Boeing est autorisé à proposer son avion de combat F-15EX à l’Inde

Pour faire face à la Chine et au Pakistan, l’Inde entend doter sa force aérienne de 42 escadrons de chasse, ce qui suppose l’achat de 450 nouveaux avions de combat.

Outre les 36 Rafale commandés à la France, cette flotte devrait compter avions 200 LCA Tejas, 114 chasseurs-bombardiers issus du programme MRFA [Multi-role fighter aircraft] et 100 exemplaires du futur Advanced Medium Combat Aircraft [AMCA], un projet d’appareil de 5e génération confié à Hindustan Aeronautics Limited [HAL].

Dans le même temps, et pour ses porte-avions, la marine indienne a l’intention de se procurer 57 chasseurs embarqués dans le cadre du programme Multi Role Carrier Borne Fighters [MRCBF]. Ce dernier peut être lié avec l’appel d’offres MRFA dans la mesure où le choix d’un appareil commun à l’Indian Navy et à l’Indian Air Force permettrait de rationaliser la maintenance et l’approvisionnement en munitions.

Plusieurs constructeurs ont fait connaître leur intérêt pour le programme MRCBF, dont le russe RSK MiG, avec le MiG-29K, le suédois Saab, malgré son inexpérience en matière d’aviation embarquée, le français Dassault Aviation, avec le Rafale Marine et Boeing, qui a récemment montré des images d’un décollage d’un F/A-18 Super Hornet depuis un tremplin.

Cela étant, ce n’est pas cet appareil que le constructeur américain a l’intention proposer à l’Indian Air Force. En effet, le 28 janvier, Ankur Kanaglekar, responsable de Boeing India, a fait état de discussions entre New Delhi et Washington au sujet… du F-15EX.

Ultime version du F-15 « Eagle », le F-15EX est considéré comme un « réservoir » à missiles air-air, avec une capacité d’emport de 24 et Sidewinder. Conçu selon une « architecture numérique », cet appareil dispose d’un système de mission ouvert [Open Mission System] pouvant intégrer rapidement les dernières évolutions technologiques. Enfin, il est doté de nouvelles capacités en matière de guerre électronique ainsi que de logiciels et d’une avionique dernier cri. L’US Air Force espère en acquérir 144 exemplaires.

Selon M. Kanaglekar, Boeing a reçu une licence des autorités américaines lui permettant de proposer le F-15EX à l’Inde.

« Maintenant que nous avons la licence de commercialisation, nous pouvons parler directement à la force aérienne indienne des capacités » du F-15EX, a-t-il dit à la presse, ajoutant que les discussions devraient s’accélérer à l’occasion du salon Aero India, la semaine prochaine.

Il n’est pas précisé explicitement si cette proposition de Boeing, annoncée l’an passé, concerne le programme MRFA, pour lequel New Delhi a mis des conditions relatives à sa politique dite « Make in India ». En clair, l’Inde veut des retours industriels en échange de l’achat de 114 avions de combat.

Sur ce plan, fort de la commande de 36 Rafale, Dassault Aviation est déjà bien placé. De son côté, Lockheed-Martin ne ménage pas ses efforts, ayant noué un partenariat avec Tata Advanced Systems [filiale du groupe Tata] pour soumettre le F-21, une version indienne de son F-16 Viper, tandis que Saab a parlé d’installer un « éco-système industriel » en Inde autour de son JAS-39 Gripen E/F.

À noter que Boeing avait déjà annoncé un partenariat avec HAL et Mahindra pour produire le F/A-18 Super Hornet en Inde.

De par ses caractéristiques, le F-15EX se situe dans la même catégorie que les Su-30 MKI actuellement en service au sein de l’Indian Air Force, laquelle en a commandé 12 exemplaires en juillet 2020 pour en compenser l’attrition.

Mais il reste une inconnue de taille : l’interprétation qu’aura la nouvelle administration américaine de la loi dite CAATSA [Countering America’s Adversaries Through Sanctions Act], qui prévoit des sanctions contre les pays ayant acheté des équipements militaires à la Russie. Sous l’ère Trump, l’Inde y avait échappé… Qu’en sera-t-il à l’avenir, sachant que New Delhi a fait l’acquisition de systèmes de défense aérienne S400?

« Nous exhortons tous nos alliés et partenaires à renoncer aux transactions avec la Russie, lesquelles risquent de déclencher des sanctions en vertu de la loi CAATSA, qui ne prévoit pas […] de dérogation spécifique », a indiqué un porte-parole de l’ambassade des États-Unis à New Delhi, peu avant l’investiture de Joe Biden.

« Il y a peu de chances que l’Inde puisse éviter les sanctions, en supposant que l’achat de S-400 est terminé. Pour le moment, il y a fort à parier que des sanctions seront appliquées contre l’Inde » commenté Richard Rossow, du Center for Strategic and International Studies [CSIS] de Washington.

Pour autant, cet achat de systèmes S400 n’a nullement empêché, en octobre dernier, la signature d’un accord militaire entre l’Inde et les États-Unis, permettant un échange d’informations satellitaires [via le BECA – Basic Exchange and Cooperation Agreement].

Quoi qu’il en soit, la diplomatie indienne a fait valoir que « l’Inde ayant toujours mené une politique étrangère indépendante, ses acquisitions et approvisionnements militaires sont guidés par ses intérêts de sécurité nationale. » Et de rappeler : « L’Inde et les États-Unis ont un partenariat stratégique global global. L’Inde a un partenariat stratégique spécial et privilégié avec la Russie. »

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