Méditerranée orientale : La Turquie annonce des manoeuvres navales avec des tirs réels

Depuis le 25 août, la Grèce, la République de Chypre, l’Italie et la France [avec trois Rafale et une frégate] mènent l’exercice naval et aérien « Eunomia » en Méditerranée orientale, pour « renforcer la sécurité et la stabilité dans l’ensemble de la région et de garantir la liberté de navigation ». Et cela face à la Turquie, qui y revendique le droit de prospecter, sous escorte militaire, des gisements d’hydrocarbures dans des secteurs revendiqués par Athènes et Nicosie.

Alors que l’Allemagne, qui assure la présidence tournant de l’Union européenne, tente d’apaiser les tensions entre la Grèce et la Turquie, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, se veut intraitable. « La Turquie prendra ce qui lui revient de droit en mer Noire, en mer Egée et en Méditerranée […] Nous ne ferons absolument aucune concession sur ce qui nous appartient », a-t-il dit, le 26 août, assurant de la détermination d’Ankara « à faire tout ce qui est nécessaire sur les plans politique, écononomique et militaire. »

En outre, lors d’un entretien téléphonique avec Donald Trump, son homologue américain, M. Erdogan a affirmé que la Turquie n’était pas le pays qui « provoquait l’instabilité en Méditerranée orientale »… alors que des navires de recherche sismique turcs naviguent dans des eaux situées entre la Crète et la République de Chypre. « Le force prime le droit », aurait dit Bismarck. Sans doute pense-t-on à Athènes [ainsi qu’à Paris] que le président turc s’en inspire…

Quoi qu’il en soit, la Grèce a fait savoir qu’elle est disposée à discuter avec Ankara, à la condition que la Turquie cesse ses « provocations ». Côté turc, on se dit également prêt à négocier seulement… si Athènes renonce à poser des conditions préalables. Et au regard des dernières annonces, le dialogue va être compliqué…

En effet, Ankara vient d’émettre une nouvelle notice maritime [Navtex] indiquant que les activités de son navire de recherche Oruç Reis, dont la présence entre la Crète et Chypre explique en grande partie les tensions actuelles, allaient être encore prolongée jusqu’au 1er septembre.

Mais ce n’est pas tout : il est aussi question de nouvelles manoeuvres navales turques, impliquant des « tirs réels ». Cependant, ces dernières se dérouleront les 1er et 2 septembre, au large de la ville d’Iskenderun, qui, quand elle s’appellait encore Alexandrette, avait été placée sous mandat français après l’effondement de l’Empire Ottoman.

Justement, s’agissant de la France, le minsitre turc de la Défense, Hulusi Akar, n’a pas ménagé ses critiques à son endroit, comme, du reste, le fit récemment son homologue des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, en lui empruntant le même vocabulaire.

« La France, en particulier, devrait cesser de prendre des mesures qui accentuent les tensions. Ils n’obtiendront rien en se comportant comme des caïds « , avait en effet déclaré le chef de la diplomatie turque, le 14 août, après l’envoi, à Chypre puis en Crète, de deux Rafale français.

« Le temps des caïds est révolu. Vous n’avez aucune chance d’obtenir quoi que ce soit de nous en agissant de la sorte », a ainsi déclaré M. Akar, ce 27 août, à propos de la France. « Nos voisins grecs devraient savoir qu’ils ne pourront rien obtenir en appelant les pays comme la France […] Nous, les Turcs et les Grecs, devons résoudre nos problèmes nous-mêmes par le dialogue », a-t-il ajouté.

Cela étant, au début d’une réunion avec les ministres des Affaires étrangères de 27 pays membres de l’Union européenne, le chef de la diplomatie allemande, Heiko Maas, a estimé que les manoeuvres militaires en Méditerranée orientale « doivent cesser ». Et d’ajouter : « Nous avons avons besoin d’une solution diplomatique à ce conflit. Personne ne veut le résoudre avec des bateaux de guerre » dans la région. « Les parties ne vont pas s’asseoir à la même table alors que des bâtiments de guerre se font face », a-t-il poursuivi.

« La crédibilité de l’Europe est en jeu. L’UE […] doit défendre un ordre international global basé sur les valeurs et les principes » de l’Europe », a rétorqué Nikos Christodoulides, le ministre chypriote des Affaires étrangères.

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