haute hiérarchie continue à nourrir un agenda jihadiste », a dit M. Macron.

À noter que le dispositif militaire dans la région dite des trois frontières [car située aux confins du Mali, du Burkina Faso et du Niger] sera significativement renforcé avec le déploiement de 1.200 soldats tchadiens. L’annonce en a été faite le 15 février par le président Idriss Deby Itno. Reste à voir quand il sera effectif… car l’an passé, un bataillon des forces armées tchadiennes avait été également annoncé… Mais les circonstances en décidèrent autrement, N’Djamena ayant lancé entretemps l’opération « Colère de Bohoma » contre le groupe jihadiste Boko Haram, après une attaque contre une caserne située dans la région du Lac Tchad.

Quoi qu’il en soit, le GSIM a déjà fait l’objet de la récente opération « Éclipse », au cours de laquelle une centaine de jihadises ont été neutralisés, selon l’état-major des forces armées maliennes [FAMa].

Cela étant, d’après le rapport de l’équipe des Nations unies, le GSIM « bénéficie d’une position forte dans les régions de Mopti et de Ségou, notamment à Diabali, Bankass, Bandiagara et Koro. Il prétend rassembler différents groupes ethniques malgré sa responsabilité dans l’orchestration de violences interethniques. Il a récemment recruté des combattants dans les communautés dogon et bambara. »

Par ailleurs, le président français a également insisté sur le fait que la réponse ne pouvait pas qu’être militaire. Il faut « donner une perspective aux populations du Sahel » en appelant à un « deuxième sursaut : celui du retour de la sécurité et des services aux populations » et en demandant « une impulsion au plus niveau de l’État » pour réinvestir les territoires délaissés. « C’est par le collectif et l’action concrète sur le terrain que nous réussirons. La France continuera d’y prendre sa part parce que je sais que chacun est ici mobilisé », a-t-il fait valoir.

Photo : EMA

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