En lançant une « guerre » sur les prix du pétrole, Riyad risque de perdre le soutien militaire américain

L’automne dernier, et après une attaque – attribuée à l’Iran bien que revendiquée par les Houthis, c’est à dire les rebelles yéménites- de deux sites pétroliers de la compagnie Aramco, les États-Unis renforcèrent leur présence militaire en Arabie Saoudite, en y déployant des batteries de défense aérienne Patriot et en y envoyant des avions de combat F-22 Raptor et des bombardiers B-1 Lancer.

Ils ne furent pas les seuls à apporter leur soutien – militaire – à Riyad. La France, via la Task Force Jaguar, a ainsi déployé un radar Giraffe AMB dans l’est du royaume tandis que la Grèce a annoncé, en février, l’envoi d’une batterie Patriot.

Cela étant, selon le Wall Street Journal, le Pentagone a décidé de retirer ses batteries Patriot d’Arabie Saoudite et envisagerait également de réduire la présence de l’US Navy dans le Golfe arabo-persique [GAP] ainsi que celle de l’US Air Force.

Le journal explique que ces décisions sont fondées sur une évaluation estimant que le niveau des menaces iraniennes contre les intérêts américains a baissé. Ce qui semble surprenant… au regard du récent incident entre des navires de l’US Navy et la composante navale des Gardiens de la révolution iraniens.

« Tout le monde savait que c’était temporaire, sauf si les choses s’envenimaient. Et les choses ne se sont pas envenimées », a expliqué un responsable militaire américain à l’AFP, au sujet du retrait des batteries Patriot.

Étant donné que l’attitude l’Iran n’a pas changé d’un iota, l’explication d’un niveau de menace moins élevé contre les intérêts américains peine à convaincre… En revanche, la politique pétrolière de Riyad est probablement une des clés de ce retrait militaire américain.

En effet, début mars, l’Arabie Saoudite a lancé une guerre des prix du pétrole avec la Russie alors que le marché subissait de plein fouet les effets du Covid-19. Un mois plus tard, l’OPEP, emmenée par Riyad, et Moscou se mirent d’accord pour réduire leurs exportations d’or noir d’environ 10 millions de barils par jour [soit 10 % de la consommation mondiale avant la pandémie].

Sauf que le royaume saoudien a fini par se mettre à dos les pétroliers américains… Et ces derniers ne manquent pas de relais au Congrès, certains élus, par ailleurs proches du président Trump, ayant réclamé des sanctions contre Riyad.

Les Saoudiens « ont passé un mois à mener une guerre contre les producteurs de pétrole américains, pendant que nous défendons les leurs. Ce n’est pas ainsi que les amis traitent leurs amis. […] Ce genre d’actions ne s’oublie pas facilement », a ainsi affirmé Kevin Cramer, sénateur du Dakota du Nord.

Or, selon l’agence Reuters, le président Trump aurait menacé le prince héritier saoudien, Mohamed ben Salman, que l’Arabie Saoudite risquait de perdre le soutien militaire américain.

« Le président se réserve le droit d’utiliser tous les outils pour protéger les producteurs américains [de pétrole], y compris notre soutien à leurs besoins de défense », a confirmé Dan Brouillette, le secrétaire américain à l’Énergie.

En clair, le pacte signé en 1945 à bord de l’USS Quincy, en vertu duquel Washington s’est engagé à assurer la protection du royaume saoudien en échange d’un accès privilégié à ses ressources pétrolières, a du plomb dans l’aile….

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