La Russie envisagerait de développer avec la Chine un sous-marin conventionnel de nouvelle génération

En décembre 2012, le quotidien russe Kommersant indiqua que la Chine avait l’intention de se procurer quatre sous-marins à propulsion diesel-électrique « Amur-1650 » [nom de la classe « Lada » pour l’exportation, ndlr] auprès de la Russie.

Un tel achat ne semblait pas extravaguant, la composante navale de l’Armée populaire chinoise [APL] ayant déjà acquis 12 sous-marins de la classe Kilo, à propulsion « classique », auprès de la Russie durant les années 2000.

Cela étant, l’information du quotidien Kommersant fut confirmée par Pékin, via le Quotidien du Peuple [le journal du Parti communiste chinois] en mars 2013, après la visite à Moscou de Xi Jinping, qui venait de prendre les rênes de la Chine. Et deux de ces sous-marins Amur-1650 devaient être assemblés par un chantier naval chinois.

En matière de sous-marins, et même si elle s’est étoffée au fil des années, l’expertise chinoise était encore loin d’égaler celle de l’industrie navale russe. Aussi, ce contrat pouvait être une occasion de s’approprier quelques savoir-faire… Quoi qu’il en soit, et depuis cette annonce, plus aucune nouvelle au sujet de ce contrat n’a été donnée. Ce qui suggère qu’il n’est plus d’actualité.

« Au cours des dix dernières années, les sous-marins chinois Type 039 ont fait de grands progrès et leurs performances globales sont classées parmi les meilleures. Selon l’analyste chinois Shi Jianyue, les sous-marins de classe Lada n’offrent aucun avantage supplémentaire par rapport aux sous-marins de type 039. Il n’y a donc aucune raison d’en acheter à la Russie », a résumé le site China Arms, en novembre 2019.

Pour autant, toute idée de coopération entre la Chine et la Russie n’a visiblement pas été écartée. En effet, un responsable du Service fédéral pour la coopération militaro-technique russe a confié à l’agence Ria Novosti qu’un projet commun était en cours dans le domaine des sous-marins.

« Actuellement, nous collaborons avec la Chine sur la conception conjointe d’un sous-marin non nucléaire de nouvelle génération. Il est trop tôt pour parler de la date d’achèvement », a affirmé ce responsable, sans donner plus de détails.

« Je pense que la Chine souhaite obtenir des technologies russes pour réduire la signature acoustique de ses sous-marins. Pour la Russie, l’intérêt est de parvenir, compte tenu du financement restreint et des capacités de production limitées, à obtenir des ressources supplémentaires dans le cadre d’un travail conjoint. C’est un intérêt mutuel « , a commenté Konstantin Sivkov, un ancien officier de marine russe, devenu analyste militaire, auprès de Sputnik.

Pour le politologue russe Vladimir Kolotov, professeur à l’Université d’État de Saint-Pétersbourg, un tel projet ne peut qu’être mené que par « deux pays ayant un niveau de confiance mutuelle extrêmement élevé et une probabilité de conflit la plus faible possible. »

Justement, et si, en effet, la Russie et la Chine ont d’autres coopérations en cours [projet d’avion commercial CR929, hélicoptère lourd de transport pour le moment appelé « Advanced Heavy Lift », aide russe pour mettre au point un système d’alerte avancée pour l’APL, etc], cette information concernant le développement conjoint d’un sous-marin de nouvelle génération survient alors qu’il est avancé que Moscou freine des quatre fers pour livrer les systèmes de défense aérienne S400 commandés par Pékin pour trois milliards de dollars.

En 2019, la livraison des missiles intercepteurs 40N6 destiné à un premier système S-400 avait été contrariée : le navire chargé de les transporter jusqu’en Chine ayant été pris dans une tempête. Et les engins avaient été « détruits ».

Depuis, la Chine attend toujours que le contrat soit honoré. En juillet, la presse chinoise a rapporté que le Kremlin avait reporté indéfiniment toutes les livraisons liées au S-400. Étant donné que la mise en oeuvre de ces systèmes exige l’envoi de techniciens russes et l’accueil de militaires chinois en Russie pour y suivre des formations, la pandémie de covid-19 est la raison avancée pour expliquer cette décision.

Mais, la covid-19 a bon dos… En juin dernier, Valery Mitko, président de l’Académie des sciences de l’Arctique à Saint-Pétersbourg, a été arrêté pour avoir transmis des informations sensibles aux services de renseignement chinois… Mais cette affaire ne peut pas expliquer le report de la livraison des S-400. L’hypothèse la plus probable est que le Kremlin entend ménager la chèvre et le chou… C’est à dire préserver les relations entre l’Inde et la Russie.

Or, la Chine et l’Inde sont engagée dans un face-à-face tendu dans dans la région du Ladakh [Himalaya] en raison d’un litige frontalier. Aussi, si l’APL déployait des systèmes S-400 dans ce secteur, contre les forces indiennes, on peut imaginer sans peine que New Delhi en prendrait ombrage, alors même que des contrats d’armement [achat de MiG-29 et de Su-30] sont en cours de négociation avec Moscou.

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