L’US Navy dénonce encore une interception dangereuse d’un P-8A Poseidon par des Su-35 russes

Pour surveiller les forces navales – en particulier russes – déployées en Méditerranée orientale, l’US Navy envoie régulièrement un avion de patrouille maritime P-8A Poseidon voler au-dessus de cette région. Et à en juger par certaines photographies diffusées le 26 mai l’US AFRICOM [commandement américain pour l’Afrique] pour prouver le transfert de MiG-29 et de Su-24 russes de Syrie vers la Libye, ces appareils enchaînent les missions.

Ce qui donne lieu, parfois, à des rencontres « musclées » avec les forces aérospatiales russes basées à Hmeimim, en Syrie. En avril, à deux reprises, l’US Navy a ainsi dénoncé l’interception « dangereuse » d’un de ses P-8A Poseidon par un Su-35 Flanker E russe dans l’espace aérien international.

Dans les deux cas, un Su-35 avait effectué une « manoeuvre inversée à grande vitesse » à seulement quelques mètres d’un avion P-8A Poseidon, ce qui provoqua des turbulences de nature à faire perdre le contrôle de l’appareil.

Le 27 mai, l’US Navy a de nouveau fait état d’une interception dangereuse de l’un des ses avions de patrouille maritime. Mais, à la différence des deux précédentes, deux Su-35 Flanker E ont « encadré » le P-8A Poseidon afin de lui interdire toute liberté de manoeuvre. L’incident, assure le communiqué de la marine américaine, s’est produit au-dessus des eaux internationales.

« L’interception a été jugée dangereuse et non professionnelle », affirme l’US Navy, pour qui « les actions inutiles des pilotes russes de Su-35 ont été incompatibles avec les règles de vol internationales » et « mis en danger la sécurité des appareils ». Et de demander aux forces russes, comme à chaque fois qu’un tel incident se produit, de respecter l’accord INCSEA, lequel avait été négocié en 1972 par les États-Unis et l’Union soviétique afin de mettre en place un code de bonne conduite en cas de pareilles situations.

Cela étant, de telles manoeuvres ne sont, a priori, pas fréquentes. D’où des interrogations sur les motivations des pilotes russes. Le 16 avril, soit après le premier des trois incidents ayant impliqué un P-8A Poseidon, le général Tod Wolters, le chef des forces aériennes américaines en Europe, avait estimé qu’un tel comportement relevait du « propre chef » des pilotes russes et non d’une « tentative délibérée de Moscou de provoquer un incident ».

Cependant, en février 2018, après une série d’incidents ayant impliqué des avions américains et russes, le ministère russe de la Défense avait ironisé sur les plaintes adressées par le Pentagone. La force aérospatiale « continuera à maintenir une protection fiable de l’espace aérien russe. Si cela cause une dépression ou une phobie chez les pilotes américains, nous conseillons à la partie américaine d’éviter les vols à proximité des frontières russe ou qu’elle revienne à la table des négociations pour convenir d’un ensemble de règles pour de tels vols », avait-il déclaré.

Une autre raison pouvant expliquer cette attitude a été avancée par Doug Barrie, chercheur à l’International Institute for Strategic Studies [IISS] de Londres. Ainsi, durant la Guerre Froide, après l’interception d’un avion du Pacte de Varsovie, les pilotes retournaient à leur escadron, rédigeaient un compte-rendu et passaient à leur prochaine mission. Sauf que maintenant, avec les médias et les réseaux sociaux, des interceptions « musclées » deviennent vite virale…

Or, souligne Doug Barrie, ce ne serait pas un hasard si les avions de combat russes impliqués dans de telles manoeuvres qualifiées de dangereuses par les forces américaines sont généralement les plus récents, comme le Su-35 « Flanker E », dont l’image est « excellente », selon lui.

« Le Su-35 est un avion très performant. Ils [les Russes] essaient évidemment… de le vendre. Et c’est un bon moyen de le montrer », a abondé le général Frank Gorenc, ex-chef de l’US Air Force en Europe, auprès de Military.com.

Photos : US NAVY

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