Mali/Bounti : L’ONG Médecins sans frontières parle de « bombardements » sur deux localités distinctes

Depuis le 3 janvier, la pression est mise sur Barkhane, via les réseaux sociaux. En effet, la force française engagée au Sahel est soupçonnée d’être à l’origine d’une frappe ayant visé un mariage organisé dans la localité de Bounti, située dans le centre du Mali, au nord de Douentza.

L’association peule Tabital Pulakuu a été la première à évoquer ce raid aérien présumé sur Bounti, avançant qu’il aurait coûté la vie à une « vingtaine de personnes civiles au moins. » Pour le moment, elle n’en a pas dit un mot sur son site Internet, lequel a été mis à jour le 5 janvier pour publier une dépêche de l’AFP sur l’attaque jihadiste contre deux villages nigériens ayant fait, selon un dernier bilan, au moins 100 tués.

Différents témoignages recueillis auprès des habitants de Bounti affirment que la frappe en question a été effectuée par un hélicoptère évoluant à très basse altitude. L’un des villageois a en outre affirmé qu’aucun représentant des autorités maliennes ne s’est rendu depuis sur place. « Alors, ce matin, on a creusé une fosse pour mettre les corps, qui sont restés là depuis dimanche sans que personne n’y touche », a-t-il confié à l’AFP.

Les corps « ne sont pas identifiables, ce sont des restes de corps, des morceaux de corps humains éparpillés », a rapporté un autre témoin. « Nous aimerions que les autorités viennent au moins nous dire à qui appartient l’hélicoptère, qui a tué nos parents », a-t-il ajouté.

Seules les Forces armées maliennes [FAMa] et Barkhane ont la capacité de conduire une telle opération. Depuis le 3 janvier, les autorités maliennes gardent le silence. Hormis un « haut gradé » de l’état-major malien qui a assuré, officieusement, auprès du quotidien L’Indépendant qu’aucune frappe « n’a été conduite « vers la localité susnommée » et qu’il « n’y a pas non plus eu de survol de la zone par nos appareils à la date indiquée. »

Quant à la force Barkhane, elle a admis avoir visé un groupe armé terroriste dans le secteur [mais sans préciser la position exacte] à l’issue d’une manoeuvre de renseignement ayant duré plusieurs jours… Mais a nié toute responsabilité dans ce qui a pu se passer à Bounti. « Barkhane peut expliquer ce qu’elle a fait, pas ce qu’elle n’a pas fait », fait valoir l’État-major des armées [EMA].

Qui plus est, dès qu’il y a une suspicion de « bavure », une enquête de commandement est systématiquement ouverte, comme cela a été le cas en juin 2019, après qu’un détachement a ouvert le feu sur un pick-up n’ayant pas obtempéré aux sommations et avec deux adultes et un adolescent à bord.

Quoi qu’il en soit, la frappe contre le rassemblement jihadiste a été été effectuée par deux Mirage 2000, très probablement sous l’oeil d’un drone MQ-9 Reaper. Aucun hélicoptère n’a été engagé.

« Le comportement des individus, leur équipement et le recoupement du renseignement excluent autre chose qu’un rassemblement jihadiste comme Barkhane en frappe régulièrement », explique-t-on à l’EMA. « Il ne peut y avoir de doute et d’ambiguïté : il n’y avait pas de mariage », insiste-t-on.

D’où l’hypothèse qu’il y ait pu avoir, au même moment, deux actions distinctes… à deux endroits différents. Hypothèse que semble accréditer l’ONG Médecins sans frontières [MSF], très active dans la région de Douentza.

« Les équipes de Médecins Sans Frontières ont pris en charge huit blessés graves suite à des bombardements sur les villages de Bounty et Kikara, dans le centre du Mali, le dimanche 3 janvier 2021 », affirme en effet l’ONG, via un communiqué publié ce 6 janvier.

Le village de Kikara est situé à une quinzaine de kilomètres à l’ouest de celui de Bounti, au nord de la route nationale 16.

« Après avoir été avertis par des habitants de la présence de blessés ayant besoin de soins médicaux urgents, MSF a appuyé les autorités locales en envoyant deux véhicules pour référer les blessés vers le centre de santé de référence de Douentza », poursuit l’organisation humanitaire. Et de préciser : « Huit personnes ont été prises en charge au centre de santé de référence de Douentza. Les patients présentaient des blessures par balles et des lésions dues à des explosions. »

Cela étant, le fait qu’il y ait des blessés par balles paraît curieux étant donné qu’il est question d’un « bombardement ».

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