Centrafrique : Bambari est aux mains des rebelles; Moscou confirme l’envoi de 300 instructeurs militaires

L’accord de paix signé à Khartoum en février 2019 par les autorités centrafricaines et plusieurs groupes armés aura tenu un peu moins de deux ans. En effet, à quelques jours de élection présidentielle, plusieurs mouvements rebelles ont repris les armes.

En effet, le 15 décembre, plusieurs groupes issus de l’ex-coalition de la Séléka, qui déposa le président François Bozizé en 2013, et deux les factions anti-Balaka [celles de « Mokom » et de « Ndomaté »] ont publié un document dénonçant « l’échec patent » de l’accord de Khartoum. Puis ils ont annoncé leur alliance au sein de la « Coalition des patriotes pour le changement » et leur décision de marcher sur la capitale, Bangui.

Ce qui a donné lieu à des affrontements ayant opposé trois de ces groupes [3R, MPC et factions anti-balaka] aux Casques bleus de la Mission des Nations unis en Centrafrique [MINUSCA] et, a priori, à des mercenaires russes de la société militaire privée [SMP] Wagner.

Alors que, le 20 décembre, la MINUSCA a assuré que la situation était sous contrôle, le gouvernement centrafricain a indiqué que la Russie venait d’envoyer à Bangui « plusieurs centaines d’hommes des forces régulières, et des équipements lourds dans le cadre d’un accord de coopération bilatérale ». Et que le Rwanda comptait en faire autant.

Si Kigali a rapidement confirmé l’annonce faite par les autorités centrafricaines, Moscou a temporisé… en faisant d’abord part de son inquiétude sur la situation. Puis le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Mikhaïl Bogdanov, a nié tout déploiement de forces régulières en Centrafrique.

« Nous n’envoyons pas de troupes, nous respectons toutes les exigences des résolutions de l’ONU », a en effet affirmé M. Bogdanov, cité par l’agence Interfax. « Nous avons naturellement des gens là-bas, en vertu de nos accords avec le gouvernement centrafricain, de nos accords sur la formation de cadres et le travail de nos instructeurs » a-t-il cependant précisé.

Seulement, le 22 décembre, la Russie a fini par admettre qu’elle avait envoyé « 300 instructeurs militaires » supplémentaires en Centrafrique.

« Pour aider Bangui à renforcer les capacités défensives de la Centrafrique, la Russie a répondu rapidement à la demande du gouvernement [centrafricain] et envoyé 300 instructeurs supplémentaires pour la formation de l’armée nationale », a en effet annoncé le ministère russe des Affaires étrangères, précisant que cette décision avait été notifiée au Comité du conseil de sécurité de l’ONU, créé par la résolution 2127 relative aux sanctions contre la République centrafricaine.

Par la même occasion, la diplomatie russe a également fait par de sa « sérieuse inquiétude » au sujet de l’évolution de la situation sécuritaire en Centrafrique.

Justement, alors que Moscou confirmait l’envoi « d’instructeurs militaires », la ville de Bambari est repassée sous le contrôle de l’un des groupes rebelles, à savoir l’Unité pour la paix en Centrafrique [UPC].

Située à 380 km de Bangui, la ville de Bambari est stratégique dans la mesure où le contrôle de ses environs permet de verrouiller la Centrafrique, d’exploiter les mines de diamants qui s’y trouvent et de tenir les routes commerciales. D’ailleurs, ces dernières années, elle a été le théâtre d’affrontements entre l’UPC, le Front populaire pour la renaissance de Centrafrique [FPRC] et le Mouvement Patriotique pour la Centrafrique [MPC] d’Al Katim.

En 2017, la MINUSCA lança l’opération « Bambari ville sans groupes armés », laquelle permit, selon elle, d’y « restaurer l’autorité de l’État » et d’y « renforcer la protection des civls ». Un « Plan Opérationnel de Stabilisation Immédiate de Bambari » [POSIB] y fut ensuite appliqué, dans le cadre global du « Plan national de relèvement et de consolidation de la Paix de la Centrafrique » [RCPCA].

Mais, à vrai dire, les groupes armés n’étaient jamais très loin… En particulier l’UPC, dirigé par Ali Darassa. En juillet, ce dernier a été autorisé par le gouvernement centrafricain à s’installer de nouveau à Bambari, après avoir pris l’engagement de respecter l’autorité de l’État et commencer les opérations de désarmement et de démobilisation concernant son organisation. Ce qu’il contestera par la suite. En tout cas, le ver était donc dans le fruit.

Selon son maire, Abel Matchipata, cité par l’AFP, Bambari a été prise « sans violence contre les habitants » mais les combattants de l’UPC ont « pillé le commissariat, la gendarmerie et les maisons des particuliers. » Cependant, l’ONU a fait état de combats ayant duré deux heures entre les Casques bleus et les rebelles.

Dans le même temps, des affrontements entre des groupes rebelles et les forces centrafricaines, appuyées par des éléments russes, sur la route reliant Bossembele à Boali, ville située à environ 60 kilomètres au nord-ouest de Bangui, ont été rapportés. Et des accrochages ont également été signalés à une dizaine de kilomètres de la ville de Sibut, au nord-est de la capitale.

Photo : Archive – Humanitarian and Development Partnership Team CAR

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]