L’Otan lance une réflexion pour renforcer l’unité et la coordination politique entre ses membres

Après l’offensive de la Turquie contre les milices kurdes syriennes, principales partenaires de la coalition anti-jihadiste dirigée par les États-Unis au sein des Forces démocratiques syriennes et les décisions prises sans concertation par le président Trump, Emmanuel Macron avait lancé, en novembre dernier, un pavé dans la mare en affirmant que l’Otan était en « état de mort cérébrale ». Et il n’avait pas été avare de critiques.

« Le président Trump […] pose la question de l’Otan comme un projet commercial. Selon lui c’est un projet où les États-Unis assurent une forme d’ombrelle géopolitique, mais en contrepartie, il faut qu’il y ait une exclusivité commerciale, c’est un motif pour acheter américain. La France n’a pas signé pour ça », avait ainsi affirmé le président français, estimant qu’il fallait « clarifier maintenant quelles sont les finalités stratégiques de l’Otan » tout en appelant au « réveil » des Européens.

Évidemment, les propis de M. Macron furent mal accueillis. Notamment par son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan. « Je m’adresse depuis la Turquie au président français Emmanuel Macron, et je le redirai à l’Otan. Fais d’abord examiner ta propre mort cérébrale. […] Ces déclarations ne siéent qu’à ceux dans ton genre qui sont en état de mort cérébrale », avait-il rétorqué, sans donner dans la finesse.

En Allemagne, la chancelière Angela Merkel estima qu’il n’était pas « nécessaire » de porter un « tel jugement intempestif » au sujet de l’Otan. « Les termes radicaux » de M. Macron « ne correspondent pas à mon point de vue au sujet de la coopération au sein de l’Otan », avait-elle dit.

À l’époque, l’ancien ministre des Affaires étrangères Hubert Védrine avait salué la déclaration d’Emmanuel Macron qui, « pour toutes sortes de raisons que l’on peut comprendre », selon lui, avait « mis les pieds dans le plat ».

Il « met un pied dans la fourmilière donc c’est normal qu’il y ait toutes ces réactions dans un premier temps », avait commenté M. Védrine, à l’antenne de BFMTV. Et d’ajouter : « Il faut laisser retomber toute cette agitation. Et je pense qu’après, même ceux qui veulent à tout prix faire comme si l’Otan marchait bien, ne posait aucun problème, ils seront obligés » de se rendre compte que le président Macron « n’a pas entièrement tort. »

En 2012, à la demande du président Hollande, Hubert Védrine avait remis un rapport dans lequel il avait plaidé pour un renforcement de l’influence de la France au sein de l’Otan, tout en s’y montrant « vigilante et exigeante » et en continuant de « plaider pour une Europe de la Défense ».

Quoi qu’il en soit, M. Védrine aura l’occasion de mettre en application ce qu’il préconisait il y a maintenant huit ans. En effet, l’ex-chef du Quai d’Orsay a été désigné pour faire partie d’un comité de dix personnalités qui sera chargé de mener une réflexion visant à renforcer le processus politique et l’unité de l’Otan, comme le souhaite la France.

Le principe de cette réflexion avait été arrêté lors du dernier sommet de l’Otan, organisé à Londres, en décembre dernier.

Ce comité « proposera des recommandations visant à renforcer l’unité de l’Alliance, à accroître la consultation et la coordination politiques entre les Alliés et à renforcer le rôle politique de l’Otan », a ainsi précisé Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’organisation.

Outre M. Védrine, ce groupe réunira Greta Bossenmaier [Canada], Anja Dalgaard-Nielsen [Danemark], Thomas de Maizière [ex-ministre allemand de la Défense], Marta Dassù [Italie], Hema Verhagen [Pays-Bas], Anna Fotyga [Pologne], Tacan Ildem [Turquie], John Bew [Royaume-Uni] et Wess Mitchell [États-Unis].

À noter que la Grèce ne sera pas représentée… alors que ses relations avec la Turquie demeurent compliquées.

« La composition du groupe chargé de conseiller le secrétaire général sur le processus de réflexion tient compte de l’équilibre entre les sexes, de l’expérience pertinente et de la répartition géographique des Alliés », a expliqué M. Stoltenberg. Et, a-t-il continué, co-présidé Thomas de Maizière et Wess Mitchell, il « engagera le dialogue avec les capitales des pays alliés et le Conseil de l’Atlantique Nord, l’organe décisionnel de l’Otan, et d’autres parties prenantes concernées. »

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