Un patrouilleur de la marine vénézuélienne a coulé après avoir percuté un navire de croisière

Entré en service en 2011, le patrouilleur vénézuélien ANBV Naiguatá, conçu par l’espagnol Navantia, a coulé alors qu’il assurait une mission de surveillance côtière au nord-ouest de l’île de La Tortuga, le 30 mars, peu après minuit.

Équipé de radars, relativement bien armé pour un navire de ce type [1 canon de 76 mm, deux de 20 mm et deux de 12,7 mm] et mis en oeuvre par un équipage d’une quarantaine de marins, l’ANBV Naiguatá a coulé après être en collision avec le paquebot RCGS Resolute, un navire battant pavillon du Portugal et appartenant à la compagnie Columbia Cruise Services, qui, contrairement à ce que laisse penser sa raison sociale, a son siège à Hambourg, en Allemagne.

Le patrouilleur a bien repéré le paquebot. Mais, estimant qu’il se trouvait dans les eaux territoriales vénézuéliennes, il a tenté de l’arraisonner. Après, les versions des deux parties divergent.

Le président vénézuélien, Nicolas Maduro, a accusé l’équipage du RGCS Resolute d’avoir agi de « manière agressive ». Et il a suggéré qu’il transportait des « mercenaires » voulant le renverser. « Vous devez être très naïf pour voir cela comme un incident isolé », a-t-il dit, à la télévision publique.

En outre, le ministère vénézuélien de la Défense a quant à lui dénoncé l’attitude des 32 marins du paquebot, ces derniers n’ayant rien fait, selon lui, pour venir au secours de l’équipage du patrouilleur en perdition. Ce qui, a-t-il fait valoir, est une « violation des réglementations internationales qui régissent le sauvetage en mer. » Cela étant, a-t-il ajouté, nos « effort de recherche et de sauvetage immédiats, couplés à la performance professionnelle et courageuse de notre équipage, ont permis le sauvetage de l’ensemble des marins ».

Seulement, Columbia Cruise Services a livré une autre version de l’incident. Ainsi, comme il n’accueillait pas de passagers à bord et alors qu’il devait se rendre Willemstad, la capitale de Curaçao, le RGCS Resolute en a profité pour effectuer un entretien « de routine » sur son moteur tribord. Seul son moteur bâbord fonctionnait pour rester à distance de sécurité de l’île de La Tortuga.

C’est alors que, selon l’armateur, le patrouilleur a pris contact par radio avec le RGCS Resolute avant de l’accuser d’être entré dans les eaux territoriales vénézuéliennes et de lui ordonner de le suivre à Puerto Moreno.

« Étant donné que le RCGS Resolute naviguait dans les eaux internationales à ce moment-là, le capitaine voulait avoir la confirmation de cette demande particulière, laquelle l’aurait dévié de la route qu’il avait prévu de suivre », explique Columbia Cruise Services.

Pendant que le capitaine du paquebot entrait en contact avec l’armateur pour avoir des instructions, des « coups de feu ont été tirés » et, peu après, l’ANBV Naiguatá s’est approché du côté tribord RCGS Resolute à un angle de 135°. Et la suite est connue… Si le navire civil a subi des dégâts mineurs n’étant pas de nature à affecter sa navigabilité [d’autant plus que, destiné aux croisières dans l’Antarctique, il a une coque renforcée], le patrouilleur vénézuélien, affichant 1.720 tonnes, a pris l’eau.

Par ailleurs, et contrairement aux allégations de Caracas, le navire de croisière a contacté contacté le Centre de coordination des opérations de sauvetage maritime [MRCC] de Curaçao. Puis il est resté sur place pendant une heure, soit le temps pour s’assurer que sa présence n’était pas requise pour aider au sauvetage des marins vénézuéliens.

Cela étant, cette affaire a quelques zones d’ombres. Étant donné que le RCGS Resolute dérivait, il a très bien pu pénétrer à l’intérieur des eaux territoriales du Venezuela sans le faire intentionnellement. Ce cas de figure est prévu par le droit de la mer : on parle alors de « droit de passage innocent ». Était-ce suffisant pour motivé l’intervention « musclée » de l’ANBV Naiguatá?

Trois hypothèses, au moins, peuvent être faites : soit le capitaine du patrouilleur a voulu faire du zèle, soit les autorités vénézuéliennes soupçonnaient le paquebot de se livrer à des actions illicités, soit et comme l’Iran l’a fait avec le pétrolier britannique Stena Impero, Caracas a voulu s’en emparer pour des motifs qui resteraient dès lors à déterminer.

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