L’Otan se préoccupe de la sécurité des câbles sous-marins de télécommunications

Il y a cinq ans, les mouvements de certains navires commencèrent à attirer l’attention : leur route suivait les câbles sous-marins de télécommunication, par lesquels transite l’essentiel des communications mondiales [97% du trafic] et des transactions financières. « Il serait inquiétant d’entendre qu’un pays trafique des câbles de communication », avait commenté un porte-parole de l’US Navy, sans entrer dans les détails, qui étaient alors classifiés [et qui le sont toujours].

Évidemment, étant donné que les économies des pays occidentaux reposent toujours davantage sur les technologies de l’information, un éventuel sabotage de l’un ou de plusieurs de ces câbles aurait des conséquences incalculables. Mais la menace la plus probable est celle de l’espionnage. Un domaine que connaît d’ailleurs bien l’US Navy pour avoir utilisé, à cette fin, le sous-marin USS Halibut, ce dernier ayant collecté des renseignements en « écoutant » les communications de la flotte soviétique du Pacifique dans les années 1970 [opération Ivy Bell]. Depuis, cette mission a été reprise par l’USS Jimmy Carter.

En France, cette menace avait été brièvement évoquée par le Revue stratégique de défense et de sécurité, publiée en octobre 2017. « Les espaces maritimes sont au cœur de tensions croissantes, par leur rôle central dans la mondialisation des flux de toutes natures, y compris numériques [câbles sous-marins], les ressources qu’ils contiennent et le développement des capacités navales et aériennes de frappe à distance », avait-elle souligné.

Mais, généralement, ce sujet n’est qu’évoqué du bout des lèvres. Lors d’une audition au Sénat, un an plus tard, la ministre des Armées, Florence Parly, avait botté en touche alors qu’elle venait d’être interrogée sur les menaces susceptibles de viser ces câbles sous-marins. « Je pense que, dans une enceinte peut-être un plus refermée, nous pourrions évoquer ces sujets assez confidentiels », avait-elle dit.

Cependant, la Marine nationale aborda la question dans un numéro de son magazine Cols bleus afin d’y expliquer, dans les grandes lignes, les actions qu’elle menait alors pour surveiller et protéger les câbles de télécommunications.

Cette préoccupation est également partagée par le Royaume-Uni, où un copieux rapport fut remis en décembre 2017 par le Policy Exchange. Selon ce dernier, saboter les câbles sous-marins pourrait faire partie de la stratégie russe en cas de conflit.

Ce que confirma, à l’époque, le chef d’état-major des forces armées britanniques, qui était à l’époque l’Air Chief Marshal Stuart Peach [devenu, depuis, président du comité militaire de l’Otan, ndlr]. La « vulnérabilité des câbles [sous-marins] face au risque de sabotage russe constitue une menace économique potentiellement catastrophique », avait-il dit. Et d’ajouter : « En plus de ses nouveaux navires et sous-marins, la Russie continue de perfectionner ses capacités non-conventionnelles et la guerre de l’information. Par conséquent, nous devons continuer à développer nos forces navales avec nos alliés pour égaler la modernisation de la flotte russe. »

La question des câbles sous-marins n’est cependant sans doute pas évoquée aussi souvent qu’elle le devrait, sauf quand un navire russe attire l’attention, comme cela a été le cas l’an passé, avec le Yantar, un bâtiment de recherche océanographique et relevant de la Direction principale pour la recherche en eau profonde [GUGI], ou encore comme lors de la détection d’un sous-marin russe un peu spécial dans le golfe de Gascogne… En tout cas, elle a été au menu des ministres de la Défense des trente pays membres de l’Otan, le 23 octobre, l’un des thème de leur réunion par vidéoconférence portant justement sur la « résilience ».

Interrogé sur le fait que la marine russe « sonde de manière agressive les réseaux sous-marins de câbles de cimmunication », le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg a souligné « l’importance cruciale » de ces dernier car « ils transmettent la grande majorité des données de communication mondiales » et que « par conséquent, cette question est d’une grande importance à la fois pour la société civile, mais aussi pour différentes capacités militaires. »

Sans pour autant citer les actions prêtées à la Russie, M. Stoltenberg a évoqué un rapport sur « les vulnérabilités liées aux câbles sous-marins et sur l’importance de pouvoir protéger les infrastructures sous-marines. »

« Je pense qu’il est important de régler ce problème, car il est faut comprendre que la plupart de ces câbles appartiennent à des intérêts privés et que l’on sait où ils se trouvent. Et cela les rend potentiellement vulnérables. Nous devons donc surveiller leurs vulnérabilités potentielles. C’est en partie la raison pour laquelle nous avons produit ce rapport », a ensuite expliqué l’ancien Premier ministre norvégien.

Cela étant, l’Otan dispose, selon lui, d' »outils » pour surveiller et protéger ces câbles sous-marins des menaces qui pèsent sur eux. Et cette mission fait partie de celles qui ont été assignées au nouveau commandement de l’Otan pour l’Atlantique, basé à Norfolk, aux États-Unis. Pour rappel, cette structure a été créée [ou plutôt recréé puisque, par le passé, elle a existé sous l’appellation « Commandement allié Atlantique – SACLANT] pour assurer la protection des voies de communications maritimes entre l’Europe et l’Amérique du Nord.

« Dans le cadre de nos efforts pour renforcer la résilience, les câbles sous-marins, l’infrastructure sous-marine en est une partie importante », a conclu M. Stoltenberg.

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