L’US Air Force a peut-être une solution pour mettre plus de F-22A Raptor en première ligne

Initialement, il était question de doter l’US Air Force devait compter 750 F-22A Raptor au moment du lancement de ce programme, confié à Lockheed-Martin. Puis, avec la fin de la Guerre Froide, ce nombre a régulièrement revu à la baisse, pour tomber seulement à 381 exemplaires à la fin des années 2000. Mais c’était encore trop pour l’administration Obama qui, estimant que cet appareil n’était qu’un vestige d’une époque révolue, qui décida d’en arrêter la production.

Seulement, la réapparition des menaces dites de la force et l’affirmation d’une politique de puissance de la part de certains États ont changé la donne. Et la dernière stratégie de défense nationale des États-Unis, publiée en 2018, insiste désormais sur la nécessité de répondre aux défis posés par la Chine et la Russie, la lutte contre le terrorisme passant au second plan.

Le développement d’avions de combat de 5e génération comme les J-20 et FC-31 chinois ou encore le Su-57 « Felon » russe fait que le nombre de F-22A Raptor en dotation au sein de l’US Air Force est insuffisant. Et ce ne sont pas les F-35A qui pourront y remédier.

Pendant un temps, l’idée de relancer la production de F-22A fut avancée, avant d’être écartée en raison des 50 milliards de dollars d’investissement qu’il aurait fallu consentir. Aussi, la solution passe par l’achat de F-15 supplémentaires, dans leur version EX, nettement plus « musclée » que les précédentes.

Pour autant, la une marge de manoeuvre est étroite s’agissant de la flotte de F-22A Raptor, un « avion fondamentalement unique en raison de sa furtivité, de ses capteurs, de sa puissance de traitement et de ses performances en vol inégalées », comme l’a récemment souligné David Deptula, un ancien général de l’US Air Force.

Dans le détail, sur les 186 appareils encore en dotation [un exemplaire a été perdu en mai dernier, nldr] 123 sont en service au sein d’unités de première ligne [ceux appartenant aux versions block 30/35/40], 29 parmi les plus anciens [block 10/20] sont affectés au 43rd Fighter Squadron pour la transformation des pilotes, 16 servent à réaliser des essais et 17 sont en réserve [dont 13 aptes au combat]

Dans ces conditions, et au regard du taux d’attrition auquel elle peut s’attendre dans les prochaines années et des soucis de disponibilité, l’US Air Force ne peut pas se permettre de perdre plus de 10 avions pour maintenir ses escadrons de première ligne pleinement opérationnels. Ce qui veut dire que, en cas de conflit, sa marge de manoeuvre est quasiment inexistante.

Dans une tribune publiée par Defense News, le général Deptula a expliqué que la fin de la production du F-22, avec des besoins satisfaits seulement à moitié, a été une « tragédie dont l’impact se fera sentir pendant des années ». Mais comme il n’est pas possible de revenir en arrière, « ce qui importe maintenant est de savoir comment tirer le meilleur parti des F-22 que nous avons », a-t-il continué. Et, selon lui, une solution consisterait à transférer les 29 F-22 utilisés pour la formation aux unités de première ligne, après une mise à niveau. Cela « enverrait un message très clair aux adversaires potentiels » et « les défis de sécurité d’aujourd’hui et de demain n’exigent rien de moins », a-t-il estimé.

Et c’est le scénario qu’étudie de près l’US Air Force. Mais pour l’appliquer, cela suppose de revoir la formation de ses pilotes de chasse. D’où le concept « Rebuilding the Forge » [ou Reforge] qui, selon ses auteurs, va apporter des changements les plus « radicaux » depuis les années 1950.

À l’instar du projet Mentor, porté par l’armée de l’Air en France, le concept Reforge entend profiter du remplacement l’avion d’entraînement T-38 par le T-7 Red Hawk du tandem Boeing/Saab pour réduire de 40 à 22 mois la période de formation des élèves pilotes de chasse. Le tout en tirant parti des nouvelles technologies en matière de simulation [réalité virtuelle, intelligence artificielle, etc]. Une expérimentation doit être bientôt conduite, avec des appareils T-50 Golden Eagle [KAI/Lockheed-Martin] ou M-343 [Leonardo] de location.

Le recours aux nouvelles technologies permettrait ainsi de mieux préparer les pilotes appelés à prendre les commandes de F-22A Raptor… Et donc de verser les 29 appareils du 43rd Fighter Squadron à des unités de combat. C’est, en tout cas, l’une des pistes avancées par le général Mike Holmes, le chef de l’Air Combat Command [ACC] de l’US Air Force, à l’occasion d’une intervention  par vidéoconférence organisée par le Mitchell Institute Aerospace Nation.

« Les F-22 utilisés pour la formation sont toujours des avions très performants » et, même s’ils sont anciens, il sont « capables d’aller au combat, même sans avoir à les amener à un niveau supérieur. Si je devais aller me battre, je choisirais certainement l’un d’eux », a fait valoir le général Holmes.

Une autre option évoquée par le chef de l’ACC serait d’affecter ces F-22 anciens à des missions « Red Air ». En clair, ils pourraient offrir une opposition dans le cadre d’entraînements au combat.

Cela étant, la flotte de F-22A Raptor continue d’avoir des soucis de disponibilité. Ainsi, le général Holmes a confié que les appareils de ce type engagés au Moyen-Orient, notamment en Syrie, avaient volé plus que prévu, ce qui eu des conséquences sur le nombre de moteurs F119 disponibles. Mais le problème a été en grande partie réglé, grâce au travail avec Pratt & Whitney, a-t-il assuré.

À noter que, l’an passé, Lockheed-Martin s’est vu attribuer un contrat de 7 milliards de dollars pour assurer, durant 5 ans, le maintien en condition opérationnelle des F-22A Raptor ainsi que pour leur modernisation [logiciel 3.2B, intégration des missiles l’AIM-9X et l’AIM-120D, etc].

Photo : Staff Sgt. Jensen Stidham/US Air Force

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