Le président Erdogan promet « d’amères expériences » sur le terrain à la Grèce

Depuis que la Turquie a répondu à l’accord conclu par la Grèce et l’Égypte sur leurs zones economiques exclusives [ZEE] en Méditerranée orientale en envoyant, sous escorte militaire, le navire de recherche sismique Oruç Reis dans un secteur situé entre la Crète et la République de Chypre, les tensions entre Ankara et Athènes sont montées d’un cran. Et rien ne semble pouvoir la faire baisser.

Assurant la présidence tournante de l’Union européenne [UE], l’Allemagne a tenté une médiation qui s’est révélée vaine. Tout comme l’initiative de Jens Soltenberg, le secrétaire général de l’Otan, pour discuter d’un mécanisme de « désescalade » entre les deux pays, par ailleurs membres de l’organisation depuis 1952.

À Athènes, il n’est pas question de négocier avec un pistolet sur la tempe. « Laissons de côté les menaces, afin que des contacts puissent s’établir », a ainsi déclaré Kyriakos Mitsotakis, le Premier ministre grec, le 4 septembre, alors que son ministre des Affaires étrangères, Nikos Dendias, devait rencontrer Antonion Guterres, le secrétaire général des Nations unies, pour évoquer les « activités hors la loi » de la Turquie.

Dans cette affaire, la Grèce s’appuie sur la Convention des Nations unies sur le droit de la mer, selon laquelle les États côtiers disposent de droits souverains jusqu’à 200 milles dès lors que la distance entre les côtes opposées le permet.

Par ailleurs, la République de Chypre est également concernée par les revendications turques. En effet, depuis qu’elle occupe la partie nord de l’île [la République turque de Chypre Nord – RTCN, qu’elle est la seule à reconnaître], la Turquie nie le droit au gouvernement chypriote d’exercer sa souveraineté sur sa zone économique exclusive, qui, pourtant, ne concerne que le sud.

Quoi qu’il en soit, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, n’entend pas baisser de ton à l’égard de la Grèce. Alors que devaient commencer des manoeuvres militaire en République turque de Chypre Nord [RTCN, seulement reconnue par Ankara, ndlr], il a renouvelé s’en de nouveau vigoureusement pris à Athènes ainsi qu’à Nicosie.

« Ils vont comprendre que la Turquie est assez forte politiquement, économiquement et militairement pour déchirer les cartes et les documents immoraux », a en effet déclaré M. Erdogan, dans une alusion aux zones maritimes que la Grèce et la République de Chypre considèrent comme relevant de leur souveraineté.

« Ils vont comprendre, soit par le langage de la politique et de la diplomatie, soit sur le terrain via d’amères expériences », a encore mis en garde M. Erdogan. « La Turquie et le peuple turc sont préparés à toute éventualité et à toute conséquence », a-t-il assuré, avant de prétendre qu’Ankara accepterait « toute forme de partage [des ressources gazières] du moment qu’il est équitable. »

Ce 6 septembre, le ministère turc de la Défense a affiché sa fermeté à l’égard d’Athènes. « Solides et puissantes! Les frégates et corvettes de nos forces navales poursuivent résolument leur mission d’escorte et de protection du navire de recherche Oruç Reis, qui continue à travailler dans ‘nos zones de juridiction’ en Méditerranée orientale. Aucune intimidation ne sera autorisée dans la région! », a-t-il prévenu.

En outre, les autorités turques ne perdent pas une occasion de critiquer Paris, qui a pris fait et cause pour Athènes et Nicosie. Après s’être offert un vol médiatisé au-dessus de la mer Égée à bord d’un F-16, cette semaine, le ministre turc de la Défense, Hulusi Akar, a tenu un discours que l’on n’avait pas entendu jusqu’à présent.

« La France pense qu’elle peut faire tout ce qui lui vient à l’esprit. La Méditerranée orientale ne lui suffit pas. Elle fait aussi des déclarations sur l’Irak », a dit M. Akar, évoquant le récent déplacement du président Macron à Bagdad, où il s’est dit attaché à la souveraineté irakienne, mise à mal notamment par une intervention militaire turque contre le groupe terroriste PKK dans le nord du pays. « Rien de tout cela ne contribue à l’esprit d’alliance, à la paix, au dialogue », a-t-il ajouté.

Puis, M. Akar est allé encore plus loin dans ses critiques. « D’une part, la France dit que l’Otan est en état de mort cérébrale et d’autre part, elle se cache derrière l’Union européenne et l’Otan. D’une part, la France considère l’insulte à notre prophète comme de la liberté. D’autre part, elle ne tolère par une question innocente d’un journaliste. C’est de l’hypocrisie », a-t-il dit, en faisant référence à la publication de caricatures de Mahomet par Charlie Hebdo et, sans doute, les reproches fait par M. Macron au journaliste Georges Malbrunot, au sujet d’un récent article sur le Liban publié par Le Figaro.

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