Mme Parly évoque une coopération européenne pour développer le successeur du véhicule blindé léger

Au cours de leur engagement en Afghanistan, les forces français ont acquis une certaine expérience des engins explosifs improvisés [IED], largement utilisés par les taliban. D’ailleurs, a rappelé Florence Parly, la ministre des Armées, lors d’une audition à l’Assemblée nationale.

« C’est là que nous avons amorcé le processus de protection passive de nos engins, par du blindage [supplémentaire], par du brouillage, par une autre organisation du chargement et puis surtout en développant une approche de renseignement en amont des convois pour essayer de cartographier, déceler les signaux faibles pour tenter d’entraver les tentatives de l’ennemi », a ainsi affimé Mme Parly.

Seulement, au Mali, et les dernières attaques qui ont coûté la vie à cinq militaires français tendent à le démontrer, les « conditions d’engagement sont différentes de celles de l’Afghanistan », a fait observer la ministre. Cela tient en particulier à l’immensité de ce théâtre d’opérations. « Et même si nous disposons des meilleurs moyens disponibles et de l’expérience passée, il y a des vulnérabilités spécifiques », a-t-elle ajouté, soulignant que, au Sahel, « nous avons déployé les meilleurs matériels dont nous disposons ».

Reste que, comme l’a rappelé la députée Sereine Mauborgne, le Véhicule blindé léger [VBL] est régulièrement visé par les attaques commises avec des IED. Ce qu’a admis Mme Parly. « Beaucoup de pertes que nous avons subies l’ont été dans le cadre de l’utilisation de ces véhicules […] qui sont plus vulnérables », a-t-elle dit. « Et donc, nous cherchons à les renforcer », a-t-il continué.

Dans le cadre de la Loi de programmation militaire [LPM] 2019-25, il a été décidé de doter, d’ici 2025, l’armée de Terre de 730 VBL « régénérés », c’est à dire portés au standard « Ultima ». Ayant pris de la masse [leur PTAC est passé de 4,5 à 5,2 tonnes], ces engins sont dotés d’un moteur plus puissant [130 cv contre 95 cv], d’une boîte automatique, d’un nouveau circuit de freinage et de suspensions renforcées.

Cela étant, des VBL « renforcés » seront déployés au Sahel au cours du premier semestre 2021. C’est, en tout cas, l’annonce faite par Mme Parly aux députés.

Par ailleurs, et comme le prévoit le programme SCORPION, le VBL doit être remplacé par le VBAE [véhicule blindé d’aide à l’engagement]. Mais pas dans l’immédiat étant donné qu’il ne figure pas dans la LPM 2019-25. Cependant, l’état-major de l’armée de Terre [EMAT] voudrait accélérer les choses, comme l’avait indiqué que le général Charles Beaudouin, lors d’une audition parlementaire, en 2018.

« Nous avons bon espoir de lancer ce programme pendant la LPM et peut-être – soyons fous! – de voir les premières livraisons avant son terme », avait-il en effet déclaré au sujet du VBAE, précisant que l’EMAT souhaitait adopter une « démarche innovante pour son développement » et « discuter d’emblée avec la Direction générale de l’armement et l’industriel. »

En outre, deux modèles pourraient convenir pour remplacer le VBL assez rapidement : le Scarabee d’Arquus et le Hawkei de Thales. L’un et l’autre répondent à plusieurs besoins exprimés par l’EMAT, qui souhaite un « petit véhicule spécialisé très mobile, furtif et protégé », avec des « capacités d’acquisition et d’agression qui contribue[ro]nt au combat collaboratif SCORPION », des « capacités d’autodéfense » et d’un « kit de surprotection. » En outre, il devra être doté de capteurs « performants » et « prédisposé à la robotisation. »

Interrogée sur ce VBAE, Mme Parly a répondu que des travaux étaient en cours. « Nous travaillons, à plus long terme, sur le programme d’un véhicule blindé un peu plus lourd, dont nous souhaiterions qu’il puisse être conduit en coopération européenne et en nous appuyant sur les financements du Fonds européen de défense [FEDef] », a-t-elle expliqué.

Actuellement, parmi les projets retenus au titre de la Coopération structurée permanente [CSP/PESCO], donc éligibles à un financement du FEDef, on ne trouve qu’un projet de véhicule blindé, appelé « Armoured Infantry Fighting Vehicle / Amphibious Assault Vehicle / Light Armoured Vehicle » [AIFV/AAV/LAV]. Coordonné par l’Italie, il réunit deux autres pays, à savoir la Grèce et la Slovaquie.

Ce projet vise à « développer » et « à construire » le prototype d’une plateforme commune qui se déclinerait en différentes version, allant du véhicule blindé d’infanterie au véhicule blindé léger, en passant par le véhicule d’assaut amphibie. En l’état, il n’est pas certain que corresponde aux besoins exprimés par l’EMAT pour le VBAE…

Quoi qu’il en soit, Mme Parly a également évoqué le développement d’autres technologies visant à contrer la menace des IED, soulignant que le blindage des véhicules était une condition nécessaire mais pas suffisante. « Quelle que soit la force du blindage, les quantités d’explosifs qui ont été utilisées au Mali […] est telle que, de toute façon, même le meilleur engin blindé ne peut pas protéger les soldats qui s’y trouvent », a-t-elle dit.

Aussi, a poursuivi la ministre, « nous travaillons sur des technologies de détection, fondées sur des radars », comme « le radar pénétrateur de sol, destinés aux engins qui ouvrent les itinéraires » ou encore « des radars aériens embarqués pour déceler, entre plusieurs passages, d’éventuelles modifications de terrain qui auraient pu intervenir ».

Un tel usage de ces « radars aériens embarqués », comme il a été décrit par Mme Parly, a de quoi laisser dubitatif… On aurait pu penser qu’ils seraient surtout plus utiles pour détecter les drones piégés, qui sont aussi une menace importante, au même titre que les IED.

Une autre piste a été avancée par la ministre. Ainsi, elle a évoqué la mise au point de véhicules autonomes pour les ouvertures d’itinéraires, « donc couplés aux engins de tête ». Mais ces technologies « ne peuvent pas encore être déployées » pour le moment, a-t-elle dit. « Mais nous considérons que ce sont des pistes extrêmement prometteuse », a-t-elle conclu.

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