États-Unis : Le Corps des Marines va profondément se réorganiser pour contrer la menace chinoise

Si l’on considère l’histoire de l’US Marine Corps [USMC], on se rend vite compte que cette branche des forces armées américaines, qui relève administrativement de l’US Navy, a bâti sa réputation sur ses engagement dans la région Asie-Pacifique, et plus particulièrement lors de la Seconde Guerre Mondiale.

Cependant, durant ces 40 dernières années, l’USMC, à qui il est demandé d’agir rapidement en déployant une force expéditionnaire autonome, est régulièrement intervenu sous d’autres cieux, comme en Afrique [comme encore récemment en Libye, lors des opérations contre l’État islamique à Syrte], en Afghanistan et au Moyen-Orient. Et cela, dans le cadre des opérations de contre-insurrection et de contre-terrorisme menées surtout à partir de 2001.

Mais cette époque sera bientôt révolue car, alors que la nouvelle stratégie de défense des États-Unis insiste sur la priorité à donner aux défis posés par la Russie et la Chine, l’USMC va revenir à ses fondamentaux. L’idée étant qu’il puisse être en mesure de contrer les capacités de déni et d’interdiction d’accès que la Chine déploie dans la région Asie-Pacifique à l’appui de ses revendications territoriales, notamment en mer de Chine méridionale. Tel est, en tout cas, le cap donné par son chef, le général David Berger.

Ce dernier avait récemment donné la couleur, en affirmant vouloir se débarrasser des équipements inadaptés au nouveau concept EABO [Expeditionary Advance Base Operations] et investir dans de nouvelles capacités afin d’améliorer la « létalité » et la « survivabilité » de ses troupes. Il s’agirait ainsi de former une force plus légère et donc capable d’intervenir efficacement à court préavis.

L’objectif? « Se concentrer sur la guerre maritime, en refusant l’utilisation des mers aux adversaires et en garantissant la liberté d’action des forces américaines », avait expliqué le général Berger, en octobre dernier. Et il avait aussi prévenu que cette réforme exigerait de supprimer certaines capacités « traditionnelles » car devenues « trop lourdes » et donc « peu pertinentes » pour les prochains engagements auxquels il s’attend dans les années à venir. Et cela, au profit de nouveaux moyens faisant appel à des technologies émergentes.

D’où les annonces qui viennent d’être faites au sujet du format que devrait avoir l’USMC à l’horizon 2030, sachant que, comme l’a expliqué le commandant Joshua Benson, le porte-parole du Marine Corps Combat Development Command, il n’est actuellement « pas optimisé pour répondre aux exigences de la stratégie de défense nationale ».

Dans le détail, l’USMC va se séparer de ses chars lourds M1A2 Abrams, jugés inutiles dans le cas où il faudrait reprendre par la force des îles conquises par les forces chinoises. Or, les Marines utilisent des chars depuis 1923. Cette année-là, les Marines avaient perçu des M1917, c’est à dire la version américaine du Renault FT français.

Par ailleurs, l’USMC a également l’intention de tailler dans ses unités du génie [les ponts mobiles disparaîtront de son inventaire] et de dissoudre trois bataillons d’infanterie [de 800 soldats], 16 unités d’artillerie [sur 21] et deux compagnies amphibies [sur 6].

L’aviation des Marines va aussi perdre [beaucoup] de plumes, avec la dissolution annoncée de quatre escadrons, dont un de MV-22 Osprey, un de CH-53 Sea Stallion et deux d’hélicoptères légers d’attaque. Et le nombre d’avions F-35B et C passera de 16 à 10 au sein des Marine Attack Squadrons, ce qui ne devrait guère réjouir Lockheed-Martin.

Enfin, ce plan s’accompagnera d’une réduction des effectifs à hauteur de 12.000 personnels, afin de réaliser des économies pour disposer de marges de manoeuvres suffisantes pour doter l’USMC de nouvelles capacités. Ainsi, par exemple, il est question de développer un missile anti-navire de longue portée, destiné à interdire l’approche de certaines zones par des bâtiments adverses.

« Une capacité de missile antinavire basée au sol fournira des tirs antinavires depuis la terre dans le cadre d’une campagne de guerre navale antisurface intégrée. […] Cette capacité déployée vers l’avant […] améliorera la létalité de nos forces navales et aidera à refuser à nos adversaires l’utilisation de terrains maritimes clés », a ainsi fait valoir l’USMC auprès du Congrès.

Un autre projet vise à mettre sur pied des unités capables de s’emparer ou de construire des bases « expéditionnaires » pour soutenir la logistique des aéronefs et des navires appelés à combattre dans le Pacifique.

« Le Corps des Marines investira dans plusieurs capacités dont les tirs de précision à longue portée, la reconnaissance avancée, les systèmes sans pilote et les réseaux résilients », a résumé le commandant Benson.

Plus généralement, et outre l’Expeditionary Advance Base Operations, cette évolution de l’USMC s’inscrit aussi dans le concept « Littoral Operations in Contested Environments », lequel suppose une coopération encore plus approfondies avec l’US Navy.

Ce qui ne sera pas sans conséquences pour cette dernière, notamment au niveau de son format et de ses moyens. D’où, d’ailleurs, le lancement récent d’une étude sur l’avenir de ses capacités aéronavales, le Corps des Marines mettant en avant son concept de « Lightning Carrier », c’est à dire un porte-avions léger pouvant embarquer une douzaine d’aéronefs seulement.

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